"Dis-moi que vois-tu ?" dit-elle en le fixant du regard.
"Je vois la vérité enfin..." répondit-il.
Vous venez d'assister à l'échange le plus sincère sur cette Terre pour l'instant, que les dieux en témoignent.
Tu n'as pas la splendeur de l'or, ni le goût subtil de la pastèque mais tu avais ce truc, cette chose, ce bidule pour quoi j'aurais tout mis en l'air pensait fortement Lucie.
Cette jeune femme, débutant sa vie dans l'écriture, était tombée d'un étage quand son couple s'est écroulé suite à cet instant. En vérité, de plusieurs immeubles.
Elle s'y voyait déjà, vieille, son propre livre prenant la poussière sur l'étagère et ses petits-enfants rusant pour lire ces mots interdits. Et bam ! Seule elle devenait.
Jolie comme un cœur elle était, jamais, jamais non, elle n'aurait pensé à vivre ce moment. Assise sur cette chaise, à procéder à un interrogatoire à ce jeune homme inconnu pour savoir s'il allait passer les décennies à venir avec elle ou juste une nuitée.
Buvant une gorgée de ce vin de basse qualité, elle repensait à ses derniers mots dans son carnet d'écrivaine : "la fin n'est au final qu'un banal début" et elle eut envie de s'enfuir aussi fort de ce bar que de retrouver son véritable amant égaré. Elle réussit à manifester un appel sur le téléphone de l'inconnu qui a dû partir dans la précipitation , pour le plus grand bonheur de notre Lucie.
Elle prit donc le volant de sa petite voiture et rentra à toute vitesse chez elle, coucher sa déception sur le papier fin de son carnet abîmé par ses balades en ville. Elle manqua de renverser une poubelle dans la hâte mais elle n'en avait que faire, les mots montaient plus vite qu'un orgasme bouillonnant en elle.
Une fois dans son appartement, son fidèle chien vint la voir sentant son chagrin, mais ce fut une tentative d'attention vaine car Lucie devait ÉCRIRE. Elle farfouilla dans le chantier et sorti son bon vieux carnet et chercha un crayon décent pour y écrire : "parfois il vaut mieux une fin nette qu'un début indéfini"
Sans s'en rendre véritablement compte, elle sortit son téléphone de sa poche et composa le numéro d'Axel, le fameux voyeur de vérité. Elle appela en se servant un shot de tequila, sans réponse. Je suis surement bloquée par son opérateur songea-t-elle. Je vais tenter par mail.
Le mail commençait ainsi :
"Cher Axel,
C'est Lucie, tu n'as pas vu la vérité, tu as vu ta vérité.
La vérité universelle n'existe pas tout comme une fin nette et définitive.
S'il te reste un peu de jugeotte pour tous nos moments de débat retrouve-moi au parc demain à 15h, même banc, même arbre, même lac, tu connais la chanson.
J'anticipe, ce n'est pas que l'alcool qui parle !
Je t'embrasse, à demain, je l'espère de toute mon âme."
Elle n'osa pas appuyer sur envoyer avant le troisième shot et une fois le mail parti, elle se fit couler un bain de lait et de sel. Elle avait grandement besoin de se purifier de cet homme au bar et de ses prétentions d'une bassesse indécente pour elle. Non elle n'était pas supérieure, juste éclairée aux mystères de ce monde dont cet individu ignorait tout.
Plongeant un pied dans son bain, elle vit la lumière de son téléphone éclairer la pièce tamisée. Ce fut Axel qui répondit "Je suis en couple Lucie... Tu me fais de la peine. Adieu"
"Il est marrant cet idiot de dire adieu alors qu'on se croise tous les jours devant ce fichu banc à 8h28 précise, ce n'est qu'un vieux au revoir mal calculé" chuchota notre protagoniste.
Elle manqua de se noyer de peu en s'endormant dans l'eau glaciale de la baignoire...
8:28 le lendemain = Axel était au bras d'une jolie blonde tenant un thé brûlant. Leurs regards se croisèrent et Lucie s'assit sur le fameux banc, pour y écrire dans son ami le journal "je hais les blondes et je hais le thé, je crois que ce qu'il n'aimait pas c'était juste moi et non ma supposée erreur"
Axel remit son bonnet correctement, la vue de Lucie dans cette jolie robe avec son éternel sac à dos le troubla. Il ne voulait pas la convaincre elle que la relation était finie en marchant auprès de sa petite amie mais bien lui. "Pourquoi a-t-elle embrassé cette fille ? Pourquoi m'a-t-elle trahi lâchement ? Quel gâchis !"
Il lâcha tendrement le bras de la jolie jeune femme et monta les marches de l'immeuble de l'agence de voyage en pestant. Il n'avait jamais pu lire que dans ses yeux et non son journal. Le fameux carnet de Lucie qui le tourmentait venait de lui faire rater une marche et l'étage numéro 4 riait en silence. "Eh bien, ça commence parfaitement bien" lança-t-il assez fort pour que les étages alentours entendent correctement.
Il sorti son téléphone et supprima le numéro d'un homme qu'il avait rencontré au bar, l'inconnu de Lucie, il avait saboté son plan de la veille par pure et dure jalousie. Il connaissait ses goût et ce type n'était même pas en bas de l'échelle se dit-il.
15h, le banc habituel = Un carnet se trouvait posé là, avec un stylo rose fluo. Axel s'asseyait et ouvrit le carnet. Il lut :
"Axel, c'est Lucie, tu ne trouveras rien de pertinent dans les autres mots que j'ai pu lentement penser et écrire sur les autres pages. Ici tu sauras. La vie n'existe que s'il y a quelqu'un a aimé. Je pars. Je peux cette fois te dire adieu et non au revoir petit idiot on ne dit pas adieu à une dame si on la croise le lendemain matin ! Enfin bref, vas à la page 49 du carnet. Adieu. - Lucie"
Axel se hâta à la fameuse page 49 où était inscrit les mots "parfois il vaut mieux une fin nette qu'un début indéfini. J'ai aimé, merci. Maintenant je hais. Je crois que je vivais."
Il leva la tête et la chercha du regard, jamais elle n'aurait abandonné son journal, elle ne l'aurait même pas laissé sans surveillance. Ne la voyant pas il courra jusqu'à son appartement où une vieille dame en pleurs lui ouvrit. L'appartement était sans dessus dessous mais c'était habituel...
La femme tapa contre la poitrine du beau brun en hurlant "c'est de ta faute !"
Son téléphone vibra, il le déverrouilla et vit un mail de Lucie :
"Axel,
Je suis partie tu hérites de mon journal, publie-le en ton nom tu gagneras quelques euros.
Tu sais ce que je veux et où je suis
Ton ancienne Lucie"
Il leva les yeux, les joues remplis de larmes et le regard vide, il tendit le journal à la vieille dame en disant "c'est de sa faute, de la mienne, de la notre. Je n'étais pas et maintenant je suis, je sais"
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Micro Nouvelles 🖤
Ficción GeneralJe parle de micro-nouvelle à propos de plein de sujet, de mes passions, d'histoires sortants de mon imagination