Chapitre 7 - Ne me laisse plus

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POV Ohm

Assis dans le jardin, je me laisse bercer par le mouvement de la balancelle sur laquelle je suis assis. Le soleil caresse mon visage. J'essaye de trouver un peu de sérénité dans le chaos de ma vie.

Tout ça, c'est la faute de ce garçon. Celui qui n'aurait dû être que le souvenir d'enfance d'un voisin sans importance a bouleversé toute ma vie.

Je ne m'intéressais à personne, je n'éprouvais aucune empathie, aucune curiosité. Je n'étais ni heureux ni malheureux. J'appréciais juste la vie jour après jour.
Je fais un travail qui me plaît, j'ai deux collègues sympathiques qui se sont calés sur mes habitudes et se sont accommodés de mon caractère. Dans mon entourage, il y a aussi mon manager Del qui fait le nécessaire pour que le monde extérieur, éditeur comme fans, ne me préoccupent pas outre mesure. Tout cela me convenait à merveille.

Et puis il est réapparu. Réapparu, alors que je pensais même ne pas le connaître. Mais quand je l'avais aperçu à la fenêtre de sa chambre, cela avait été comme une évidence.

Je l'attendais, sans le savoir. J'avais alors fait des choses qui ne me ressemblent pas. Je m'étais occupé des affaires des autres. Je lui avais permi d'entrer chez moi et même dans le jardin secret de mon atelier.
Il avait mis de la musique dans cette maison austère. Il avait mis du bruit. Je n'avais jamais autant parlé et ris avec quelqu'un auparavant? Comme un ado, j'étais sorti la nuit pour le retrouver.

Il était le premier pour qui je me suis inquiété. S'il se blesse, je le soigne. S'il pleure, je suis triste aussi et veux le réconforter. S'il rit, je suis aux anges et veux le serrer contre moi.

Mais il a disparu. Un vide indescriptible s'est installé dans chacune de mes journées er de mes nuits. Lorsque Miss Jessy a découvert nos escapades nocturnes, elle y a mis un terme. Elle a menacé de tout révéler à sa mère si nous nous acharnions à nous voir. Et pour sûr, celle-ci aurait fait déménager Fluke. Au moins, je sais qu'il est toujours là.

Et je n'ai même plus de bonne excuse pour défier la secrétaire. Car celle-ci a reconnu que Fluke allait mieux depuis qu'il pouvait rejouer du piano. Plus besoin donc pour lui de venir en jouer en douce chez moi. Elle lui a redonné accès au salon de musique.

Fluke avait protesté. Il avait demandé en quoi c'était mal d'avoir un ami et de passer du temps avec lui.

L'entendre dire ça m'avait blessé. Et au regard que Miss Jessy m'avait lancé, il était évident qu'elle avait saisi que je ne considérais pas Fluke comme un simple ami. Je sais que Kao et Earth en sont arrivés à la même conclusion. Notre position, lorsque ils nous ont surpris, pouvait sembler de prime abord innocente, mais nos corps étaient penchés l'un vers l'autre, nos mains en contact.
Et je sais que le regard que je pose sur lui est possessif et... plein de désir.

Fluke est-il le seul à n'avoir rien remarqué?

Et me voilà à broyer du noir. Quatre jours que je ne l'ai pas vu. Je n'ai pas cherché à le voir. Je ne sais pas si c'est pour le punir de ne pas me considérer comme je voudrai l'être. Ou si c'est par peur qu'on l'emmène loin de moi.

Mais lui non plus ne m'a pas donné signe de vie. Si Fluke n'est pas prêt à se battre pour notre relation, quelqu'elle soit pour lui, peut être vaut-il mieux en rester là.

Du coin de l'œil, je vois Earth dans l'atelier qui m'observe par la fenêtre, le regard noir. Kao semble essayer de le raisonner. Je sais que Earth m'en veut. Nous n'avons pas avancé sur le dernier chapitre. Et pour cause, je ne suis pas inspiré.

La dernière chose que j'ai dessinée, c'est Fluke et moi assoupis sur cette table. Comme une prémonition, si proche de la position dans laquelle nous nous sommes réveillés le lendemain.
Depuis, la tablette reste allumée sur ce dessin. J'ai peur de l'éteindre, peur qu'en fermant cette page, cela brise définitivement quelque chose entre nous.

Etait-ce toi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant