19. 9.15

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La nuit où mon cauchemar avait prit une tournure morbide, je restai un moment sans pouvoir organiser mes pensées. Eric et Amélia, eux, ne cessaient de me poser des milliers de questions auxquelles je ne pouvais répondre. Je restai dans le flou pendant quelques jours, errant chez moi comme une âme en peine, comme si mon esprit était embrumé. C'était une sensation désagréable, dérangeante, comme si mon esprit errait hors de mon corps, vagabondant entre rêves et réalité et j'oscillais entre ces états sans pouvoir contrôler quoi que ce soit. Cet état à la limite de l'apathie jouait sur mes humeurs devenues, dès lors, instables.

Amélia, plus disponible qu'Eric, appela le médecin qui conclut d'une fatigue anormale et me donna de quoi dormir. Sans blague... depuis mon retour je n'avais pas eu un seul jour de répit. Entre meurtres et disparitions j'avais une boule d'émotions dans l'estomac que j'avais du mal à contenir, et à tout moment elle pouvait exploser et se déverser sur le premier venu. Voir ces petits cachets ronds dans le creux de ma main me faisait trembler d'épouvante. Et si ça ne marchait pas ? Franchement je n'avais aucune envie de les prendre, mais mon corps agissait indépendamment de mon esprit. Ainsi, une fois les yeux fermés,  je me retrouvai à nouveau piégée dans l'horlogerie, prisonnière d'un labyrinthe changeant et effrayant de bric-à-brac. Cette fois-ci je ne me réveillai pas, même si ma conscience commençait à s'envoler. Je fus prisonnière de mon corps endormi. J'avais beau hurler, courir, me débattre de toute mes forces, cette fois je n'avais aucun échappatoire, et encore une fois ces deux mains glacées finirent par m'enserrer le cou et m'étouffer.

- Réveille toi ! Me hurlai je à moi même. Réveille -toi ! Ne cède pas !

Malgré mes efforts, mon ennemi était beaucoup plus fort que moi et plus je me débattais, plus j'avais l'impression que ma conscience s'évanouissait. Mais au moment où je me sentais disparaître, les mains de ma némésis disparurent et je pus reprendre mon souffle. Je regardai tout autour de moi, mon ennemi avait disparu. Pourtant, je sentis une présence qui avait quelque chose de rassurant et de familier.

Haletante, je continuai mes recherches le cœur battant et mon regard se posa soudain sur une boîte à musique identique à celle que ma mère avait posé sur la cheminée du salon. Que faisait elle donc ici ? Alors que je m'approchais d'elle, je sentis une main chaude prendre la mienne et m'attirer vers elle. C'est à ce moment là que je me réveillai. Je me redressai d'un geste vif, et sans réfléchir, plongeai dans mes vêtements et sortis en courant pour me changer les idées.

L'air frais de la matinée déjà bien entamée me fit un bien fou et j'éprouvai soudain le besoin de me rendre sur la tombe de ma mère. Je pris mon temps, respirant l'air à pleins poumons, essayant au possible de réorganiser mes pensées. Lorsque je vis le feu rouge, je ne pus m'empêcher de penser à ma première rencontre avec Henry Wilson et je ne pus retenir un rire bref. Où était il donc passé ? Pour quelle raison avait-il disparu de la sorte ? Je soupirai et, lorsque j'arrivai devant le cimetière, j'eus un instant d'hésitation. Avais je vraiment le droit de venir me recueillir ? Quelque part, Ellie O'Brien avait raison. Elle était ma mère, et moi, dans un élan de rancœur incontrôlable je n'avais jamais demandé de ses nouvelles. J'inspirai un grand coup et allai déneiger le monument de pierre.

- Salut maman. Commençai je à lui dire en époussetant la neige. Ouais ça fait un moment que je ne suis pas venue... tu sais... je regrette tout ce qui a bien pu se passer. Même si je t'en veux encore, j'aurais voulu être à tes côtés quand ça n'allait pas... pfff... Je suppose qu'il est trop tard pour te dire tout ça, mais il fallait que tu le saches. Alors, si tu m'entends de là où tu es...

Je n'eus pas le cœur de finir ce que j'avais vraiment envie de dire. Après tout, cela était inutile maintenant... je restai un moment à contempler sa tombe, grelottant sous les flocons de neige.

- Il va falloir que je change ton bouquet de fleur... Murmurai-je pour moi-même.

- Encore toi... Toujours dans les environs, à ce que je vois. Fit la voix d' Ellie qui était de passage.

- N'en déplaise... Répondis je blasée.

- On raconte que tu as fait du mal à ce pauvre Henry ! Vraiment... tu ne pouvais pas juste rester loin de chez nous ?

- Ellie, je comprends que tu ne m'aimes pas beaucoup, mais je t'en prie crois moi je n'y suis pour rien dans cette histoire !

- C'est ce qu'ils disent tous avant que les mensonges et les secrets ne refassent surface.... Me lança-t-elle en partant d'un pas rapide.

- Ne t'énerve pas Blue... ne t'énerve pas ! Récitai je à voix basse alors que je finissais de nettoyer la sépulture.

Une fois fini, je m'en allai en direction du commissariat. Il fallait que je puisse parler à Bryan, d'une manière ou d'une autre. Lorsque je mis les pieds à l'intérieur, Lucinda, la secrétaire d'accueil vint me prendre dans ses bras d'un geste tendre. Elle me conduisit au bureau de Bryan qui, d'après les traits tirés de son visage, semblait lui aussi fatigué.

- Bryan ... Commençai-je. Comment vas-tu ?

- C'est à moi de te poser cette question. Répondit-il. Eric nous a informés que tu n'allais pas bien ces derniers temps. Je suis désolé de ne pas être venu te voir. La disparition de Wilson nous a tous retournés. Et puis il y a cette pauvre Helen...

- Ne t'en fais pas pour moi. Mais j'en déduis qu'il n'y a toujours pas d'indice ?

- C'est exact. Pas d'empreinte, pas de corps, pas de témoin, pas le moindre foutu indice sur l'endroit où il pourrait se trouver.

- Je vois... Dis, ça va te paraître étrange mais est-ce que les chiffres 9 et 15 te disent quelque chose ?

- 9 et 15 ? Ça pourrait correspondre à tout un tas de choses... un numéro de rue, une date, un code... Mais pourquoi cette question ?

- Disons qu'une voyante m'a donné ces chiffres. Et j'ai comme la sensation qu'ils pourraient être reliés à Henry ou Dwayne Abberline.

- Ça me paraît ridicule mais je vais voir si je trouve quelque chose... C'est la seule chose que nous puissions faire à l'heure qu'il est.

Évidemment je lui avais menti. Comment aurait-il réagi si je lui avais avoué la vérité ? Il m'aurait certainement prise pour une folle ! Je quittai le commissariat tard dans l'après-midi et la nuit commençait déjà à tomber. Lorsque je rentrai à la maison, Eric m'attendait, l'air renfrogné et les bras croisés. Encore des ennuis en perspective...

Mot de l'auteure:

Enfiiiiin il était temps que mon blocage finisse !!! Nous revoilà repartis pour retrouver Wilson.... Ou pas ? 😋

Secrets ( 1ère Partie )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant