L'assassin Carlton

Prologue

Vichy, Auvergne,septembre 2011 :

La colère disparut du visage de Manuela lorsqu'elle se tût, puis son corps tout entiers'affaissa. Ses grands yeux verts s'éteignirent, avalés par la noirceur de ses cernes ; les ténèbres semblaient y avoir creuser de profondes abîmes et s'étendaient chaque instant un peu plus. Cette jeune colombienne de quatorze ans n'avait probablement jamais eu l'occasion d'esquisser le moindre sourire.
Edward plongea son regard dans le sien, s'imprégna de chacune de ses expressions faciales et essaya de ne laisser paraître aucune émotion, car sur chacun des traits marquant la peau de l'adolescente, il pouvait deviner quel souvenir y habitait.
Il ouvrit la bouche mais, aucun son ne sortit. Ils ne s'étaient plus vu depuis des années et, chaque visite était un nouveau défi face à cette âme dépérie, malgré ses efforts et ses mots réconfortants, Manuela fuyait dans l'ombre.
Son arrivée en France, il y a quelques jours dans ce foyer pour adolescents, n'avait pas sauvé l'adolescente et ne la sauverait pas. Sa crainte de revoir surgir l'enfer de narcotrafiquants la dévorait et l'empêchait d'envisager une vie sereine.
Son visage vide effrayait. Le jeune homme partagea sa détresse en posant sa main sur la sienne. D'intenses minutes s'écoulèrent. Il connaissait par cœur ce regard terrifié.De ceux qui ont vu leur avenir brisé et leurs espoirs volés,acceptant le silence devenir le bourreau de leurs vies, l'étincelle dans leurs yeux éteinte à jamais.
Mais Edward refusait le déclin de Manuela, comme il avait aidé autrefois sa soeur à s'extirper de l'horreur de ces bourreaux. Sa petite nièce le fixait, hypnotisée par son regard bleu océan. Il perçut une infime étincelle persister. Il était son ultime héros.
Le jeune homme resserra l'étreinte de sa main et commença à parler lentement. Le regard ahuri de la fille laissa peu à peu place à de nouvelles convictions.
Ensemble, ils seraient plus forts.