Comme c'est étrange.

838 64 42
                                    


Il fait beau aujourd'hui. Le soleil me fait mal aux yeux, mais sa chaleur est agréable. En tout cas, je crois que c'est le soleil, sinon quoi d'autre me donnerait cette sensation de chaleur et ce réconfort agréable ?

Si, enfaite je sais. La question n'est pas « quoi », mais « qui ». Il y a bien quelqu'un qui peut me fournir ces ressentis. Haha, il en est même aveugle ! Terriblement aveugle qui plus est.

Est-ce démotivant ? Non. Il serait peut-être même dégouté qu'un être tel que moi lui dévoue des sentiments comme ceux-ci. Un être teinté par les Abysses, dérangé. Ce ne sera jamais réciproque. Mais ce n'est pas grave, j'ai le privilège de sa présence et cela me suffit.

C'est bizarre, quand même. Je me sens extrêmement léger. Je n'avais encore jamais ressenti cela. Bon, il n'y a pas non plus de quoi s'inquiéter : la vie se forme de nouvelles choses. Si je devais m'inquiéter à m'en rendre malade pour chaque nouvelle sensation, ce serait hilarant ! Ou peut-être pas.

Ah, qui sait. La vie est une chose bizarre, donc rien d'étonnant.

Je n'arrive pas à ouvrir les yeux. J'ai beau ressentir de la lumière par-delà mes paupières, mes muscles oculaires refusent de m'écouter. Tout ça est étrange. C'est surement un rêve ?

Non, je ne pense pas. Ou alors, ce serait bien la première fois que j'en suis capable depuis ce cher petit séjour.

Ah, j'ai réussi. Mes yeux sont ouverts, mais je ne comprends pas : il n'y a pas de soleil. A la place, le ciel est d'un blanc immaculé comme je n'en ai jamais vu. C'est de plus en plus étrange, mais au moins mes muscles m'obéissent. Mais n'importe où je regarde, tout est blanc. D'un blanc maladif.

Il semblerait que je me sois levé, d'ailleurs. Haha ! je vais enfin pouvoir repartir et rejoindre Monsieur Zhongli pour lui raconter mes aventures avec le Voyageur. Pourtant, je jurerai que Monsieur Zhongli était avec nous...

Cela doit être mon esprit et mes hallucinations : Monsieur Zhongli a beau être bon, je ne vois pas comment il pourrait accepter de voyager avec moi. Mais je n'aime pas ça : cela fait plusieurs minutes que je marche, et pourtant tout reste aussi blanc.

En tout cas, je crois que cela fait quelques minutes : pour une quelconque raison, je n'arrive pas à avoir une notion de temps. Enfin bon, je n'ai qu'à rebrousser chemin : j'ai promis à Monsieur Zhongli de revenir le voir au plus vite, et je souhaite respecter au moins cet engagement.

Hehe, ça à l'air de fonctionner ! Mon intelligence se prouve belle et bien présente : je perçois quelque chose, au fond de ce chemin.

Je vais courir : ce ressenti ne me plait pas, tout à l'air trop paisible. Je veux partir d'ici. Une partie de mon esprit me susurre des paroles, et essaie de me faire croire que je suis de retour dans cet endroit. J'ai du mal à respirer, et ma vision se brouille. Je dois partir. Je... je dois sortir d'ici. Partir. Je dois partir. Cours. Cours plus vite, Ajax. Cours avant qu'ils ne te rattrapent. Grouille-toi, ils sont derrières. Ils... ils sont derrières... Ils vont m'attraper. MERDE MAIS DEPÊCHES-TOI DE T'ENFU-

Oh.

Je suis enfin sorti d'ici. Mais dehors, il pleut.

Comme c'est étrange, il ne pleut que rarement sur les terres de Liyue. Où est le Voyageur ?

Le voilà ! Je ne comprends pas, il ne semble pas me prêter attention : je pensais pourtant avoir crié son nom.

