🌙 Chapitre 1 - La Renaissance

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Pour un moment en totale immersion, je vous invite à écoute cette musique durant votre lecture.

commencez la lecture à 6.44 min : https://www.youtube.com/watch?v=O8D-2Vh2ivw&t=2920s


Le lycée... ce théâtre de mensonges grimés en souvenirs dorés.

Driiiinnnng.

Des bavardages, des rumeurs, des illusions. Chacun y va de sa grande histoire estivale : Saint-Tropez, Saint-Barth, les Hamptons. L'un vante sa colonie de vacances "inoubliable", un autre affirme que son camp militaire l'a transformé.

Ou plutôt... qu'il a convaincu son père qu'il n'était pas gay, alors qu'il a couché avec son sergent d'instruction.

Ah, ces pom-pom girls qui jurent que leur régime à base de pommes est miraculeux, alors qu'on sait toutes qu'elles vomissent discrètement dans les toilettes depuis leurs douze ans.

Le lycée... j'en serais presque nostalgique. Si ce n'était pas ma dernière année.

Mais puis-je vraiment l'appeler ainsi ? Car cette année n'a plus rien à voir avec les précédentes. Pas quand je suis ici pour une raison bien différente.

Je les envie parfois. Cette innocence, cette légèreté. Leur plus grand drame ? Un examen raté, un parent trop présent, une université trop loin. Ils veulent prouver leur valeur, exister à travers le regard de parents qu'ils ne supportent plus. Et pourtant... ils ne savent pas encore ce que signifie vraiment perdre le contrôle.

Cette époque me manque. Celle où je pensais être incomprise, alors qu'au fond, nous étions tous paumés ensemble.

Cette naïveté. Cette douce illusion d'éternité.

Je l'ai connue. Je l'ai même méprisée. Mais aujourd'hui, elle me manque. Elle me brûle. Comme un poison lent, acide, qui ronge jusqu'au cœur.

Enfin... ce qu'il en reste.

Je suis devenue ma propre prison. Sans issue.

Adieu au bal de promo, aux soirées pizza, aux verres partagés dans un bar miteux. Si seulement tout cela avait encore de l'importance.

Mais non. La vie ne suit jamais le scénario rêvé.

Je me retourne. Mélody s'avance, parfaite dans sa tenue de sport-chic, l'air de défier le monde.

— Comment va, mon petit rayon de soleil ?

Je la fixe, blasée, et lâche dans un soupir :

— Et toi, Morticia des Enfers ? Toujours aussi dramatique ?

On se jauge du regard, puis nos sourires craquent. L'autodérision est notre langage secret.

C'est là qu'Emma débarque, me percutant avec la grâce d'un char d'assaut, vêtue de cuir noir, telle une guerrière.

Un corbeau.

Saviez-vous que le corbeau symbolise souvent la mort ? Un présage de malheur, de maladie. Une promesse de fin.

Un joli clin d'œil à notre quête. À notre promesse. À notre pacte.

Et comme une lumière soudaine dans un ciel trop sombre, Violette surgit, rieuse et enjouée.

— Vous ne devinerez jamais ! Peter Masbrow a sucé son sergent d'instruction pendant la nuit des médailles ! Il est gay, genre vraiment !

On reste figées. Yeux écarquillés. Silence.

— Je peux t'assurer que ce n'est pas énorme, lance Mélody avec un rictus. Mon cousin David l'a eu en bouche. Taille moyenne. Vraiment moyenne.

— Quoi ? Vous saviez et vous m'avez rien dit ? Dégueu ! J'avais un crush sur lui !

— Je te l'ai dit cent fois, mais tu n'écoutes jamais. Et depuis quand t'es homophobe ? s'agace Mélody.

— Mais je suis pas homophobe ! Juste dégoûtée, je fantasmais sur lui, voilà tout ! Lui, moi, et les gradins de baseball...

— Tuez-moi. Je n'ai pas assez de caféine pour ça, gémit Emma, reine incontestée du drame.

— Bon, mes trésors, dit Violette en arquant un sourcil dramatique, si on veut éviter le sermon de Miss Atchere, faudrait peut-être penser à bouger.

On éclate de rire.

À ce moment précis, j'y ai cru. Juste un instant. Que tout était encore normal. Qu'on était simplement quatre amies. Sans pacte. Sans pression. Sans fin programmée.

Puis la brûlure est revenue.

Brusque. Agressive. Comme un fer chauffé à blanc, enfoncé dans ma gorge. Mon cœur s'emballe, cogne à m'en faire exploser les tempes. Le monde devient flou, les sons s'étouffent. Je suffoque.

Je lève les yeux. Les filles aussi. Leurs visages se figent. Elles ressentent la même chose.

Et puis... on les voit.

Au fond du couloir.

Quatre silhouettes. Droites. Intouchables. Le couloir s'ouvre devant elles comme un tapis rouge de l'enfer. Leurs visages... ces visages. Ceux qu'on imaginait cachés sous nos lits, enfants.

Nos monstres.

La raison de notre chute.

Emma, Violette, Mélody et moi, on les fixe. Et on se rappelle.

Le pacte. La douleur. La rage.

Le feu qui couve encore sous nos cicatrices.

Leurs regards se posent sur nous, un par un. Lents. Cruels.

Et la partie commence.

Plus de règles. Plus de place pour les sentiments.

Juste la vengeance.

Et le goût du sang.

Leur sang.

Mais ne vous précipitez pas. Je sais, j'oublie souvent que vous ignorez encore tout. Comment quatre filles insouciantes sont devenues les monstres de leurs propres cauchemars.

Alors accrochez-vous.

Bienvenue dans l'histoire des déchus.

Les Anges DéchusTome 1 : Le Pacte des CendresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant