17 | Jusqu'à ce que le problème s'en aille.

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Loaf est paisiblement endormi dans l'herbe, et je suis allongée sur le dos de Nerad qui broute, un livre à la main mais sans le lire. Observant distraitement mes amis qui s'amusent comme des enfants dans l'eau, je pense. À lui. La chasse a eu lieu il y a déjà une semaine. Nous sommes rentrés sous une pluie battante et dans le silence le plus complet. Aucun participant n'a posé de question dans la clairière où nous avons été trouvés. Pas même Myras – qui garde ses distances depuis – ni Leya et Loïc – repartis en m'invitant à leur rendre visite bientôt –. J'imagine qu'être un héritier a ses nombreux avantages, puisqu'il n'a pas l'air d'avoir de comptes à rendre à qui que ce soit n'étant pas roi. Pratique ! Cela n'a pas été mon cas avec Olios ainsi que Jonas, donc dans la cuisine de ma maison – alors que nous étions en train de nous sécher – j'ai dû m'expliquer. La panique sur le visage de mes parents était indescriptible. Voir la culpabilité sur celui de mon père m'a paru insupportable. Il s'en est tellement voulu. De ne pas avoir pu s'opposer  à ma participation à cet événement – bien sûr – mais encore plus de m'avoir empêché d'explorer ce qu'il appelle « mon don ». Pour ma famille et mes amis, c'est ce que c'est. Et j'ai bien conscience de ma chance, d'avoir quatre personnes qui m'entourent et me protègent avec tant de ferveur. Cinq, peut-être ? Que je sois toujours vivante ainsi qu'en liberté signifie qu'Estéban a préservé mon secret. Je ne l'ai pas revu. Enfin... Plus précisément, je l'ai esquivé à chaque fois que je l'ai aperçu. Mais je ne suis pas idiote non plus. Je sais que mon manège est forcément limpide à ses yeux, car il a déjà prouvé être un observateur hors pair ! Néanmoins, il ne s'est pas imposé. Cela veut-il dire que je peux lui faire confiance ? Peut-être. Mais pas trop quand même. Étant donné qu'il a été clair au sujet d'attentes que je ne peux pas satisfaire. Peu importe mon cœur qui bat plus vite ou combien mon bas ventre s'engourdit lorsque je le vois. Que je me rappelle ses lèvres sur les miennes et ses doigts glissants sur ma peau. Je suis Elora Foreas. Pas une vulgaire conquête. Peu importe que l'homme soit prince.

***

Mes pieds rejoignent l'herbe dans un soupir amusé, puis d'un pas décidé je me dirige vers le ponton en dénouant rapidement les liens de ma robe. Le soleil faisant scintiller la surface du lac me rend incapable de résister davantage. L'abandonnant sur le sol et en sous vêtements – visualisez une sous-robe légère – je m'élance en courant avant de plonger. L'eau tiède de cette saison me permet de me délecter de son contact alors qu'elle m'engloutie. Remuant afin de remonter, je suis accueillie par les visages ravis de mes deux camarades.

— Enfin te voilà ! s'exclame Jonas.

Je sais...

— On a cru que tu ne viendrais jamais ! rajoute Olios.

— Vous savez que pour moi c'est plus compliqué maintenant, râlé-je.

Oui. J'ai le corps d'une femme, désormais. Et bien que les habitants de la région tolèrent mon comportement divergeant, il y a quand même des choses que je peux difficilement me permettre ! Comprenez par là que je parle de mes formes moulées par le tissu mouillé. C'est injuste, n'est-ce pas ? De devoir se priver du plaisir d'une baignade à cause de son sexe.

— Justement il n'y a personne, profitons-en ! confirme mon ami blond dans un sourire.

Et oui ! Pourvu que ça dure !

Ce dernier affiche un air de défi que je remarque aussitôt.

Ah. Je vois.

— D'accord ! acquiescé-je dans un rictus arrogant.

— Vous allez encore recommencer ? soupire Jonas, clairement désabusé.

Lorsque la forêt chanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant