Dernier Soupir

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1, 2, 3, 4 puis 5 jusqu'à 34. Tous, ils étaient tous sortis... tous les otages étaient sains et saufs. Soudain, une explosion retentit alors que les secours soignaient les rescapés de cette maudite prise d'otages...
Ils avaient tous été attrapés 1 par 1 suite à de nombreuses tentatives par les agents de police... sauf 1, le dernier... le leader... il y était toujours. Ce même leader qui a fait la une des journaux après avoir braqué plusieurs banques et qui s'en est toujours sorti indemne. Celui qui clame haut et fort qu'il n'a jamais fait de mal à quelqu'un. Celui qui aime jouer avec les agents de police... sans pour autant semer le mal autour de lui... Aujourd'hui... c'était sa dernière banque... il avait promis... de ne faire de mal à personne, c'est pour ça qu'il a dû relâcher les 34 otages et a obligé ses compagnons d'arme à se rendre lorsque la situation est devenue trop critique. Mais...où est-il? À travers toutes ses fumées rouges et noires et les flammes qui dansent de l'intérieur de la bâtisse... à travers les bruits assourdissants de la foule effrayée et des sirènes... je les entends, ses amis, qui ont assisté à la scène, ceux qui hurlent son prénom, lui demandant de sortir en espérant qu'il soit encore en vie. Puis, comme un silence, sourd et oppressant. Tout le monde est envahi d'un grand effroi, que ce soit la foule qui le voyait comme un héros, les braqueurs, qui y voyaient un ami, un frère... les policiers, les gendarmes, qui y voyaient un ennemi... tout le monde retient son souffle. Malgré tout, nous ne pouvions pas y croire, pas lui, ce n'était pas possible, pas cet homme. Même la banque était silencieuse après les dernières explosions. Une, deux, trois minutes passèrent et toujours rien. Seul le bip régulier des machines troublait le silence. Et puis, il eut un retentissement, presque intelligible. Ça bougeait. Là-bas, tous les yeux étaient braqués sur cette porte en métal gris et froid qui s'ouvrait lentement et en grinçant. Une silhouette diforme s'approcha lentement et commença à descendre les marches du bâtiment. Les pieds claquaient sur le sol poussiéreux et la tête baissée, il s'arrêta au milieu de la distance qui nous séparait, la banque et moi.
Il ne bougeait plus, tout était immobile, même le temps retenait son souffle et attendait la suite. Les gardes armés pointèrent tous leur viseur sur lui en lui ordonnant de ne pas faire un mouvement de plus. Il se contenta de lever la tête et de sourire. Oui, c'était bien lui, toujours vivant et...souriant. Sa marque de fabrique, un grand et magnifique sourire blanc. C'est cet homme, celui qui fait battre mon cœur malgré nos professions opposées. Lui chef d'un gang et moi... inspectrice de la 1ere brigade de la capitale. Il tourna lentement la tête, comme pour chercher un point de repère, oui, il était totalement désorienté? Était-il dehors? À l'intérieur? Pourquoi était-ce si silencieux? Comment allaient ses amis? Ses amis... brusquement,  il fouilla la foule de ses yeux verts et perçants, les cherchant du regard avant de se calmer immédiatement lorsqu'il les aperçut, quelques mètres plus loin, à l'abri du souffle des explosions et des projections. Il sourit de nouveau. Et leva sa main droite, celle qui lâcha ensuite un ruban rouge. Il venait tout juste de marquer la banque de son sceau. De sa marque. De ce tissus rouge maculé de cendre noires et racornit par les flammes.
Sa deuxième main, elle, était collée à son abdomen, et, malgré les hurlements des sentinelles, qu'il ne semblait pas entendre, il refusa de la lever comme l'autre. Il prit la parole. Tout le monde écoutait. Ce sera sa dernière apparition publique. Sa toute dernière, il le jura. Il s'excusa d'avoir fait peur aux otages, de leur avoir fait vivre ça. Il s'excusa au près de ses compagnons de voyage, les libéra de leurs fonctions tout en gardant le sourire malgré leurs cris déchirants. Puis, il leur fit un discours personnel, leur rappelant des petits détails à savoir sur chacun pour qu'ils puissent continuer à prendre soin d'eux sans lui, pour qu'ils puissent continuer à former une famille. Il enchaîna pour son petit frère, son vrai cette fois-ci, celui de sang qui était là, debout à côté de moi. Pleurant en silence pour ne rien rater du discours de son modèle. Et sa mère, tremblante qui serrait dans ses bras la petite dernière de la famille. Ses derniers mots furent pour moi, ou plus précisément pour lui, notre enfant. Même si l'on n'était pas d'accord sur le fait d'en avoir un, même si l'on s'était disputés sur ce sujet... il l'aime, et n'arrêtera jamais de l'aimer, tout comme moi, la femme qu'il voulait demander en mariage après tout ça... raté, il n'a jamais eu le sens du timing. Et ça le faisait rire. Lui. Celui qui avait un morceau de métal planté dans le ventre. Celui qui saignait abondamment et qui savait que c'était des adieux, et non un au revoir.
Ashton, un mot, le nom qu'il voulait donner à notre enfant fut son dernier. C'est ainsi que le plus grand des révolutionnaires s'éteignit. Debout, immobile, le regard fixé sur l'horizon, avec une légère larme qui coulait sur sa joue.
Un lever de soleil éclaira son beau visage maculé noir. Et le dernier soupir de Christopher s'envola.

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