Disturbed Teenagers

Debriefing

En rentrant chez moi, je repensai à l'étrange attitude que Kristen avait eu cet après-midi, et à la manière dont elle m'avait regardé avant de nous laisser Abi et moi. Je n'aurais jamais cru que Kristen pourrait me jeter un tel regard noir un jour, elle qui est si douce et timide en temps normal. Je peux comprendre qu'elle n'aimait pas m'entendre parler en mal de Beverly, puisqu'elle a été son amie, mais je n'avais pas non plus dit des choses horribles à son sujet. Et puis de toute manière, c'était Beverly qui avait lancé les hostilités et je ne faisais que me défendre face à ses attaques plus puériles les unes que les autres. J'étais persuadée que Kristen s'était servie de cette excuse pour s'enfuir et qu'au fond, il y avait un autre problème. Je sentais qu'elle ne m'appréciait pas tant que ça et que le fait qu'Abigaïl m'appréciait l'embêter. Mais pourquoi ? Je ne tarderais sûrement pas à le découvrir. Mais pour l'heure, j'avais d'autres préoccupations, et surtout une mission à accomplir. 

En effet, je devais convaincre ma mère d'accepter d'organiser un dîner avec le voisin ; et la connaissant, ça n'allait pas être si simple. Alors que je montais les escaliers pour rejoindre mon appartement, qui était au deuxième étage, je croisai Noah, le voisin canon en question. 

- Salut !, lui lançai-je essoufflée, alors qu'il avait le dos tourné.

- Oh salut Emily ! Comment tu vas ?, dit-il en se retournant, un peu surpris par mon arrivée qu'il en fit tomber ses clés.

Alors qu'il se baissait pour les ramasser, j'en profitai pour le reluquer de la tête aux pieds. Sa barbe venait juste d'être taillée. Il avait des cheveux bruns courts mais ébouriffés sur le dessus, ce qui le rendait encore plus craquant. Malgré ses 45 ans, il n'avait pas de rides. Et puis son corps d'athlète faisait craquer même les plus jeunes, la preuve en était : j'étais sous le charme. Parfait pour ma mère quoi !

- Bien et toi ?

- Je vais bien aussi. Comment se passe votre installation à toi et ta mère ?, demanda-t-il en se relevant.

- Bien, bien. Tout se passe super bien, dis-je en m'avançant vers mon appartement, mes clés à la main.

Et avant d'ouvrir ma porte, je me retournai et lui dit d'un air confiant : "Et au fait, ça tient toujours pour le dîner la semaine prochaine ? 

- Justement, je pense que tu devrais en discuter avec ta mère avant. Elle n'avait pas l'air d'être trop au courant quand je lui en ai parlé.

Et merde, ça, je ne l'avais pas vu venir. Comment j'allais pouvoir me sortir de cette situation très embarrassante ? 

- Ah bon ? C'est étrange, bégayai-je en m'avançant vers lui tout en voyant qu'il comprenait que j'étais en train de me noyer dans mes mensonges. Mais je vais voir ça avec elle, tu as raison.

- Pas de problème, tu me tiendras au courant, dit-il en me lançant un clin d'œil. 

Après lui avoir souhaité une bonne fin de journée, je retournai vite dans mon appartement, rouge de honte ; ma supercherie avait été démasquée au grand jour et je n'allais pas tarder à entendre les sermons de ma mère. Je posai mon sac en toile sur la table en bois de la cuisine en entrant, le regard perdu dans mes pensées. La lumière tamisée de la pièce apportait un certain réconfort après cette journée tumultueuse. La douce odeur de gombo flottait dans l'air, émanant du plat que ma mère avait préparé. Je me servis un verre d'eau fraîche, laissant les glaçons tinter légèrement contre le verre, et essayai de me détendre en remettant de l'ordre dans mes idées.

- Tiens, tiens... Voilà qui est de retour, lança ma mère en sortant de la cuisine. Tu as passé une bonne journée ma chérie ? 

- C'est bon, arrête de faire semblant. Je suis au courant que tu sais pour le dîner. Mais pourquoi tu es allée dire au voisin que tu n'en savais rien ? Je passe pour qui moi ?