Mon regard était rivé sur l'imposant tableau des scores, suspendu au centre du stade, annonciateur d'un match à sens unique. Il s'actualisa sous mes yeux, passant désormais à 6-0. Le ballon, logé à toute vitesse au fond du filet quelques secondes plus tôt, retomba au sol, aux pieds du gardien de but dépité. Le coup de sifflet final retentit, terminant la rencontre, se démarquant du brouhaha général provoqué par les supporters, et des cris de joie des joueurs victorieux. Les onze autres, s'effondrèrent de fatigue, ou se recroquevillèrent par terre, comme pour ne pas voir la terrible vérité en face, celle d'une élimination prématurée.
Je pouvais imaginer la sueur de leurs corps bouillants et leurs larmes incontrôlables nourrir la pelouse du terrain, se délectant d'une certaine façon de leur déception. Certains s'isolèrent afin de digérer seul cet échec, tandis que d'autres se rapprochèrent de leurs coéquipiers pour leur tendre la main, et surmonter cette épreuve comme une équipe.
À ce moment précis, que pouvaient-ils ressentir ? Sans doute de la tristesse et de la frustration, mais nos premières pensées sont toujours plus complexes et impulsives, n'étant pas influencées par un quelconque recul, celui-ci permettant de déterminer si un sentiment est légitime ou non. Cela devait être le dégoût d'être humilié malgré tant d'efforts, la colère de ne pas avoir été meilleur, la déception d'avoir raté une action qui aurait pu être décisive, la haine d'être tombé dans une équipe faible qui n'était pas à la hauteur, ou même le soulagement que ce calvaire de 90 minutes soit enfin terminé.
J'avais certainement raison sur chacun de ces points, car ces joueurs, je ne les connaissais que trop bien, à force de les analyser à chaque match, pendant une heure et demi, scrutant leurs passes, leurs tirs, leurs dribbles, les arrêts du gardien, le pressing des défenseurs, et leurs techniques spéciales. Il me suffisait de les observer sur le terrain pour déterminer s'ils étaient plus performants que d'habitude, ou si au contraire ils n'étaient pas en forme.Tout cela, je ne le faisais pas en tant qu'entraîneur, ni en tant que manager, mais en tant que simple remplaçant, et ce depuis le jour où j'ai rejoint ce club de foot, il y a maintenant plus de 2 ans. C'était pour moi la meilleure manière de contribuer à cette équipe, mon équipe, en attendant la possibilité de participer pour la première fois à une rencontre officielle.
Malheureusement, cette défaite signait la fin de notre progression dans ce tournoi, et en tant que 3ème année, il s'agissait de ma dernière compétition dans ce club avant l'obtention de mon diplôme. Cette opportunité, que j'attendais désespérément depuis tout ce temps, était donc destinée à ne jamais se présenter.
Je ne savais pas quoi penser. N'ayant pas joué, avais-je le droit d'être déçu ou en colère comme le serait légitimement un titulaire ? Avais-je le droit de penser égoïstement que le résultat aurait pu être différent si j'étais entré ? Probablement pas. Il est même possible qu'au fond de moi, le fait de ne pas avoir été acteur de cette écrasante conclusion me rassurait, et me dédouanait de toute responsabilité.
Est-ce que je faisais réellement partie de cette équipe ? N'était-il pas préférable que je sois dans le staff, ou que je change d'activité ? Toutes ces questions trottaient dans ma tête. Je ne disposais d'aucun talent particulier, d'aucune technique spéciale, ni de connaissances spécifiques sur le football, et je n'ai même pas véritablement de poste défini.
En effet, il est arrivé à plusieurs reprises que l'on me demande quelle était ma position, en apprenant que j'étais dans le club de mon collège. À chaque fois, je ne savais quoi répondre.
Devais-je indiquer celle qu'on m'a officiellement assignée à la fédération par défaut, lorsque notre entraîneur nous a inscrit au tournoi ? Dans ce cas, il s'agissait de gardien de but, car nous n'avions personne d'autre à mettre au cas où notre titulaire serait absent, et qu'une équipe sans second gardien aurait fait mauvaise impression.Devais-je parler du poste que j'ai toujours souhaité occuper, même si je n'en avais jamais encore eu l'occasion ? C'était sans contestation possible celui de milieu de terrain. Faire le lien entre tous les autres membres de l'équipe, construire le jeu offensif, être au centre des stratégies et instaurer un équilibre sur le terrain, c'était ce que j'aimais. J'admirais les grands joueurs à ce poste, et je m'entrainais sans relâche depuis des années sur mon jeu de passes et mes dribbles, dans l'espoir de m'en servir un jour.
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Inazuma Eleven : Tower of Nostalgia
Fanfiction40 ans après les événements d'Inazuma Eleven, un collégien en troisième année du nom de Kimura Masato, remplaçant d'une équipe prématurément éliminée du tournoi national Football Frontier, a soif de prouver sa valeur. Lorsqu'un riche homme d'affaire...