Le lac maudit

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/!\ OS traitant de thématiques difficiles /!\
Si vous êtes sensible à certains sujets, checkez les TW dans la description de l'histoire (je ne les mentionne pas explicitement ici pour ne pas trop spoiler !)

Comme le fait insomniz dans Les Parties infimes (que je vous recommande si vous ne la lisez pas déjà !), je vous mets quelques suggestions de musiques pour l'ambiance : Genie in a bottle de Rory Webley & Le Lac de Vendredi sur mer :)
Bonne lecture !

☽  ☼  ☾

L'eau était glaciale et la nuit sans étoile. Jérémy ne sentait déjà presque plus ses doigts. Il expira lentement, avec difficulté : sa cage thoracique le brûlait, mais ce n'était qu'une question de temps avant qu'il n'éteigne le feu qui le dévorait de l'intérieur.

Yeux tournés vers le ciel d'encre, paumes ouvertes vers l'autre monde, corps étalé en étoile coulant lentement vers le fond. Habits trempés, lourds, si lourds. Surtout les chaussures, qui entraînaient les jambes et le reste des membres avec lui.

Ses cheveux flottaient autour de sa tête comme une auréole de cendres. Ses boucles s'étaient défaites au contact de l'eau et oscillaient faiblement, frôlant sa nuque quand le courant les poussait un peu plus fort.

Il avait claqué des dents et frissonné au début, mais les tremblements avaient fini par cesser. Le froid avait réussi à anesthésier ses muscles et ses pensées — enfin. Il se dit alors que, même s'il l'avait voulu, il n'aurait plus été en mesure de bouger. Maintenant plus que jamais, il était spectateur de sa propre vie, partant lentement à la dérive, coulant dans un liquide amniotique sordide.

Dommage, il aurait aimé voir les étoiles.



– Je me souvenais pas qu'il était aussi bruyant, ce spot de merde.

Julien fumait une cigarette pour faire passer le temps. Cela faisait bien un quart d'heure désormais que les deux amis attendaient que la horde d'enfants en face d'eux daigne bouger du cadre.

– Ça fait chier, la lumière est vraiment cool et ça rendait bien avec le lac gelé... maugréa Jérémy, se dandinant d'un pied à l'autre pour se réchauffer.

– Tu penses que si on dit aux chiards d'aller courir sur la glace on peut être poursuivi pour homicide involontaire ? Parce que s'ils continuent de brailler comme ça, c'est moi qui vais finir par me foutre en bas.

Jérémy tressaillit. Sautilla d'un pied à l'autre un peu plus rapidement.

– C'est une putain de blague, lâcha tout à coup M. Connard.

– Quoi ?

– Regarde ce qui nous vient dessus.

Des chiens de traîneau, sérieusement ? Avec des enfants dedans, qui hurlaient comme s'ils vivaient à la fois le meilleur et le pire moment de leur vie. Et les adultes qui leur couraient derrière en criant encore plus fort, évidemment.

– Ils doivent venir de la station de la Chèvrerie, y'a des sorties en traîneaux qui sont organisées—

– Ouais mais laisse tomber, les chiens ils ont des grelots mec...

Julien était las et agacé. Ça se comprenait. Même Jérémy commençait à atteindre les limites de sa patience. Il n'eut pas le temps d'argumenter pour rester encore un peu que M. Connard remballait déjà le matériel. Il soupira : encore des heures de tournage de perdues.

Recueil d'OS JDay & M. ConnardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant