🅟🅐🅡🅣🅘🅔 🅘🅘🅘

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"𝕽𝖊𝖘𝖕𝖊𝖈𝖙𝖊𝖗 𝖑'𝖆𝖚𝖙𝖗𝖊, 𝖈'𝖊𝖘𝖙 𝖑𝖊 𝖈𝖔𝖓𝖘𝖎𝖉é𝖗𝖊𝖗 𝖊𝖓 𝖙𝖆𝖓𝖙 𝖖𝖚'ê𝖙𝖗𝖊 𝖍𝖚𝖒𝖆𝖎𝖓 𝖊𝖙 𝖗𝖊𝖈𝖔𝖓𝖓𝖆î𝖙𝖗𝖊 𝖑𝖆 𝖘𝖔𝖚𝖋𝖋𝖗𝖆𝖓𝖈𝖊 𝖖𝖚'𝖔𝖓 𝖑𝖚𝖎 𝖎𝖓𝖋𝖑𝖎𝖌𝖊"
                        𝙼.𝙵 𝙷𝚒𝚛𝚒𝚐𝚘𝚢𝚎𝚗
Il m’avait dépossédé de tout. Mes rêves, mes aspirations, ma fierté… Tout était passé à la trappe du néo monstre des Andes. L’unique présent qu’il avait daigné m’offrir allait m’achever d’ici-là. Un véritable cadeau empoisonné. Un HPV qui détruisait lentement ma féminité et ma féminitude.
Les flashbacks affluèrent. Ma langue se délia et je tombai enfin le masque Oscar prêta une oreille attentive.
- Ce soir, tu as dans tes bras ton premier amour mais également une meurtrière, prononçai-je doucement. Tu m’as bien entendu Oscar. J’ai tué. Je l’ai tué. Et… J’ai adoré. J’ai adoré lui ôter la vie…  J’ai adoré le voir lutter. Lutter pour s’accrocher aux méandres de sa misérable vie. L’espace d’un instant, j’ai oublié ma peine. J’ai oublié les abus, les non-dits et les attouchements. Et je me suis sentie planer. Haut dans les Cieux ! Son visage décomposé par la peur- celle de trépasser-, son teint cadavérique, ses yeux révulsés… Ce tas d’immondices s’est éteint devant moi. Et ça m’a fait jouir. Je n’ai pas honte de te le confesser. Jamais, mon point G n’avait autant été stimulé. Je me suis découverte fontaine. A ce moment-là, j’étais puissante. Le tuer m’a fait me sentir Dieu. Oui, je reprends avec conviction, j’étais Dieu !
- Houéfa…
- Calme tes ardeurs Oscar. Je ne blasphème pas, assurai-je en ricanant.
Je mordillai son oreille et enfouit mon visage dans son cou. Une douleur lancinante s’installa dans mes poumons. Je réprimai un cri de douleur. Je me rapprochais du tunnel. Les ténèbres enveloppèrent le bureau. Le cri des charognards autour de nous ne m’effraya guère. Je m’évertuai à me concentrer sur Oscar. Je devais lui dire. Avant que je ne parte.
- Je t’aime tellement, confessai-je.
- Moi non plus Houéfa ! Pourquoi ? Pourquoi t’es-tu infligée tout ce mal ? Pourquoi n’as-tu pas pensée à moi ? Tu… Tu n’avais pas le droit de me faire ce sale coup ! Tu n’avais pas à nous faire ça ? As-tu pensé à ta mère ? Et Hakim ? Et moi ? Nous t’aimons tant !
- Ma mère… Mon frère… Toi… Si seulement, si seulement, fredonnai-je entre deux quintes de toux.
J’ignorai le gout de sang qui emplit ma bouche et ravalai le liquide rougeâtre. Je souris. Je m’efforçai de ne rien laisser transparaitre de mon agonie.
- On connait la chanson, compléta Oscar en me regardant, un sourire triste collé aux lèvres.
Nous rîmes de la cacophonie de nos voix. Autour de moi, l’ombre de la faucheuse se fit moins pesante. Les charognards se turent, me permettant de me plonger dans l’amande des yeux de mon ex. S’il était un brillant journaliste et moi un mannequin prometteur-avant ma déchéance brutale- nous n’avions certainement pas le timbre magnifique et doucereux de cette bonne vieille Edith. Cette chanson avait une valeur spéciale pour nous. Elle résumait parfaitement notre relation : de l’amour, de la fièvre et des déchirures. Des débris qui ne nous avaient pas empêchés de demeurer soudés et solidaires l’un envers l’autre. En dépit de ses fiançailles et de notre rupture, nous étions restés bons amis. Je l’avais aimé. Et ce moment passé en sa présence me faisait réaliser que je l’aimais encore. Même après le trépas, je continuerais toujours de l’aimer.
