L'ultime voyage

L'ultime voyage (One shot)

La Terre rétrécit, toujours un peu plus chaque seconde, tandis que le vaisseau dans lequel je me trouve avance pour côtoyer les étoiles, les milliards et milliards d'étoiles. La cabine ainsi que tous les éléments qui la constituent tremblent abondamment, secoués par les frottements de l'air qui tente de me garder dans les bras de mon monde natal ; mais je dois avancer, car on m'a confié une mission, une qui répondra à la plus grande question des humains en mon temps :

Que se cache-t-il dans un trou noir ?

Je sais bien que ma mission n'est qu'un aller simple, mais ça ne fait rien. Tous les gens qui m'aimaient ou qui me connaissaient ne font plus partie de ma vie ou de cette réalité. Personne ne m'attend et personne ne pleure mon départ. J'ai énormément de chance de pouvoir à la fois aider la science en laquelle je crois depuis tout petit et pouvoir voyager dans cette immensité de vide où tout est plus grand que nous.

Les tremblements ont diminué depuis quelques minutes maintenant, m'indiquant que mon vaisseau a dépassé la dernière couche de l'atmosphère, me laissant en proie au vide spatial. De légères vibrations se font encore entendre à cause du réacteur principal qui continue de brûler du carburant pour contrebalancer la gravité qu'exerce la Terre et continuer d'augmenter ma vitesse.

D'autres minutes passent à nouveau, et me voilà plongé dans le calme le plus complet, agrémenté de quelques bruits électroniques et métalliques. Mon vaisseau a une destination précise, et il a été conçu de façon à ce que je ne puisse pas changer de trajectoire au dernier moment. J'ai décidé de participer à cette mission, il fallait que j'en assume les conséquences. Dans quelques années maintenant, j'atteindrai le trou noir au centre de notre galaxie, celui-là même qui lui donne cet aspect de spirale.

Destiné à tuer le temps, je décide de quitter mon siège ainsi que mon tableau de bord factice pour me balader dans les quelques mètres carrés que m'offrent mon vaisseau. Dans un coin aménagé opposé à l'emplacement de mon siège, je peux y consulter une carte qui m'informe des astres que je croiserai sur mon chemin. Tout y est indiqué : atmosphère, composition, formation, âge, traces d'eau, et j'en passe. Je sens que je vais passer un long moment devant cet écran, moi.

Sur un autre flan de la paroi du vaisseau, est accrochée une combinaison de sortie extravéhiculaire, bien trop petite pour moi. Comme je l'ai dit, je ne suis pas censé sortir du vaisseau ou même en détourner le cap.
Mon exploration continuant son cours, une petite voix robotique me sort de mon ennui qui commence lentement à arriver.

« Bonjour ! »

Cette voix, assez féminine, résonne dans la carlingue de métal, sans que je ne puisse vraiment discerner d'où elle provient. Inconsciemment, et peut-être dans un élan de politesse, je réponds :

« Bonjour ? À qui ai-je l'honneur ?

- Je suis A387-Vox, l'assistante prévue pour vous accompagner dans ce long et ultime voyage.

- Oh, je vois ! Dis-moi, tu saurais me dire quand on arrive ? »

Loin de moi l'idée de vouloir vite mourir en tombant dans un trou noir, comme le prévoit la théorie de Stephen Hawking, mais j'aurais bien aimé avoir une idée du temps qu'il me reste.

« Notre vitesse devrait accélérer pendant encore un jour ou deux, moment où nous atteindrons une vitesse de 10 000 km/s. Donc si je calcule, nous arriverons d'ici deux ans et six mois.

- Deux ans et six mois ? Ça va en faire, du temps à tuer... »

Mon regard s'égare sur les gros panneaux de commande protégés par des barrières de plexiglas, où de multiples lumières de toutes les couleurs clignotent en cœur, accompagnées de petits bruits électroniques.