Yakuza P.1

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Sept ans que je suis détective privé et en sept ans je n'ai jamais autant regretté d'aller à la pêche aux informations. J'ai chaud, je suis mal à l'aise, j'arrive à peine à me mouvoir correctement et pour couronner le tout, j'attire les vieux pervers qui m'empêchent d'effectuer mon travail.

Une simple soirée casino à laquelle ma cible était invitée : voilà comment mon informateur m'avait vendu cette mission. Or il semblerait que ce soit plus : une infiltration sous couverture dans une soirée casino organisée par ma cible. Même si c'est l'occasion rêvée d'obtenir des informations que je pourrais revendre à prix d'or, je préfèrerais mille fois plus être dans mon lit à lire un bon bouquin avec une tasse de thé et mon chat sur les cuisses.

Malheureusement ce n'est pas en restant cloitré dans mon appartement que je vais pouvoir payer le loyer et toutes les factures qui en découlent. Je soupire de lassitude et éteint le mégot rougeoyant qui était encore une cigarette industrielle il y a à peine cinq minutes. Je me lève et lisse le tissu de ma jupe du plat de la main – ma pause d'un quart d'heure est terminée, il va falloir retourner jouer le parfait petit espion.

Ma perruque me gratte un peu la nuque, je n'ai jamais eu les cheveux longs alors la sensation ne m'est pas encore familière. Je vérifie mon visage ainsi que mon maquillage – j'ai dû raser ma barbe ce matin en toute urgence et j'ai camouflé les éventuelles traces avec du fond de teint – puis vérifie que le micro caché dans une de mes boucles d'oreille est toujours en place. Tout me semble bon, je retourne dans la bâtisse en passant par l'entrée de service.

Je manque de trébucher à cause de mes talons mais me rattrape au dernier moment. Moi qui me vantais de savoir plutôt bien marcher avec une paire d'escarpin, je me rends maintenant compte que mes huit pauvres centimètres n'ont rien à voir avec les douze que je porte actuellement. Je ne sais pas comment font les autres serveuses pour garder leur grâce naturelle en marchant avec ça car même si je m'en sors correctement, j'ai bien failli renverser mon plateau à de nombreuses reprises.

Je soupire une nouvelle fois : vivement que cette maudite soirée se termine.

- Tu as fini ta pause ? Me demande une de mes collègues.

- Oui, tu peux y aller.

- Super, je m'occupe d'une dernière table et j'y vais !

- Je peux le faire si tu veux ?

- Vraiment ? Ça m'arrangerait, je dois aller aux toilettes depuis plus d'une heure.

J'acquiesce avec un sourire. La pauvre, dire que même pour les besoins primaires elle est obligée d'attendre une pause qui n'arrive que toutes les quatre heures... Ça, je ne manquerai pas de l'inclure dans mon rapport ! En plus, avec un peu de chance, cette information fera le bonheur d'un des concurrent direct du casino. Ces vautours sont toujours à la recherche d'un scandale pour faire tomber les autres.

J'attrape mon plateau et elle m'indique la table à débarrasser. A la table voisine, six personnes sont assises et semblent être en pleine discussion houleuse. Pour mon plus grand bonheur, je remarque que ma cible fait partie de ce petit groupe. Je m'approche d'eux discrètement, faisant mine de débarrasser en prenant le plus de temps possible, essayant d'entendre quelques bribes de leur conversation à travers la musique du concert qui se joue un peu plus loin sur la scène :

- Spandam, je te dis simplement ce que j'en pense, pas besoin de t'énerver.

- Je ne m'énerve pas, Khalifa ! Tu n'as aucune idée de la valeur du marché que je veux lui proposer, je ne vois même pas pourquoi tu te permets de me donner ton avis.

Recueil d'OS KidLawOù les histoires vivent. Découvrez maintenant