- Je n’ai jamais voulu le haïr… repris en fermant les yeux. Nous n’aurions jamais franchi ce cap s’il ne m’y avait pas obligé… L’identité de mon porc ne t’est pas inconnue. Tu le connais bien. Il est continuellement déifié et encensé par l’opinion publique. « Philanthrope, roi volontariste, voix du peuple… »  Lui, mange du thon au diner. Faim, galère et débrouillardise ne font pas partie de son lexique. Il a acquis une fortune colossale à force de micmacs et s’auto-proclame sauveur du peuple ! Il est affable, éloquent, un époux et un père exemplaire ! Un véritable héros national !
- Qui est-ce Fafa ? Qui est l’homme qui t’a souillée ?
- Je ne veux pas… Je ne peux pas le dire… Je n’arrive pas à prononcer son nom… Pas à voix haute…
Les chants lugubres des charognards reprirent. Mes oreilles sifflèrent. Mon thorax se comprima et j’eus l’envie de suffoquer. Je n’étais plus qu’étourdissements et nausées. Je me fis violence pour ne pas vomir. L’insécurité empoisonna mes pensées alors que je l’aperçus et le réentendis me parler. Je pouvais le sentir. Je pouvais l’imaginer assis sur le fauteuil dans le fond me scruter et se moquer de moi. De mes courbes. De mon gros front. De mes grosses incisives. De mon pigment beaucoup trop ténébreux. De mon physique peu commercial et par conséquent moins lucratif que celui des autres. A nouveau, je me remémorai l’enfer dans lequel j’avais vécue. Le souvenir des sévices que j’avais vécue me fut insupportable.
Tu n’es rien sans moi. Tu ne seras jamais rien sans moi.
Estime-toi heureuse ma petite. Ce n’est pas tous les jours qu’un Dieu de l’Olympe s’abaisse et s’offre un plaisir dans le cambouis.
Tu n’es pas douée. Tu es une ratée doublée d’une trainée. Pardon ? Ton intention n’a jamais été de me séduire ? Tu prétends n’avoir jamais voulu m’aguicher ? Va le répéter à Mère Teresa ! Avec tes minijupes, ton maquillage, tes pantalons, tes bas… Ne me fais pas croire que tu ne faisais pas exprès ! Tu n’es qu’une séductrice. Derrière tes airs de petite innocente, tu caches bien ton jeu. Tu n’es qu’une chaudasse ma petite Houéfa…
Non… Ne me regarde pas comme ça… Je ne suis pas un monstre. C’est de ta faute ! La faute à tes courbes et à ton sourire ! La faute à ta poitrine opulente ! Je ne suis qu’un homme ! Et la chair, c’est la chair ! Elle est faible ! Je ne suis qu’un prédateur ! Et tu sais comment ça marche. Nous… Nous avons ce besoin irrépressible de chasser ! On ne va pas se prendre la tête pour ça, voyons !
- Houéfa ? Houéfa ? Tu m’entends ? fit gravement Oscar en claquant des doigts sous mon regard.
Je n’y fis pas attention. C’était tout bonnement impossible. A ce moment-là, je n’avais d’yeux que pour le monstre qui se rapprochait de moi…
- Il est là ! Il est là ! Il m’attend ! Il me regarde ! Et il murmure que je suis à lui ! Que je n’y arriverai jamais sans lui ! Que je suis moche et que je suis certainement le pire mannequin qui soit !  C’est ma faute ! Tout est ma faute !
-  Calme-toi ! Ecoute-moi ! Je suis là ! Je te vois ! Je suis là ! Il n’est pas là !
- Non… Il est là, m’écriai-je en le cherchant du regard. Là, derrière toi…
Je le cherchai du regard. Etrangement, il avait disparu. Dans le bureau, il n’y avait plus aucune trace de lui. Il s’était volatilisé… On aurait dit qu’il n’avait jamais existé et que j’avais tout inventé. Vérité ? Confusion ? Hallucination ?  Je ne savais plus où donner de la tête.
- Non ma puce, il n’est pas là. Il ne reviendra pas te hanter ! Il… Il est mort ! m’informa-t-il calmement en prenant mon visage. T-Tu l’as tué…
- Oui… Je l’ai tué… Je l’ai tué ! Je l’ai tué ! répétai-je en éclatant de rires.
Je pris une grande bouffée d’air et la vie me sembla nettement moins sombre. Euphorique. Psychédélique. On aurait cru que j’avais combinée des antidépresseurs, de la méthamphétamine et de la cocaïne. Un mélange toxique mais tellement jouissif. Je l’avais tué. J’avais tué mon violeur et mon harceleur. J’avais enfin repris le contrôle sur mon destin.
- Hôtel Le Cabanon. Chambre 22. Causes du décès : douze coups de couteaux. Six dans l’abdomen. Trois autres dans l’entrejambe et les trois derniers dans sa cervelle. Oui, ça fait très gore ! Je le sais. Mais il ne m’a pas laissé le choix. Comme je te l’ai dit, rien de cela n’était supposé arriver…
- C-comment tu… Comment ça s’est produit ? Comment l’occasion s’est-elle présentée ? m’interrogea Oscar, troublé. Comment se fait-il que tu sois sortie de la chambre sans le moindre soupçon ?
