Pair-ou-Impair

Chapitre UN

-Fin août-

Ça vous arrive de vous poser cette question : « Comment tout à commencé ? » Moi souvent et pour n'importe quoi d'ailleurs. Je me la pose autant pour de sujet futile que pour quelque chose d'extrêmement important. Faut dire que je me pose constamment un tas de questions, je n'y peux rien, j'suis quelqu'un de curieux. Là tout de suite, je repense à ma relation avec lui. On n'avait pas pris un bon départ, loin de là, et voilà où nous en sommes deux ans après notre rencontre. J'en ai bavé, ce n'était vraiment pas évident, mais je ne regrette rien de ce qu'il s'est passé parce que tout cela nous a menés à cet instant.

Revenons deux ans en arrière.

J'avais vingt-deux ans et un mois plus tôt, je ne savais pas encore quoi faire de ma vie. Pathétique, n'est-ce pas ? Mon parcours était atypique parce que je n'avais jamais su ce qui me plaisait réellement, alors j'avais touché à tout un tas de filières. En général, j'adorais ce que je faisais au début, peut-être l'attrait de la nouveauté, le fait d'accéder à un autre univers... Honnêtement je ne sais pas. Mais au bout d'un moment, je me lassais. Je commençais à m'ennuyer, je ne prenais plus aucun plaisir et j'avais besoin de changement. C'est pour cette raison que je n'avais jamais été capable de garder un job très longtemps et, par conséquent, mes potentiels employeurs ne voulaient pas prendre de risque lorsqu'ils découvraient mon CV. Je ne leur inspirais pas confiance, ce qui était compréhensible : si j'avais été patron, je ne me serais pas embauché non plus.

Grâce à Facebook, j'avais retrouvé une amie d'enfance avec qui je m'entendais à merveille mais qui avait déménagé, alors nous nous étions perdus de vue. Je l'avais eue par téléphone dans un premier temps et c'était vraiment étrange de communiquer avec elle alors qu'on n'avait pas discuté ensemble depuis au moins dix ans. Elle revenait tout juste des Etats-Unis, cette veinarde. Pendant une année, elle avait quitté famille et amis pour devenir jeune fille au pair dans une famille inconnue qui parlait une langue étrangère. Elle était revenue complètement bilingue et ravie de son expérience. Apparemment, cette année lui avait été bénéfique en tous points.J'admirais son courage, moi qui avais souvent souhaité partir loin de chez moi sans jamais y arriver. Il y avait toujours de bonnes raisons pour justifier ma lâcheté. A l'époque je les trouvais justes mais, maintenant que j'y repense, elles n'étaient que des excuses car dans le fond j'avais trop peur. Parfois je poursuivais mes études, parfois j'étais en couple et ne voulait pas m'éloigner de lui, parfois j'avais réussi à trouver un travail... Tout ça n'était que du vent qui masquait ma faiblesse.

Quand Sara était revenue en France, elle avait finalement décidé de retourner dans sa ville natale – la mienne – et ça n'avait pas été pour me déplaire car j'étais désireux de découvrir ce qu'elle avait pu apprendre par le biais de cette aventure. C'était peut-être ridicule de définir ça comme une aventure mais pour moi, ça l'était ! Partir vers l'inconnu sans être certain de s'entendre avec les personnes chez qui on va séjourner pendant un an, il faut pouvoir le faire. Apparemment, elle ne le voyait pas de cette façon. En même temps, contrairement à moi, elle avait toujours été une personne sociable et directe. Elle n'avait donc eu aucun problème pour s'acclimater au pays et à la famille dans laquelle elle était tombée, des gens charmants avec trois enfants. Si ça avait été moi, rien que le nombre de mômes m'aurait fait peur.Plus je discutais avec elle et plus j'avais envie de me tester pour voir si j'en étais capable. Partir. L'idée m'excitait tout en me faisant flipper. Je n'étais jamais parti en voyage hors de mon pays, encore moins seul ! J'avais une petite famille simplement composée de mes parents ainsi que mon petit frère et nous faisions tout ensemble. M'imaginer dans un autre pays que le mien, sans repère, sans eux pour me guider, cela me faisait peur.