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 « On est toujours le monstre de quelqu'un »                                                               Anonyme

Il ne devait pas être plus de vingt heures lorsque je m'extirpai du taxi. Le ciel était noir comme dans la gueule du loup. L'astre lunaire avait fait son apparition depuis belle lurette. Ses noircissures narguèrent mes pupilles dilatées. Je l'oubliai et décidai d'entamer mon incursion dans le building qui me faisait face. Rapidement, je me heurtai à un adversaire de taille : la cage des escaliers. Fautes de moyens, les propriétaires de l'immeuble n'avaient pas fait installer d'ascenseurs. Et pour le voir, je devais me farcir une longue distance.

Nonobstant les complaintes de ma chair endolorie, je posai mes pieds sur la première marche de l'escalier qui en comptait une trentaine environ. Une douleur vive se propagea dans mon jardin intime ; m'arrachant un cri de douleur. J'agonisais. Venir le voir dans mon état relevait du suicide. J'en avais conscience. Pourtant, j'avais pris le risque. J'avais sauté le pas. Il devait m'entendre. Il devait me comprendre. Il était ma dernière chance. C'était maintenant ou jamais.

Je repris mon parcours de combattant et parvins à la porte d'entrée malgré les déchirures dont pâtit ma matrice au cours de l'exercice périlleux. La poignée céda sous mon poids et je pus pénétrer l'antre journalistique. Une odeur désagréable vint taquiner mes narines alors que mes yeux cherchèrent mon ami. Un mélange de transpiration et de poussière qui agaça mon odorat. Je ne pus réprimer un éternuement, grillant ma couverture et me faisant repérer.

Il ne m'attendait pas. Ses traits poupins devinrent surprise et ses lèvres rosacées formèrent un « oh » d'étonnement alors qu'il se levait de sa chaise. Cependant, à sa surprise succéda rapidement l'émerveillement. Un grand sourire orna son visage viril tandis qu'il avançait et me prenait dans ses bras avant de plaquer sur mes joues deux bises sonores. Je lui rendis son sourire et m'assis à la place qu'il m'indiqua.

- Excuse-moi, je ne m'attendais pas à ta venue et je suis en train de bosser sur un gros dossier !

Un regard à la dérobée porté sur l'ensemble de la pièce affirma ses dires. Le désordre le plus total y régnait. Des feuilles de papier froissé avaient été jetées dans un ensemble de corbeilles renversées. Sur son bureau traînaient plusieurs stylos et des crayons. Ses lunettes avaient négligemment été posées sur le clavier de son ordinateur portable.

- Voudrais-tu boire quelque chose ? De l'eau ? Du jus de fruits ?

- Non, ne te fais pas cette peine. Je ne suis pas venue m'éterniser.

- Houéfa qui me fait une visite éclair ? C'est assez inhabituel ! se moqua-t-il en s'affalant dans le cuir de son fauteuil. Comment vas-tu ? Et Hakim ? Et maman ? enchaina-t-il en croisant ses bras musculeux.

- Ils se portent comme un charme, répondis-je timidement.

Leurs images vinrent se greffer à ma mémoire. Je pus apercevoir les mains maternelles durcies et abimées par le savon de lessive à l'œuvre. L'odeur du détergent qu'elle utilisait lors de sa noble besogne de lavandière revint chatouiller mes narines. Je revis Hakim mon grand-frère, brillant élève arraché à l'école et reconverti en mécano du quartier, réparer les vieilles carcasses de notre ruelle. Une grande tristesse me transperça l'âme tandis qu'une colère sourde gronda au fond de mon cœur. J'allais les abandonner... Je n'allais pas pouvoir tenir la promesse que je leur avais faite : je n'allais jamais être cette femme influente qu'ils imaginaient. Jamais, je ne serais heureuse.

- D'accord, reprit mon interlocuteur, m'arrachant à mes pensées et remords. Et toi ? redemanda-t-il en se penchant vers moi. Comment vas-tu Houéfa ?

Sa question me prit de court. L'espace d'un instant, je fus tentée par l'idée de lui mentir. Instantanément, ce masque d'hypocrisie et de mensonge que je revêtais aisément depuis ces six mois derniers me parut moins laid. Je voulus m'adonner à mon art : jouer l'enfant modèle dont l'existence n'était que perfection. Jouer la jeune fille chanceuse et reconnaissante envers l'univers pour la fleur qu'il lui avait faite. Cependant, je me rendis vite à l'évidence. J'étais arrivée au bout. J'étais en sang et à cran. Je n'allais plus bien. Et ces billes étaient les seules qui parvenaient à me percer à jour. Lui mentir n'aurait été que temps perdu. Or, le temps était une denrée que je ne pouvais me permettre de gaspiller.

- Je vais mal... débutai-je en plongeant dans son regard.

- Que t'arrive-t-il ? Qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta-t-il.

- Chut, fis-je en affichant un sourire que je voulus rassurant. Ce soir, tu n'es pas journaliste, d'accord ? Ecoute-moi et ne me pose pas de questions. Contente-toi d'écouter la moribonde et de garder précieusement ses confessions.

- Houéfa, tu m'inquiètes ! Que t'arrive-t-il ? Pourquoi tiens-tu ce discours ? Moribonde, toi ? Je ne comprends pas ce que tu racontes !

Je le regardai et opinai. S'il m'était arrivé de douter de ma décision, il n'en était plus rien. J'avais indéniablement fait le bon choix. Oscar était le bon. D'aussi loin que je pouvais m'en souvenir, il avait toujours été aussi prévenant. Il ne supportait pas de voir souffrir son entourage et n'hésitait pas à se plier en quatre pour les aider. C'était sans surprise qu'il avait rejoint la ligue des activistes après qu'il eut commencé une brillante carrière journalistique. C'était mon ultime recours. Lui, ferait ce que je n'avais eu le courage de faire. Lui, ne se prêterait pas à cette œuvre insidieuse. Il ne se tairait pas et ne subirait pas la torture en silence. Oui, lui ferait éclater la vérité. La vérité horrible-mais non moins vraie- de la meurtrière en face de lui.

- Ce soir, je suis venue me confesser. Avant toutes choses, il faut que tu sois mis au courant d'une information capitale. Dans vingt minutes, je précisai en fixant l'horloge murale derrière lui, je rejoindrai le nombre faramineux des femmes mortes dans la fleur de l'âge. Je vais mourir Oscar...

****

Hello tout le monde !

On dit quoi par ici ? Et ce premier chapitre ? Comment l'avez-vous trouvé ?

Que pensez-vous de Houéfa et d'Oscar ? Et cette annonce qu'elle a fait en fin de chapitre ?

Que feriez-vous si vous étiez à la place d'Oscar ?

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Big up à ma muse mode_by_mo (sur Instagram) qui prête ses traits au personnage de Houéfa ! C'est elle la ravissantissime jeune fille en photo de fond ! 

Prenez soin de vous et à bientôt ! 

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