- Eh bien, ça n’a pas été très compliqué. Je me suis changée et me suis débarrassée de mes vêtements. Tu comprendras que je ne pouvais ressortir de la chambre, tachée du sang de cette ordure comme je l’étais. J’ai berné avec brio la réceptionniste. Un beau billet violet a suffi à lui faire retourner sa veste. Et puis, ce n’est pas comme si nous ne connaissions pas ! Depuis des mois, il m’obligeait à fréquenter Le Cabanon. Forcément, ces sessions de torture ont permis un certain rapprochement avec les membres du staff de l’hôtel.  Elle ne s’est doutée de rien. J’ai expressément demandé qu’il ne soit pas dérangé après avoir payé de sa carte de crédit trois jours supplémentaires. Et j’ai foi que mes consignes seront suivies au pied de la lettre. Seule l’odeur de sa dépouille dégoutante alertera les gens sur sa condition. C’était un bonus additionnel à ma revanche, crachai-je. Ça et les quelques coups que j’ai perpétrés à son zorba*, ajoutai-je en éclatant de rires. Tu aurais dû voir la quantité impressionnante de sang qu’il y avait ! Ça giclait dans tous les sens ! Une vraie merveille ! je m’exclamai en tapant dans mes mains.
Oscar me regarda et baissa la tête. Le pauvre. Sans doute, devait-il s’interroger sur mon état mental. J’avais réussi à le rendre paumé. Comme je l’étais moi-même. Il déglutit légèrement et souffla avant de me regarder à nouveau.
- D’accord… déclara-t-il avec détachement.  Et qu’as-tu fait ensuite ? Quelqu’un sait que tu es ici ?
- Non… Personne ne se doute de ce qu’il se passe. Après que je me sois rendue justice, j’ai filé à la plage enterrer l’arme de mon méfait-un des vieux poignards de mon père- dans un coin désert. Ensuite, je suis passée à la maison m’administrer ma dose de poison. Je m’en suis procuré grâce à mes relations au marché noir, j’expliquai en fermant les yeux. Ça m’a couté une petite fortune mais je pense que ça vaut son pesant d’or. Je me suis piquée dans les veines et ai pris une douche. Puis, je suis venue directement ici. En sortant, j’ai vue maman et Hakim. Ils plaisantaient. Je les ai embrassés et leur ai répété que je les aimais. Ils m’ont répondu du bout des lèvres. Les pauvres… Ils ne se doutent pas que je ne reviendrai plus jamais. J’ai conscience qu’ils me pleureront amèrement…
Mon cœur se fissura. A la seule pensée du tort que j’allais causer à ma famille, je me détestai. Ils ne méritaient pas de souffrir. Ils avaient tant donné pour que j’excelle dans la vie. Et moi, je les avais déçus. J’allais leur ôter le peu de bonheur qu’ils avaient obtenu au cours de ces années. J’allais les trainer dans la boue avec moi. Dès lors que l’opinion publique découvrirait que j’avais tué le manager le plus plébiscité du pays, ç’en serait fini de moi. Et ma famille serait la grande perdante de cette guerre.
- Dis-leur que je les aime…
Mon rythme cardiaque s’accélérait au fur et à mesure que je m’exprimais. Ma bouche devenait de plus en plus pâteuse et je devais fournir un effort surhumain pour prononcer les mots. Il n’y avait pas à dire : le poison faisait bel et bien effet. Pourtant, je ne me résolus pas à garder le silence.
- Dis-leur que je ne leur en veux pas ! Ce n’était pas leur faute s’ils n’ont pas su voir la détresse derrière mon sourire en plastique et mes silences. C’était celle de ce pervers narcissique ! Je prie qu’ils ne m’en veuillent pas de leur infliger toute cette peine…
- Houéfa ? Houéfa ! Pourquoi trembles-tu autant ? Ton cœur ! Il bat de plus en plus rapidement ! s’écria Oscar, alarmé après avoir écouté les battements du muscle creux dans ma poitrine. Mon amour ! Mon amour ! Non ! Non ! Ce n’est pas possible ! Ce n’est pas vrai !

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Salut les Jayers ! Me revoilà !
Alors, quel est votre verdict par rapport à ce chapitre ? Souhaiteriez-vous plus de chapitres longs à l’avenir ou les chapitres courts vous conviennent mieux ?
On retrouve Houéfa et Oscar et leur discussion se poursuit toujours dans cette atmosphère macabre et triste. Comprenez-vous l’histoire de la jeune fille ? Qu’auriez-vous fait à sa place ? Que feriez-vous si vous étiez Oscar ?
Qu’imaginez-vous pour la suite ? Est-ce que Houéfa mourra ?
Votez pour ce chapitre, lâchez-vous dans les commentaires et partagez sans modérations !

Soliloque d'une MeurtrièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant