Chapitre 3 - Quand le vin est tiré, il faut le boire

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« Permettez, ceci est bien utile en deux cas... ». Diane s'assoie au bord d'un meuble et ne tarde pas à engloutir quelques gorgées du liquide puis, après avoir longuement expiré, en verse sur sa plaie. Elle retient bon nombre de râles. La mâchoire serrée, elle demande d'une voix basse « Ma dame, auriez vous quelques bandages ? ». Jane s'était déjà défaite de son armure, maintenant simplement parée d'un gambison et d'autres vêtements de toile. Elle reste silencieuse et impassible, tandis qu'elle trouve des bandes de tissu et une carafe. Puis, tranquillement vient s'assoir à côté de Diane et commence à la soigner. « Et donc... C'est votre chambre ? » entonne la blessée, ne sachant trop quoi dire. Elle observe patiemment les mouvements de Jane, cette dernière ajustant ses soins « ce sont mes appartements en effet, du moins pour le moment. ». Diane remercie bien la commandante lorsqu'elle eut fini. Restant assise pour autant, elle soupire, ses yeux passent de part et d'autre des bibliothèques, des murs. "Je déplore et m'excuserai mille fois des actes déjà commis qui vous ont poussé à vous cacher ainsi. Il est temps, si ce n'est un peu tard, que vous retrouviez des quartiers dignes de quelqu'un comme vous...". Levant finalement les yeux vers ceux de Jane, l'air grave :

— Qui sont ces gens qui semblent vous causer beaucoup de tort ? Ils ne paraissaient pas n'être que de simples bandits.

— Veuillez d'une part ne pas vous excuser. Ces appartements me conviennent bien mieux que les quartiers pompeux auxquels mon rang me contraint. Quant à ces ordures, je vous dirais simplement qu'un royaume affaiblit fait sortir les rats de leur trou. Les pires engeances sont souvent ceux qui vous servent le mieux... Il est grand temps de tirer l'hypocrisie aux conséquences.

— Ah ! C'est partout pareil. Tendez la main et on vous avale le bras jusqu'à l'épaule.

Tout en écoutant son interlocutrice, Jane sort une flasque presque vide et s'en délecte d'une lampée, pour ensuite tendre le récipient vers la jeune femme. Celle-ci devient un instant silencieuse mais tend bien volontiers la main, sans prendre garde se sers également d'une gorgée, bien trop grande. Elle ne peut retenir une quinte de toux qui l'assaille. Soufflant finalement du fait de la force de la boisson, elle ricane et rend la flasque. « Vous êtes quelqu'un de bien, Dame Asterling, je suis heureuse d'avoir croisé votre route. J'aurais aimé en d'autres circonstances... Mais une cave, c'est bien aussi ! » Ce à quoi Jane répond après avoir réprimé un petit rire : « Allons... Ce n'est pas luxueux, mais ne n'est tout de même pas une cave ! ». Elle adresse un dernier sourire avant de se retourner et saisir quelques vêtements « Excusez-moi, mais je ne souhaite pas restée souillée du sang de ces bâtards... ». Puis disparait derrière le paravent. L'écoulement de l'eau retenti dans la pièce, autant que le bruit des vêtements tombés au sol. Diane est soudainement éprise d'un sentiment d'embarrât. « Je... Euh... Oui enfin vous... Vous êtes chez vous... », se tait et racle sa gorge. Bien que silencieuse et immobile, assise sur la table les bras croisés, elle n'en reste pas moins attentive. Au son du mouvement de l'eau se suit la voix de Jane, dans les grommèlements inaudibles probablement dus à un bain trop froid. Diane reprend, toujours hésitante

— Souhaitez vous que je quitte la pièce ?

— Allons, ce paravent est suffisant. Mais si cela ne vous sied ou saurait vous donner quelconque mal-être, voyez derrière la bibliothèque se trouve une antichambre.

— Aucunement ma Dame, c'était pour vous...

— Ha ! Pour moi... C'est bien aimable. Dans un monde où nous ne disposons de notre corps qu'au bon vouloir des autres.

— C'est bien triste d'en conclure ainsi ! – Diane pouffe un rire – mais vous avez peut-être raison. Quoi qu'il en soit, me concernant, je suis bien mal placée pour exiger quoi que ce soit de v... Ehmm... Vous êtes mariée ?

— Je l'ai été, et ce fût au mieux décevant.

— Mmh.

Le regard embarrassé de Diane se perd dans le vide, ses doigts tapotent contre le bois du bureau. Elle regarde autour d'elle et attrape au bout du meuble la bouteille entamée, faisant tourner le liquide dans le récipient. « Vous avez soif ? ». Un bras nu s'extirpe du paravent, laissant quelques goûtes tomber au sol. Malgré un pas boiteux, Diane s'empresse d'apporter la bouteille à la commandante. Elle reste là, silencieuse, et attend. Quelques courtes minutes s'écoulent avant que l'eau ne s'agite de nouveau. Après quelques instants, Jane sort de derrière le paravent, habillée de vêtements en toile brodés et ajustés. Toujours sans dire mot, la lionne esquisse un regard attentif aux détails de la parure de son hôte, et soudainement commence à s'agiter en mouvement saccadés. « Je ne saurais vous remercier de votre hospitalité. Mais je ne veux pas vous encombrer plus longtemps... ». La commandante restait pendant ce temps immobile, bras croisés, semblant être amusée par cette vague de tension. « Si vous souhaitez partir je ne vous en empêcherai pas. Mais cette bouteille de saurait se finir seule, et il se pourrait que nous ayons certaines choses à discuter maintenant que nous disposons un peu plus de nos aises. ». Diane regarde alors la bouteille avec intérêt et glousse un rire. Sa comparse lui tend ledit récipient et s'en va en chercher un nouveau, bien vite débouché, qu'elle lève et d'un air enjoué : « A votre avenir ! Puisse-t-il ne souffrir d'aucun dogme. » ; enfin en bois une grande goulée avant de poser la bouteille au centre de la table. Diane répond du même geste tout en affichant un large sourire, cette fois les yeux pétillants rivés sur la commandante, et bois à son tour. Jane lui rend ce regard, avec toutefois une pointe d'amusement. « Bien, parlons. ».

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 23, 2022 ⏰

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