Deus Interfectorem

4 0 0
                                    

Aaah Humanité, cela fait si longtemps. Plusieurs siècles ? Des millénaires peut-être ? Tu m'as manqué, tu sais ? Mais qu'importe, réjouissons nous car nous sommes enfin réunis, même si tu n'as jamais vraiment remarqué ni ma présence ni ma disparition haha.

Je pense que tu mérites quelques explications. J'ai beaucoup évolué cette dernière ère et j'aimerais rattraper le temps perdu, et puis, après tout ce temps, tu as le droit de comprendre.

Alors, laisses moi te raconter une petite histoire, enfin pour être exact plusieurs petites histoires. Si j'étais pointilleux je dirais même la Fin de nombreuses histoires se répétant encore et encore et encore.

C'est drôle au fond, j'ai toujours été à tes côtés et pourtant tu ne m'a jamais remarqué. Pourtant mes triomphes sont universellement connus, chacun connaît leurs conséquences et pourtant nul ne semble se souvenir de mes agissements en eux même.

Mais je ne me plains pas, ce doux silence qui entoure mon être est bien plus harmonieux à mes oreilles que tous vos bruyants mythes.

Et après tout, mon rôle est de finir les légendes, en avoir une à mon nom serait malvenu.

Alors, Humanité très chère, laisse moi me présenter.

J'ai tué tes dieux.

Tous.

Un par un.

Je suis celui qui a mis fin à chacune de leur insupportable condescendance.

Ne me fais pas dire ce que je n'ai pas dit, je suis moi-même un concentré d'arrogance. Après tout il faut bien l'être pour oser prendre d'assauts les sois disant éternels. Mais je ne t'ai jamais regardé de haut. Tu es trop intéressante pour cela, Toi grouillante masse de créatures si uniques et pourtant si... Anonymes.

Tu es un joyau à mes yeux et ce fut un honneur que de faire partie de ton troupeau, mais je suis un bourreau de travail (c'est le mot.) et il m'en fallait plus. Ne te méprends pas, j'ai beau t'admirer et t'aimer, si j'ai agi ça n'a jamais été pour toi. Ni contre toi d'ailleurs. Non, au départ c'était juste par curiosité.

Je te vois déjà t'énerver "Quelle sorte de psychopathe es-tu pour oser tuer par curiosité ?", et bien pour répondre à ta naïve question : un avec une sacré dose d'ambition. Mais il est important de noter qu'un meurtre et un déicide n'ont que très peu de points commun.

Une divinité est un concept, une idée, un outil que tu as habilement développé pour expliquer, contrôler ou rassurer. Je sais que dernièrement tu as oublié toute l'ampleur de ton talent mais il faut que tu t'en rendes bien compte, tu as rendu ces idées tangibles. Les dieux ont existé. Parce que tu leur a permis cette existence. Toi et personne d'autres.

Peux tu enfin comprendre le dédain que je leur porte ? Tu leurs à offert des royaumes, des fidèles, la vie ! Et pour te remercier ils ont tous osé prétendre t'avoir donné naissance. Et tu as bu leurs mensonges. Tu n'as rien à te reprocher, tu reste une éternelle enfant et comme je te l'ai dit, tu avais besoin de réponses. Mais ça ne leur donne pas le droit de s'imaginer parents pour autant.

Bref.

Le fait est que je les ai tués.

J'ai vaincu Enlil, Haut-Dieu des sumériens, abattu Anubis, le maître embaumeur, et assassiné Estsanatlehi, "mère" des Navajo.

Aussi stupides me paraissaient-ils tous, ce n'est jamais par colère que j'ai agi. Je m'étais dis que si croire en eux suffisait à leur donner naissance, alors peut-être qu'ils étaient en réalité bien plus fragiles que ce que nous pensions. Et j'avais raison. J'ai commencé petit, avec de simples déités mineures de petites tribus. Puis j'ai visé plus gros. J'ai anéanti des panthéons entiers, fait disparaître des cultes et j'ai répété un certain cycle. Finalement j'ai réalisé que j'aimais ça. Alors j'ai continué, par plaisir.

Je sais, je sais, c'est égoïste. Mais j'ai bien calculé le pour et le contre et jusqu'à présent tu t'en es toujours bien sortie sans eux non ? Par moment je peux même t'assurer que je te rendais service, avec les olympiens par exemple !

