27 Novembre 2022, Londres.
Assise dans le petit canapé vert de son appartement Londonien, Annabeth parcourait la montagne de papiers qui s'amassaient sur sa table basse, un air concentré sur son visage. Les doigts serrés autour d'une tasse de thé qu'elle portait de temps à autre à ses lèvres pour en siroter le contenu, elle ne put retenir un violent sursaut lorsque son téléphone sonna, renversant par la même occasion une partie du breuvage tiède sur son jean. Avec un grognement irrité, elle saisit son téléphone puis, marqua un temps d'arrêt en apercevant le nom qui s'affichait à l'écran. Elle hésita l'espace de quelques secondes et, inspirant un grand coup, décrocha avant de prendre une voix faussement décontractée.
— Salut, papa ! Comment ça va ?
A l'autre bout du fil, l'homme - son père- s'inquiéta aussitôt.
— Qu'est-ce qu'il se passe, Anna ?
— Mais, rien du tout, pourquoi tu me demandes ça ?
— Tu as l'air tendue, en plus du fait qu'on arrive pas à te joindre, lâcha son père d'un ton bougon.
Jetant un coup d'œil en direction de la table basse, Annabeth tenta de ravaler le sentiment de culpabilité qui l'envahit aussitôt. Son père la connaissait beaucoup trop bien. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle elle avait évité la majorité de ses appels au cours des trois derniers jours. La jeune femme avait horreur du mensonge, et elle savait que si son père en venait à lui demander ce qu'elle faisait de ses journées depuis son arrivée en Angleterre, elle serait alors obligée de lui mentir.
Interrompant le fil de ses pensées, Jean Leclerc commença à s'impatienter face à son mutisme.
— Annabeth ?
Consciente que sans nouvelle de sa part, ses parents avaient dû être morts d'inquiétude, elle se mordit la lèvre inférieure et, rongée par les remords, prit une voix contrite au moment de répondre.
— Pardon papa, je vais bien, ne vous en faites pas pour moi.
— Elle est bien bonne celle-là, Anna ! Notre fille est dans un autre pays, toute seule qui plus est, elle ignore nos appels, et on ne devrait pas s'en faire ?
Comprenant que son père était bouleversé Annabeth s'empressa de s'excuser.
— Je suis vraiment désolée, papa, je te promets ! Je sais que j'aurais dû vous répondre, mais j'avais la tête ailleurs.
Bien que ce ne fut une raison valable, Anna le savait, c'était la stricte vérité. Elle avait bel et bien la tête ailleurs ces temps-ci, seulement elle se refusait de dire pourquoi à ses parents.
— Et, reprit son père. On peut savoir ce qui occupe tant, ma chère petite fille ?
Non, se dit-elle en rongeant l'ongle de son pouce. Elle ne pouvait pas dire à son père que, la raison pour laquelle elle ne les avait pas appelés, était qu'elle était trop occupée à écumer les pièces du dossier d'adoption qu'elle avait récupéré avant de quitter la France. Son dossier d'adoption. Cela les aurait détruits de savoir qu'elle avait fait cela dans leur dos, et elle ne pouvait se résoudre à leur infliger une telle blessure. Ils avaient été si bons et aimants envers elle, et étaient les meilleurs parents qu'un enfant aurait pu souhaiter. Alors, la boule au ventre, elle mentit.
— Je me préparais pour le début des cours, on a tellement de papiers à remplir, de choses à acheter, c'est de la folie.
Son père gardant le silence, elle poursuivit d'une voix enjôleuse.
— Tu sais bien que jamais, je ne vous ignorerais volontairement, papa.
Quelle menteuse elle faisait, pensa-t-elle en fermant les paupières sous le poids de son mensonge. Jean Leclerc laissa échapper un reniflement dubitatif.
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Annabeth's Origins
Historical FictionLe 28 novembre de l'année 1825, la vie de Miss Annabeth Wolseley-Jenkins, une demoiselle anglaise alors âgée de trois ans et demi, bascula. Enlevée lors d'un séjour à Paris avec ses parents, la fillette ne fut jamais retrouvée, et son nom ne fut plu...