Le Voyageur... Pourquoi le Voyageur pleure-t-il ? Des larmes coulent de ses yeux, même s'il est silencieux. Son expression semble des plus sombres. Il serre et desserre des poings. Il tremble énormément, aussi. Son animal de compagnie a, elle aussi, un comportement absurde : elle ne daigne pas même flotter. Elle est affalée au sol, et des gémissements de tristesse s'échappent de sa gorge. Qu'est-ce qu'il se passe ?

A sa droite, dos à eux, je vois une masse foncée. Oh, il a peut-être tué un Hilichurl, et son animal de compagnie s'est retrouvée blessée.

Pourtant, je jurerais que je perçois le dos de la veste de Monsieur Zhongli. La panique me prend. Elle monte doucement et s'installe dans ce qui semble être mon cœur, si tant est que j'en possède un.

Sans que je ne m'en rende compte, je me suis retrouvé à faire face au dos de l'homme. Est-ce qu'il va bien ?

Il ne me répond pas. Peut-être est-il tant en souffrance qu'il ne m'entend pas, ou ne peut pas me parler ? Ou peut-être qu'il ne veut pas. Ça ne me dérange pas, mais s'il-vous-plaît Monsieur Zhongli, montrez-moi que vous allez bien. Mais je ne comprends pas : il tremble énormément, et pourtant il garde son équilibre. Maintenant que je regarde bien, il y a une paire de jambes qui dépasse de sa carrure. Est-ce que cette personne est blessée dans ce cas ?

C'est tout de même drôle, il a les mêmes bas de pantalon que moi. Les mêmes chaussures aussi, d'ailleurs.

Oh. Maintenant que je vois, on dirait vraiment que c'est moi. Oh non, je crois comprendre. C'est surement une de ses fleurs qui imitent ce qu'elles voient : elle a dû m'imiter.

Mais c'est étrange : je ne savais pas que ces fleurs étaient capables de créer du sang, ou d'imiter à la perfection des yeux vides de vie. Monsieur Zhongli a l'air détruis. Je ne comprends pas, je suis devant lui pourtant. Pourquoi ne me porte-t-il pas attention ?

Ah, les larmes qui coulent à flot le long de ses joues doivent lui bloquer la vue. Ses hurlements incompréhensibles font peut-être aussi qu'il ne m'entend pas.

Non, enfaite ce n'est pas incompréhensible. Il crie un nom, trop brouillé pour moi pour l'entendre même si ce mot me paraît si familier. Tellement familier, que si quelqu'un m'appelait ainsi, je me reconnaîtrais à coup sûr.

Monsieur Zhongli est un peu bête, des fois : il s'apitoie sur un faux corps, et ses genoux trempent dans une mare rouge qui ne cesse de s'étendre. Au fait, si il croit que c'est moi, pourquoi est-il aussi bouleversé ?

Non, il ne m'aime pas. Haha, c'est tout bonnement impossible. Il pense peut-être qu'il se retrouvera à la rue. Même si ce corps était moi, il hériterait de toutes mes possessions, car à mon point de vue, rien ne vaudra jamais la valeur que Monsieur Zhongli a à mes yeux. Mais je commence à m'inquiéter : cela doit faire maintenant une trentaine de minutes que Monsieur Zhongli reste avachi ici, à se lamenter. Ah, c'est étrange : je viens de me pencher pour essuyer ses larmes, mais on dirait que mes doigts ont traversé cette larme. Il n'a pas l'air de m'avoir ressenti, aussi. Il continue d'hurler. Le Voyageur vient aussi de s'effondrer au sol, au côté de Paimon. Monsieur Zhongli commence même à supplier, à prier pour retourner dans le passé. Il prie aussi pour que le corps se remette à fonctionner. Il prie les Archons. Quelle ironie. Il prend le corps dans ses bras, et le Voyageur n'ose pas même s'approcher.

Ah.

Je crois que je comprends.

Peut-être bien que mes sentiments étaient réciproques.

Comme c'est étrange  {Tartaglia x Zhongli }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant