Chapitre 4

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Toute bonne histoire à un début, un milieu et une fin. Une introduction, des péripéties et une conclusion. Seulement, toutes les histoires ne sont pas bonnes. Certaines existent ; tout simplement.
Matt a vécu un bon nombre de celles-ci : de ces aventures qui vous changent irréversiblement, de ces péripéties qui altèrent votre vision du monde, et qui remettent en cause jusqu'à votre plus profonde morale.
Il est difficile de décrire les dilemmes que Matt rencontra sans diminuer leurs ampleurs dramatiques et leurs forces émotionnelles. Mais bon : Essayez d'imaginer la personne qui vous est la plus proche, celle pour qui vous donneriez votre vie. Maintenant imaginez que vous ayez le choix de sacrifier cette personne afin d'accéder à la compréhension de l'univers.
Le feriez-vous ?
Enfin, projetez que vous ayez fait ce choix tellement de fois, que la partie la plus difficile de ce dilemme soit celle de trouver la personne qui vous est la plus chère.

C'était ce qui était devenu la vie de Matt. Plus rien n'était simple : toutes questions engendraient systématiquement un raisonnement des plus profond.

Plus Matt remontait, plus les univers qu'il visitait étaient anciens. Et comme pour beaucoup de choses, une fois que toutes les idées les plus évidentes avaient été testées, les rêveurs s'attaquaient à des choses plus étranges. Lorsqu'il fut confronté à des mondes sans vie intelligente ou à des mondes constitués d'un seul organisme, il se demanda pour la première fois s'il n'était pas allé trop loin.
Sa première confrontation à un monde ou tout organisme vivant mourrait (sans le savoir) aléatoirement selon la victoire d'un enfant de douze ans et demi à chat-perché, le plongea dans une profonde réflexion, se demandant si d'autres mondes ne s'en étaient pas inspirés secrètement.
De fait, le nombre de monde ou la vie et la mort étaient régie par des lois des plus hasardeuses augmentaient avec son ascension.

A chaque nouveau rêveur qu'il rencontrait, les questions que Matt posaient se faisaient plus nombreuses et les réponses plus obscures, comme si leur langage n'était plus le même.

***

Lors de son ascension, un des rêveurs qui le marqua le plus fut L (de son vrai nom).
L était un chat.
Ce fut le premier rêveur non humanoïde qu'il rencontra. Il mit du temps avant d'arriver à entamer le dialogue. Celui-ci se fit avec du temps et beaucoup de poésie. Il apprit un nombre incroyable de choses avec L. L'horizon de son entendement en fût à jamais étendu.

***

Plus le temps passa, plus il s'interrogea sur ce à quoi ressemblerait l'origine. Cependant, il en avait vu tant qu'il ne pouvait plus rien imaginer. Son esprit était rempli de tant d'expériences, de tant d'images qui lui étaient projetées à chaque nouveau pas, et les limites de ses connaissances avaient été tellement repoussées, qu'il ne pouvait plus les atteindre pour projeter dans le vide de son esprit des nouvelles idées.

***

Les rêveurs ont cherché à explorer toutes les possibilités, suivre tous les chemins... Ils sont devenus de plus en plus frustré, aigris, obnubilé par cet unique objectif : trouver les réponse, atteindre la sortie du labyrinthe.

Seulement voilà, ce labyrinthe était finalement peut-être le leur : celui des possibilités qui s'offraient à chacun d'eux. A chaque choix qu'ils faisaient, c'était aussi possiblement un nouveau dédale qu'ils construisaient eux-mêmes.
Cette idée les terrassa tous : terrifié à l'idée d'être enfermé dans leur propre prison pour l'éternité. Cela était peut-être la découverte du premier piège du labyrinthe...

Bon. Comment je sais tout cela ?

En quelque sorte, on pourrait me considérer comme le jardinier du labyrinthe. Cela fait une éternité que je les entretiens et les cartographie. Dans les tréfonds de l'Unirêve j'ai en quelque sorte ma cabane à outils-bibliothèque d'où j'observe l'ascension des renégats et les chemins des rêveurs.
Ils se posent toutes cette question :

« Y a-t-il une origine, un vrai monde ? » A tous je leur répondrai que je suis dans le vrai monde. Certains essaye de le trouver, d'autres, plus rare, se posent un nombre interminable de questions supplémentaires. Alors je vais tout vous dire maintenant :

«Le vrai monde n'est pas un potager où l'on peut y récolter des tournesols. »

Fin.

La beauté du gesteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant