Chapitre 1

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Début décembre, vendredi 23h55,

Dans la ruelle logée entre les bâtiments de trois étages, la nuit dépourvue de lune semble d'encre. Le petit néon fixé au-dessus de l'issue de secours du « Skull » nous éclaire à peine. J'fume une clope avec Mira, la meuf de Cyp, le tôlier du bar et mon second dans notre joyeuse bande de dévoyés.

A travers la porte coupe-feu le son étouffé nous parvient. Depuis la mise en place y'a six mois de deux soirées musiques latines par semaine, les mardis et vendredis, le « Skull » est plein à craquer de gonzesses en tous genres, en plus ce soir, la clémence de la météo laisse espérer qu'elles resteront chichement vêtues.

Et dire qu'aucun de nous n'avait cru que l'idée à la con de Mira marcherait du feu de dieu et qu'on pouvait tous en « tirer » profit. Avec les gars, on joue à tour de rôle la fonction de videur, ce qui fait que la frustration sexuelle nous est devenu une notion totalement inconnue, car les nanas qui s'entassent ici pour se trémousser sensuellement, ont pour la plupart besoin d'évacuer la tension érotique générée par cette musique de pseudo hétéro, autrement dit, on ne repart jamais seul de c'petit extra.

Depuis qu'elle a adopté le style pin-up Latina, Mira est devenue une vraie bombasse ce qui n'est pas fait pour déplaire au frangin, avec ses longs cheveux noirs ondulés, maintenus par une queue de cheval et un bandana rouge, ses lèvres tout aussi rouges et pulpeuses, sans compter ses fringues moulantes qui mettent en valeur ses longues jambes, son cul rebondi et ses seins.

Je tire une latte et détourne le regard vers l'artère principale d'où les voitures circulent à bonne allure, pour cesser de mater la meuf d'un pote. On a peu de règles mais celle qui dit « pas touche à ma nana » est primordiale pour la cohésion du groupe... Mais l'avoir au bout d'la queue ça doit être quelque chose !

— Vous partez quand ? souffle-t-elle en rejetant sa fumée pour couper court à notre échange de banalités.

— Lundi soir, affirmè-je, ma clope entre les lèvres.

— Vous y allez à trois voitures ? demande-t-elle inquiète comme à chaque fois qu'un run est prévu.

Je soupire et durcis le regard, parce que j'aime pas parler d'mon bizness avec des non-concernés.

— Nan, deux, j'conduirai la caisse ouvreuse et Sparrow la porteuse, objectè-je.

— Cyp ne sera pas du voyage pour la Roumanie ? s'étonne-t-elle.

— Putain, tu sais qu'ça m'gonfle quand t'essaies de t'mêler de c'qui faut pas, lui reprochè-je pour la dissuader de poursuivre sur ce terrain-là.

— Le prends pas comme ça, sourit-elle. Ça fait partie de sa vie et je déteste quand il me met à l'écart.

— Si tu veux connaître l'emploi du temps d'ton mec, va lui causer, m'agaçè-je de tout lui passer.

Elle n'a pas le temps de répliquer, car notre attention se dirige vers les phares d'un van qui vient éclairer l'entrée opposée de la venelle.

Le conducteur coupe le moteur et ses feux de route, alors que quatre mecs, un brun, un roux, un blond suivi d'une boule à Z... (ce qui pourrait être le début d'une mauvaise blague) sortent par l'issue de secours, en nous jetant du « bonsoir » tout en rigolant, parce que la meuf qui les accompagne a besoin d'aide pour marcher. La blonde, qui porte un pantalon slim et une sorte de bandeau qui dégage ses épaules et met en valeur sa poitrine, a l'air totalement défaite, le regard vitreux voire complètement vide et son téléphone n'arrête pas de sonner dans son sac.

— Oh ! leur clame Mira en jetant sa clope, furax.

Deux mecs s'arrêtent alors que les deux autres emmènent la nénette en direction du véhicule.

— Un problème ? s'étonne l'un des deux blancs-becs.

— Qu'est-ce qu'elle a ? insiste Mira tout en marchant d'un pas pressé, accentué par le claquement de ses talons aiguilles sur le bitume. Elle ondule des hanches jusqu'à s'arrêter devant le deuxième binôme.

— Elle est saoule, on la ramène chez elle, explique le grand rouquin, qui tient fermement sa proie par le bras, ignorant le téléphone qui continue son vacarme.

Mira attrape le visage de la meuf et l'étudie avec le peu de lumière qui nous éclaire.

— C'est quoi ton nom ? lui demande-t-elle.

La meuf émet un son incompréhensible et chancèle, alors que le conducteur du van s'approche lentement dans la pénombre des lieux.

— Elle va bien, insiste le rouquin.

Mira se tourne vers moi :

— Dji, tu vas intervenir, oui ou merde ? me demande-t-elle.

— J'suis pas flic, j'te signale, marmonnè-je.

— Je ne laisserai pas ces connards et leur GHB foutre la merde et Cyp serait de mon avis, réplique-t-elle en levant le menton de défi.

— Vous avez entendu la dame, lancè-je aux gars tout en jetant ma clope. Barrez-vous, mais la fille reste-là !

— T'es qui pour nous donner des ordres ? objecte le chauffeur, le ton acerbe.

Mira tire la blonde avec elle contre le mur pour se mettre à l'abri, alors que les mecs se regroupent pour me tenir tête.

— Celui qu'faut pas faire chier, si tu veux garder tes dents ! répliquè-je.

— T'es tout seul et on est cinq, connard ! commence à me toiser le blond.

— Sans déc, m'amusè-je, face à l'aplomb de cette meute de tocards.

Boule à Z, avec son regard haineux, sort son couteau à cran d'arrêt et fait un pas en avant pour sortir du rang sans pour autant attaquer. Comme je les ai prévenus qui fallait pas m'emmerder sous peine de perdre des dents, j'me dois de passer à l'acte.

— Range ton cure dent ! feulè-je, en avançant vers lui.

Il tente de m'asséner un coup de lame, alors je lui bloque le poignet d'une main et de l'autre lui décoche un direct du droit qui lui éclate la bouche et lui fêle deux dents. Il crie et lâche son arme pour tenir sa gueule en sang.

L'avantage avec ce genre de couilles-molles, c'est qu'ils sont persuadés que leur nombre est plus que suffisant pour impressionner et dissuader, ce qui dans la majorité des cas est peut-être vrai. Du coup, quand ils doivent aller au contact, ils s'y prennent comme des manches.

J'ai donc tout le temps du monde pour coller un crochet du gauche au rouquin ce qui lui ouvre la pommette et malmène ses molaires, j'enchaîne avec un coup de boule au brun ce qui lui pète le pif, je poursuis avec une clé d'bras au chauffeur pour l'immobiliser le temps de balancer un coup de pied dans l'bide du blond, et pour finir, je projette le chauffeur tête la première dans le mur.

La porte de secours s'ouvre, s'en suit des cris et des « mon dieu », les cinq tocards en profitent pour s'barrer.

— Anne ! s'écrie celui que les nanas qui viennent au Skull appellent Jaja, une tafiole assumée.

***** 

désolée : )

d'abord pour l'anachronisme, je sais que la chanson ne colle pas avec les 9 ans en arrière, mais je l'aime bien ;)

ensuite le chapitre est trop long pour un début d'histoire, si ça gêne je peux le couper en deux chap ^^

Les dévoyés 🔞 (bientôt en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant