Chapitre 2

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Tandis que nous roulions sur une route de campagne déserte, ma mère paniquait. Elle regardait de tous les côtés, pincait les lèvres et faisait souvent un geste étrange avec ses doigts : elle les posait sur sa poitrine, près du cœur et les repoussait vers  l'extérieur.
Je parlais le moins possible car il y avait trop de questions qui se bousculaient dans ma tête. Comment était ce possible que ma grand-mère soit une demi déesse ? Ça veut dire que les dieux existent ? Et qu'ils ont survécu jusqu'à notre époque ? Et puis, ma mère a fait allusion à mon père. Je ne l'ai jamais connu. Il est parti très peu de temps après ma naissance. Ma mère a toujours refusé de m'en parler. C'était son secret numéro deux.

Lorsque ma mère stoppa enfin la voiture, je pus reconnaître le paysage de Long Island. Je n'y étais jamais allée mais j'en avais souvent entendu parler. Ma mère pointa un arbre et me dit d'une voix tremblante :

- C'est ici. Tu dois monter sur la colline et dépasser le pin. Tu devrais arriver à la Colonie.
- La Colonie ? Tu m'envoies dans une colonie de vacances ? Mais la rentrée était il y a trois semaines !

Oui je vous l'accorde, se faire renvoyer trois semaines après la rentrée, c'était compliqué néanmoins possible.

- Je les ai déjà prévenu. Ton père m'avait dit qu'un jour tu devrais venir ici. Prends tes bagages. Je t'emmène au plus loin que je puisse.

Je pris mon gros sac et je suivis ma mère sur la colline où un immense pin était planté. Un bruit semblable à un grognement retentit alors. Lorsque je me retournai, j'aperçus le contrôleur du métro qui s'approchait de moi avec son sourire carnassier. Il s'exclama d'une voix rauque et profonde :

- Bonjour Eira Manson. Ils mourront sans toi, et cela ferait plaisir à mon maître. Donc, si tu me le permets... MEURS !

Étonnement, mourir à cet instant ne faisait pas parti de mes priorités. Je criai alors à ma mère de courir.
Mais elle ne bougea pas, trop choquée et terrifiée par ce qu'elle voyait. Elle s'affaissa au sol et je me précipitai sur elle. J'essayai en vain de la remettre sur pied. Je ne pus me résoudre à l'abandonner ici même si le monstre se rapprochait dangereusement de nous. C'est alors qu'une flèche siffla à mon oreille et un rugissement de douleur se fit entendre.

Je relevai immédiatement la tête et vit qu'un adolescent était juste derrière le tas informe que je formais avec ma mère. Le gars était le stéréotype même du surfeur californien, sauf qu'il tenait un arc en... Était-ce du bronze ? Une flèche était de nouveau bandé sur la corde. Il s'exclama :

- Bon, la fille d'Aphro', tu te dépêches ? Je vais pas le retenir éternellement ! Je t'emmène à la Colonie dès qu'il est mort.

Il avait raison, la créature se relevait déjà et elle retira la flèche planté dans sa jambe avec un cri rageur. Le garçon tira une nouvelle flèche dans un des ses bras. Nouveau rugissement de douleur.
Je tirai alors ma mère vers le fossé et lui murmurai de ne pas bouger. C'était inutile car elle n'a pas esquissé un mouvement depuis qu'elle a vu le monstre.

Je repris mes esprits et commençai à comprendre ce qu'il voulait de moi. Il m'observa de haut en bas et grogna :

- Ouais, définitivement, c'est Aphrodite. Il y a une épée dans mon carquois, tu n'as qu'à la prendre.

Je lui offris un sourire nerveux.
Il s'accroupit pour que je puisse atteindre le manche de l'épée qui dépassait de son carquois. La lame était longue et fine, on aurait dit un sabre de samouraï.

