Disturbed Teenagers

La rentrée des classes

Enfin bon, ne nous attardons pas plus sur cet affreux épisode, nous avons plein d'autres choses beaucoup plus intéressantes à voir. Avant que les cours ne commencent réellement, je fis un bref passage aux toilettes pour m'enlever ce foutu milk-shake qui ne voulait décidément pas partir. En me regardant dans le miroir, je me rendis compte à quel point je ne ressemblais plus à rien avec mes cheveux noirs tous décoiffés, ma robe mauve toute tâchée et mes chaussures qui couinaient à chaque fois que je posais un pied sur le sol. Mon maquillage avait légèrement coulé ; mes deux heures de préparation de ce matin n'avaient décidément servi à rien. Je sortis des toilettes, pas forcément dans un meilleur état ; les gloussements de mes camarades ne me prouvèrent d'ailleurs pas le contraire. Les ignorant comme je sais si bien le faire, je me dépêchai afin de rejoindre Kristen et Abigaïl pour notre premier cours de l'année. Dans ma précipitation, je manquai même de renverser un camarade :

"Hé ! Fais gaffe où tu vas charlotte aux fraises, t'es pas seule ici."

En me retournant, je fis face au plus beau mec que je n'avais jamais vu de toute ma vie. Et Dieu sait que je m'en suis tapé des canons, mais celui-là battait tous les records. Il avait beau être plus petit que le garçon que j'avais croisé hier soir au parc, celui-là n'était plus qu'un lointain souvenir à côté. Il était blond, les cheveux bien coiffés, la peau bien bronzée après le bel été que nous avions eu cette année, ce qui faisait ressortir ses splendides yeux bleus.

- Euh, excuse-moi, bafouillai-je. Je ne t'avais pas vu. 

- Pourtant, je ne suis pas le genre de mec qu'on ne remarque pas en temps normal. T'es qui au fait ? Je ne t'ai jamais vu l'an dernier.

Son air arrogant et sûr de lui rendit d'un coup tout son charme caduc, et je ne voyais plus que ses défauts : ses horribles ongles noirs, ses dents ravagés par la cigarette et ses vêtements dégueulasses qui n'avaient pas dû être lavés depuis un bon moment

- Moi, c'est Emily, et crois-moi, tu n'es pas un mec qui passe inaperçu, bien au contraire. Avec les mouches qui tournent autour de toi, on ne peut pas te louper, c'est clair."

Au son des rires de mes camarades autour, et face à la blancheur du visage du garçon qui se trouvait en face de moi une fois que j'eus fini ma phrase, je continuai de marcher jusqu'à la salle, où j'y retrouvai Abi et Kristen. 

"Dis-donc tu ne manques pas de culot toi, me dit Abi, l'air admirateur.

- S'il y a bien une chose que j'ai apprise dans mon ancien lycée, c'est qu'il ne faut jamais se laisser démonter, surtout face à ce genre de crapule."

En s'asseyant dans la salle de classe, Abi me prêta son gilet pour cacher les dégâts causés par cette garce de blonde à talons. La professeure principale, madame Flores, se présenta à nous en entrant dans la salle. Elle faisait très froide au premier abord ; c'était une femme de la quarantaine, avec des cheveux bruns qui lui arrivaient en dessous des épaules. Ses yeux, cachés par d'immenses lunettes noires et sa carrure toute fine, lui donnaient un air encore plus strict que ce qu'elle était. Je ne fus pas surprise quand Abigaïl m'apprit que cette femme était la mère de Chanel. Je commençai même à remarquer l'air de ressemblance entre la mère et la fille, quand cette dernière rentra dans la pièce. Il fallait voir comment elle se la pétait ; elle défilait entre les rangées comme si elle passait un casting pour la Fashion Week, avec ses sandales compensées, sa jupe courte orangée et son bustier à franges. Elle se dirigea au fond de la salle, rejoignant ainsi sa meilleure amie Elizabeth et l'autre peste de Beverly. Elles formaient un super trio de sorcières celles-là, mais elles ne me faisaient pas peur. Dans le domaine des coups de traître, j'étais une experte. Et elles n'allaient pas tarder à le découvrir, croyez-moi.