"As-tu déjà dansé avec la mort petit ?"
Ce sont les premiers mots prononcés par le vieil homme depuis qu'il s'était assis autour de son feu.
"Non monsieur. Répondit le jeune homme. A vrai dire , hésita t'il, je n'ai jamais dansé tout court.
— Que fait tu là alors ? Au beau milieu de cette forêt à l'heure où elle appartient aux loups ?"
Un hurlement se fit entendre au loin porté par le vent qui venait de se lever. Le feu crépita doucement dans son foyer de fortune.
"La mort est une excellente danseuse car ses partenaires innombrables, alors dit moi petit, si tu ne sais même pas danser, pourquoi être ici ?" Demanda le vieil homme.
Le jeune homme réfléchissait, c'est vrai ça, que fait il ici déjà ? Pourquoi être seul au milieu de la nuit devant un feu au beau milieu d'une forêt remplie de dangers tous plus mortels les uns que les autres ? Il se souvenait avoir trouvé refuge dans cette clairière, avoir creusé le trou qui contiendrait son feu, cherché du petit bois, et enfin réussir à l'allumer malgré le froid engourdissant progressivement ses membres. Pourquoi tout cela déjà ? La réponse fut toute trouvée :
"Je fuis monsieur.
— Que peux-tu donc fuir ? N'est tu pas plein de fougue et de vigueur comme tout ceux de ton âge ? Le monde n'est-il pas sensé t'appartenir ?" Questionna le vieil homme.
Il s'attarda sur cet étrange vieillard. L'ensemble de son corps était camouflé par un cape de voyage noire. Sa tête, dissimulé en grand partie par la capuche de sa cape, ne laissait entre-apercevoir qu'un visage émacié lorsque le vent se montrait taquin. Seul ses mains étaient véritablement visibles, elles étaient d'une pâleur surnaturelle. Ses doigts, extrêmement fins, semblables à des branchages noueux et sa peau paraissait aussi fine qu'un très vieux parchemin menaçant de tomber en poussière.
"Le monde appartient aux autres, je n'ai ma place nulle part." Soupira l'adolescent.
C'est vrai, que pouvait-il attendre de la vie, lui qui avait été vendu contre une miche de pain la première fois, puis ensuite échangé comme une vulgaire bête de somme.
"N'as tu pas d'amour propre, de valeurs , d'idées à défendre qui valent la peine de se battre ? Rétorqua l'ancien.
— Je ne pense pas monsieur, sinon je n'aurais pas été vendu par mes propres parents puis échangé comme une bête. Si j'avais une quelconque valeur, quelqu'un l'aurait vu et m'aurait gardé." Répondit-il le regard vide.
Le silence se fit, seulement perturbé par le chuchotement du vent dans le feuillage de la foret. La bûche qui servait de combustible craquait de temps à autre lorsque le feu s'attaquait à une partie moins sèche de la bûche.
"Sait tu ce qu'est un diamant mon enfant ?" Questionna soudainement le vieil homme.
L'adolescent hésita un long moment en fixant le feu.
"C'est une pierre précieuse je crois.
— Tout a fait, c'est une pierre si précieuse qu'elle n'appartient qu'aux rois et reines de ce monde. Mais si je te disais que tout le monde a, à un moment donné, eu du diamant entre les mains ?
— Je vous répondrai que vous êtes fou si cette pierre est si précieuse qu'elle n'appartient qu'àux rois."
L'homme éclata d'un rire franc.
"Tu n'as peut-être pas de valeurs selon les autres, mais tu as de l'esprit et de la répartie ! Tu n'est pas si inintéressant que ça. lui dit-il doucement. Voit-tu ce magnifique feu que tu as allumé dans cette clairière, dis moi mon enfant, que restera-t-il de ce feu demain lorsqu'il ne brûlera plus ? Questionna-t-il, un soupçon de taquinerie dans sa voix.