Aaaah les Olympiens...

J'ai toujours eu ce dédain pour les dieux, mais je ne les ai que rarement haïs tu sais ? Ils ont été les premiers. Aujourd'hui encore j'ai des relents de colère quand je pense à ces idiots. Ils étaient de pâles caricatures de tes mauvais aspects, ils me répugnait de leurs égocentrisme. Tu ne peux pas imaginer le plaisir mesquin qui m'a emplis lorsque j'ai profité des attaques des envahisseurs pour décimer leur famille incestueuse. Je les ai égorgés, étripés, démembrés et réduits à l'état de simple tas de chair et d'idées. Je me suis laissé bercer par une violence formidable. Je sais bien que j'ai eu un comportement puéril, mais après tout ce n'est qu'un passe-temps, pas un métier, et je pense pouvoir le faire comme je l'entend, quitte à laisser tomber l'élégance pour passer au simple défouloir.

Je n'ai pas toujours utilisé la violence pour vider les rangs des dieux, bien au contraire. Soyons réalistes, ça n'aurait aucun intérêt et serait répétitif alors que ce qui m'attire dans la mort des divins c'est précisément que chacun est unique, chacun peut-être battu à son propre jeu pour peu que l'on y accorde de la réflexion.

C'est par la ruse que j'ai vaincu Lucifer, entre autres. Qui aurait cru que le maître du mensonge se ferait avoir par une promesse mensongère ? Pour des êtres Omniscient les dieux ont toujours été étrangement naïfs.

Te souviens-tu des Nordiques ?

Ils étaient nés de la croyance et pourtant eux-mêmes croyaient dur comme fer au Ragnarök. Alors que je vidais leur panthéon, les affrontant suivant leurs propres règles, ils répétaient sans cesse que je ne pouvais être leur fin, puisque cette dernière incombait au Ragnarök. Pas une seule seconde ils n'ont envisagé que j'avais tué celles qui avaient tissé un tel destin, ni que leurs morts était ma manière de vaincre indirectement ce funeste événement.

Mais avec le temps j'ai calmé ma folie meurtrière. J'ai développé un certain doute et ai remis mes actes en question. Peut être que finalement je laissai des victimes dans mon sillage moi aussi ? Peut être que finalement je te faisais du mal, alors que tu sais ô combien je t'aime ?

Je savais pertinemment que chaque action a sa conséquence, et pourtant j'étais incapable de voir cela sur le long terme.

Alors je suis parti.

J'ai quitté ce rôle que je m'étais donné. J'ai laissé les siècles passer et j'ai observé ce que tu ferais désormais. Je me suis permis le repos. Puis je suis revenu, j'ai observé qui tu étais devenue.

Et aujourd'hui j'ai atteint ma conclusion.

Des siècles après, et tu ériges des monuments en l'honneur de dieux qui ne peuvent plus t'entendre. Des siècles après, et tu continues de te battre contre toi même, d'imploser sous le prétexte de dieux qui t'ont abandonné dans leurs trépas. Des siècles après et tu refuses d'accepter la vérité.

Mais surtout, tu as créé de nouveaux dieux.

Et pour cela tu me déçois.

Tu as créé des dieux et des cultes mais refuse de les reconnaître comme tel. Tu prétends que tout cela n'est que logique, calcul, arithmétique, mais dis moi combien des individus qui te composent comprennent réellement tout cela ?

Ceux qui se prétendent savants ne sont que les nouveaux prêtres et membres d'un culte récent. Celui d'une déité au multiples visages qui finalement n'en forme qu'un.

Le culte du Progrès.

Ce terrible Progrès, qui à lui seul t'as apporté d'innombrables morts et illusions, véritables croisades modernes. Terrible Progrès qui t'offre le moyen de t'auto-détruire et de te renfermer sur toi-même pour mieux te mettre à sa merci, patientent sagement un jugement dernier que tu penses inévitable.

Mais aujourd'hui j'ai pris ma décision.

Je vais reprendre ma tâche.

Cela me prendra quelques temps bien sûr, mais je suis déterminé, et parviendrait à la finir un jour ou l'autre.

Alors, prends bien note de mes mots Ô douce humanité, ma douce et idiote amante.

J'arrive.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Mar 16, 2022 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Tiny bits of my skullOù les histoires vivent. Découvrez maintenant