Je pointai ma lame devant moi. Je pris de l'élan et fonçai sur la créature. Mais je me rendis compte trop tard que ce combat ne serait fictif, il serait réel ainsi que tout ce que cela implique. Je n'avais qu'une seule chance.

Je m'avançai vers le monstre, armée de ma lame pendant que le californien le transformait en hérisson. Il semblait toucher aucun point vital car le monstre n'était pas tomber de nouveau.

Je jetai un regard derrière moi,le gars me fixait et je lisais dans son regard bleu que c'était à moi de le tuer, qu'il faisait juste diversion avec ses flèches.

Je pris mon courage à deux mains et m'élançai sur le monstre. Étant distrait, je pus bondir et ainsi lui entailler le bras. La blessure fuma et un sang doré s'en écoula. Je sautillai autour de lui pour éviter ses poings qu'il adorait visiblement m'envoyer dans le visage. La créature n'était pas armé néanmoins, ses mains étaient recouvertes de piques acérées.
Il m'entailla le genou droit qui commença à fumer. Ma vision se brouilla et j'entendai la voix du garçon me crier des mots sans queue ni tête.

Je me forçai à rester debout. Je devais le faire pour assurer ma survie. Lorsque que je me retrouvai à nouveau face à lui, il avait les jambes écartées et j'eus une idée. Malgré mon dégoût et ma faiblesse, je fis une roulade, passai entre ses jambes. Je me relèvai, sautai aussi haut que je le pouvais en prenant appui sur ma jambe gauche et lui tranchai la tête.

Le monstre s'affaisa, sa tête roula à côté et le sang doré coula abondamment. Le reste du corps se disloqua et tomba en poussière.

Je m'effondrai moi aussi mais au dernier moment, le californien me rattrapa.

Il m'assit au sol, sortit un flacon de sa poche, s'approcha de ma mère et l'aspergea du contenu de la fiole.

J'étais inquiète pour elle mais je savais que le garçon prendrait soin d'elle. Il m'avait sauvé la vie, il ne pouvait pas être mauvais.

Les yeux de ma mère se révulsèrent, elle tomba en arrière puis se redressa soudainement. Je me plaçai devant elle, paniquée. Son regard était complètement vide. Elle ne me jeta même pas un regard, entra dans la voiture et repartit vers la ville.

Je laissai échapper un sanglot et l'adolescent me prit dans ses bras et me rassura, comme un frère pourrait le faire. Il murmura doucement :

- Eh, ça va aller. Ta mère a subit une amnésie légère, juste pour lui faire oublier les dernières minutes. Mais ce qui me chiffonne, c'est le fait qu'elle est vu le monstre...

- Mais, elle va bien, hein ? demandai-je, inquiète.

- Oui. C'est une potion que les Hécate ont confectionnés et elles sont sans danger, m'assura-t-il.

Je réfléchis quelques secondes mais une chose me frappa :

- Hécate... Mais elle n'existe pas, c'est un mythe !

- Ah oui, je ne t'ai pas expliqué... Nous sommes des demi-dieux, appelés aussi sang-mêlés. On est les enfants d'une divinité et d'un mortel. Mon père est Apollon.

- J'en suis une, moi aussi ?

- J'imagine. Tu pourrais bien être fille d'Aphrodite.

Je rougis et retint un rire. Fille d'Aphrodite hein... Peut-être que finalement, mes cheveux bruns et mes yeux verts servaient à quelque chose. Il reprit, en me tendant la main :

- Je suis Will Solace et tu es... ?

- Eira Manson.

-Enchanté Eira. Allez, sèche tes dernières larmes et je t'emmène voir la Colonie.

Voilà pour le chapitre 2 ! Le chapitre 2 et le chapitre 3 ont été mixés ensemble car ils étaient tous les deux assez courts. J'espère que le chapitre vous a plu. N'hésitez pas à lâcher un commentaire ou un vote, ça fait plaisir !

Sang MêléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant