Chapitre 5 : Tu as toute ma confiance

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On ne pouvait pas vraiment dire qu'il avait la grande forme, il se traînait plus qu'il ne marchait. Sans Sam, il n'aurait sans doute pas été capable d'avancer.

Et s'ils se pressaient à travers les bois malgré les plaies béantes de Bucky, c'était parce que le couple d'ingénieurs dont ils venaient de détruire le laboratoire avait plus d'un mauvais tour dans son sac. Sam et lui s'étaient assurés de détruire les lieux mais ils n'avaient pas pu empêcher la fuite du couple. Les tourelles de défense qui avaient surgi du sol dès que Sam avait pris son envol pour les pourchasser avaient été une mauvaise surprise. Tout autant que l'avaient été les nombreux drones qui les avaient poursuivis. Ce type d'arsenal ne figurait nulle part dans le rapport préliminaire qu'ils avaient reçu. Ils n'avaient donc pu que constater par eux-mêmes la précision exceptionnelle et le temps de réactivité extrêmement court des tourelles en question. C'était la raison pour laquelle son coéquipier était cloué au sol jusqu'à ce qu'ils s'éloignent suffisamment de leur portée.

Malheureusement, ce n'était pas leur seul problème. Remporter la bataille contre les drones n'avait pas été sans conséquences pour Bucky. Ces satanées machines lui avaient fait perdre une bonne quantité de sang et avaient peut-être même réussi à le toucher à la tête, s'il se fiait au marteau qu'il avait dans le crâne et le liquide qui lui coulait sur le visage. Sa vue commençait aussi à se troubler, ce qui n'était pas vraiment bon signe.

Sam s'arrêta brusquement, le faisant presque trébucher, et les abrita derrière un tronc épais. Avaient-ils omis de se débarrasser d'un des drones ?

Tendus, le bras droit de Bucky en travers les épaules de Sam, ils attendirent silencieusement quelques instants. La tension se relâcha finalement quelque peu dans les muscles de l'autre homme et Bucky soupira.

Puis il posa son front contre l'arrière de son crâne, qui pour une quelconque raison n'était plus recouvert de la matière solide de sa combinaison, et posa les lèvres sur le haut de sa nuque.

Ils étaient vivants et allaient se sortir de cette mission qui aurait vraiment mérité plus que deux hommes pour la mener à bien. Il était complètement certain que Sam allait les tirer de là.

Son ami resserra sa prise sur son bras et les fit reprendre leur route, ayant probablement une bonne idée du chemin à suivre grâce aux lunettes qu'il portait toujours.

- C'était ta version d'un baiser d'adieu ? dit-il finalement d'un ton bas mais léger. Parce que, laisse-moi te le dire, elle craint.

Bucky laissa échapper un petit rire, qui se transforma en une toux un peu trop longue et lui laissa un désagréable goût métallique dans la bouche. Son coéquipier lui jeta un coup d'œil, les sourcils froncés.

- Nan, tu vas devoir me supporter encore un bout de temps. Disons plutôt que c'était un baiser pour remercier la princesse d'avoir sauvé le prince.

Il cracha à terre le sang qui avait choisi ce moment pour remonter dans ses poumons.

- Et je suis censé être la princesse ? répondit-il d'un ton amusé.

Sa main gauche se resserra toutefois sur la taille de Bucky, trahissant son inquiétude.

- Ouaip, celle qui me sauve, dit-il, assez sûr que son sourire s'entendait dans sa voix.

- Pas certain qu'il reste grand-chose à sauver vu le peu de sang qui semble encore irriguer ton cerveau, Sir Fer Blanc.

- Le magicien d'Oz ? Le livre était intéressant. Pas eu l'occasion de voir le film à sa sortie, par contre... serait pas... mauvaise idée... remédier...

- Bucky ? Bucky !

Il sentit qu'il perdait le contrôle de ses muscles et se dit qu'il aurait aimé comprendre ce que Sam lui disait même si sa voix était un son profondément rassurant. Bucky réalisa que ses pieds quittaient le sol et se sentit entouré de chaleur avant que la sensation d'être porté à travers les airs ne l'atteigne.

Sa dernière pensée fut qu'ils devaient encore être à portée de tir des tourelles de défense et que Sam venait de faire un choix bien trop imprudent.

La pensée suivante fut emplie de panique : à l'odeur d'antiseptique et le bruit des machines, on venait une fois de plus de le décongeler.

Bucky ouvrit subitement les yeux, les muscles bandés, prêt à se battre contre ses geôliers.

- Tu es à l'hôpital.

La voix calme de Sam l'apaisa immédiatement et il se tourna vers son origine. Il ignora consciemment la manière dont l'appareil qui surveillait ses signes vitaux cessa ses bips alarmés. Ou la certitude que l'autre homme avait très bien compris la source de son angoisse.

- Il en aura fallu du temps mais la princesse s'est enfin extirpée de son sommeil. Le royaume est sauvé ! affirma Sam avec un sourire en coin.

Bucky cligna des yeux puis se rappela vaguement le contenu de leur dernier échange.

- Juste le royaume de Sam Wilson, alors.

Sa voix enrouée le surprit mais cela ne l'empêcha pas de lui rendre son sourire. Déjà, la crainte qui avait surgi à son réveil s'effaçait. Simplement parce que Sam était là, auprès de lui. Il était en sécurité.

Son ami lui tendit un verre d'eau qu'il prit avec reconnaissance après s'être un peu redressé.

- Eh, c'est déjà pas mal, répondit Sam avec douceur mais aussi un regard intense auquel il ne s'était pas attendu. C'est un petit royaume mais chacun y a son importance.

L'envie de serrer Sam dans ses bras fut soudaine et viscérale.

Bucky ouvrit bouche.

- Ah, Monsieur Barnes, vous êtes de retour parmi nous.

L'intervention de la jeune femme en blouse blanche brisa l'intimité du moment. Et les mots que Bucky avait eu sur le bout des lèvres durant une fraction de seconde revinrent trouver refuge dans les tréfonds de son esprit.

Quinze minutes plus tard, Sam lui expliquait comment les tourelles contrôlées à distance avaient permis de retrouver la trace des ingénieurs fugitifs et Bucky grimaçait de dégoût envers lui-même en écoutant les justifications ridicules et les stupides coups de chance du couple qui leur avaient permis de l'envoyer sur un lit d'hôpital alors même qu'une armée extraterrestre n'y était pas parvenue.

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