La dernière once d'humanité d'Achille

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Achille traine le cadavre d'Hector par son casque. Le corps sans vie laisse un sillon sanglant derrière lui. La foule qui, à l'instant était emplie d'une violence terrible, s'est arrêtée de combattre. Silencieux, troyens comme grecs regardent Achille ramener Hector en direction du camp achéen. Personne ne bouge, personne ne respire.

« – Que les aèdes ouvrent grand leurs oreilles ! Vous poètes, tous des menteurs ! Chantez ma gloire si cela plait aux dieux, moi je n'en ai cure. Mais ne chantez pas la beauté de ce drame, ne chantez pas mon histoire, si vous le faites, dites la vérité !

Non, mon visage n'est pas beau à voir. Regardé ma barbe qui goutte de sang et de sueur !

Regarder mon casque, mon bouclier, il étincelle parce qu'il m'a été donné par Ephaïstos le Boiteux, par un de ces dieux, lâches, belliqueux et manipulateurs ! Ils m'ont donné des outils pour mener à bien mon projet, qui était aussi le leur, détruire, anéantir !

Oui je sais que vous m'entendez. Zeus Fils de Cronos, ma mère, la Néréide, sale chien, tu l'as trahis. Et tu as eu peur de moi ! Je le sais, je suis plus fort que toi, je devais être plus fort que toi mais tu as été un lâche ! Qu'une vie éternelle doit être épuisante ! J'attends que la mort me libère, et toi, je te le dis, jamais tu ne vivras en paix avec toi même. Une éternité de tourments ! Si je ne peux pas te battre dans ce monde, je ferai en sorte de hanter tes songes ! Je serai aussi terribles dans tes pensées que je ne le suis sur le champ de bataille, pire même !

Aèdes, ne chantez pas mon nom, je ne suis qu'un tueur. Je n'ai aucune pitié, aucune peine à ôter la vie ! Aucun remord ! Regarder mon visage ! »

Le Péléide enlève son casque, un éclair tombe sur Troie.

« -Voyez ! Ma jeunesse, dans ces rides sur mon front, la voyez-vous ? Et mes cernes, mes yeux verts cernés de rouge, est-ce cela que vous chanterez ? Et c'est bouts de cervelles dans ma barbe ? Et mes mains ? Regardez mes mains ! Calleuses, usées, elles ont massacrée ! Des fils, des frères, des maris, des oncles, des pères, des amants, des jeunes, des vieux, des princes et des rois ! Regardez !
Voilà ce que voulez les dieux ! »

Il prend le cadavre du fils aîné de Priam dans ses bras.

« – Et lui, tout pareil que moi. Etait-il comme je l'étais durant mon enfance ? Oh Chiron, comme j'aurai aimé rester près de toi avec mon Patrocle. Dans cette grotte, à apprendre de ta sagesse, à écouter tes histoires avec notre Patrocle ! Philtatos ! Comme nous étions innocents et beaux ! Il a fallu qu'un des divins olympiens éveillent en moi l'hubris. Cet hubris est la lie de notre âme, mortels !

Non aèdes, si notre destiné est guidée par les Parques, cette vie ici, n'a aucun sens ! Je ne suis pas un jouet ! J'aimerai oh Seigneur Porteur du tonnerre et de la foudre, que vous m'ameniez Apollon le Flamboyant, l'un des plus cruel, plus qu'Arés qui lui au moins revendique sa soif de sang humain ! Apollon l'Archer céleste, ce lâche, manipulateur, qu'il vienne, tout immortel qu'il est, je veux blesser son égo, qu'il me tue, mais pas avant qu'Aristos Achaion ne fracasse à jamais sa gloire !

Chantez aèdes, la cruauté des dieux, leurs folies car elle est la notre aussi !

Pâris le lâche devait mourrir des mains de Ménélas, mais ce bellâtre, l'élu d'Appolon le Miséricordieux (car maintenant il est le sauveur des lâches), s'est enfuit. Encore ! Par qui a-t-il été sauvé ? Vous le savez autant que moi. Et combien de morts inutiles depuis ?

Hector, tu ne m'avais rien fais. Rien ! Jusqu'à ce que ta maudite main m'êtes fin à la vie de ma moitié. Si j'ai évité la confrontation avec toi, c'était car tu ne m'avais fais aucun mal ! Parce qu'une prophétie clamait que je perdrai ma vie si j'ôtai la tienne. Maintenant voici chose faite ! Nous savons maintenant qui est le plus fort sur ce sol, dans ce monde. Le plus fort ici-bas. Mais dites moi, à quoi cela nous avance-t-il ? Peut-on ramener les morts à la vie ? Non ! Il n'y a que ces lâches en haut de la montagne sacrée pour s'autoriser cela ! »

La dernière once d'humanité d'AchilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant