Le choix

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— Astoria ! Tu viens ? Nous allons être en retard chez ta sœur.

— Je t'ai déjà dit trois fois que j'arrivais, ça ne sert à rien d'en rajouter !

Exaspérée, la jeune femme claqua la porte de la salle de bain avec un peu plus de violence qu'elle ne l'aurait voulu. Il était pourtant hors de question de s'en excuser. Le menton levé, elle passa devant son mari, saisit son manteau et franchit la porte d'entrée. Puis, elle se retourna, consciente d'être un peu mesquine :

— Bon, tu te dépêches ?

— Mon coeur, je ne sais pas ce que tu as en ce moment, mais ton attitude commence à me taper sérieusement sur les nerfs, souffla Drago, les sourcils froncés.

— Oh, excuse-moi de ne pas être une précieuse poupée docile...

— Mais pourquoi tu dis ça ? Tu n'as pas l'impression d'exagérer un peu ?

Depuis quelques jours, en effet, Astoria Malefoy vivait dans une colère permanente. Rien de ce que son mari disait ou faisait ne lui convenait. Quand il rentrait tôt du bureau et la sollicitait pour faire une promenade ou voir des amis, elle s'énervait parce qu'elle voudrait plus de temps pour elle après sa journée de travail. Mais quand il rentrait tard, elle se plaignait qu'il la délaisse. Quand il la laissait lire tranquille, elle se sentait mal aimée, et quand il s'approchait d'elle, elle avait l'impression d'étouffer.

Astoria était parfaitement consciente de ces paradoxes, mais elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une vive rancoeur envers Drago, directement liée à sa culpabilité. En somme, elle n'avait pas l'esprit tranquille.

Ils se rendirent à pied chez Théo et Daphné. Le couple vivait à dix minutes de chez eux, facilitant les dîners en famille. Habituellement, cela leur permettait de profiter de l'air frais et du paysage féérique de la campagne. Mais ce soir, entre les jeunes mariés, l'ambiance était électrique. Astoria savait parfaitement qu'elle avait tort, mais elle n'avait aucune envie d'arranger les choses entre eux, pas pour le moment.

Un regard vers le ciel et au lieu de s'extasier sur les étoiles, elle se demanda si elle aurait des nouvelles de Neville ou si quelque chose s'était définitivement brisé entre eux. Le regard du jeune homme la hantait. Tout se passait si bien pourtant, ils avaient surmonté leur gêne initiale, et voilà qu'il lui demandait avec qui elle était mariée ! Qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire, d'abord ? Ils avaient cet accord tacite, celui de ne pas parler de leur vie sentimentale et il était venu tout gâcher. Pire, il la jugeait. Les yeux bleu du jeune homme s'étaient assombris, voilés par une colère incompréhensible. De quel droit Neville Londubat se permettait-il de la juger ?

— Théo, ils sont là !

Daphné se précipita vers eux dans une tornade blonde et enlaça Astoria comme si elle ne l'avait pas vue depuis une éternité. Puis, elle pressa la main de Drago et emmena sa sœur à l'écart, dans leur petit jardin, comme à leur habitude. La brunette eut à peine le temps d'adresser un signe de la main à Théodore Nott. Drago, un sourire triste au coin des lèvres, la regardait s'éloigner. Cette vision la frappa en plein cœur et la culpabilité monta encore d'un cran. Elle ignorait que c'était possible.

Alors, sous le regard ébahi de sa grande sœur, Astoria se mit à pleurer. Affolée, Daphné l'entraîna sur un banc en pierre, à l'abri des regards. D'un geste maternel, elle enlaça sa petite sœur et lui caressa tendrement les cheveux. Les deux sœurs s'étaient considérablement rapprochées depuis la fin de la guerre.

— Je... Je... Je...

Sa voix tressautait, les mots peinaient à sortir de sa gorge, les larmes ruisselant en cascade le long de ses joues blafardes. Elle se sentait si mal à présent, le cœur broyé par un étau invisible. Oh, elle en suffoquait !

Mon sauveur de boueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant