Trois Mois À Vivre...

73 9 3
                                    

Chapitre 1 :

Vous savez, je m'en doutais.

Je me rendais bien compte que sortir de l'hôpital dans ma condition ne pouvait signifier qu'une seule chose.

Quelle condition, me direz-vous?

Je n'ai pas envie de l'évoquer. Je ne veux pas consacrer une seconde de plus à ma maladie. Elle ne mérite pas mon temps...

Je veux passer les trois mois qu'il me reste à vivre et non pas à attendre ma mort.

Chapitre 2 :

J'ai 15 ans mais j'ai l'impression de ne pas avoir vécu.
Je veux dire vivre, vraiment.
Quand on sait que la mort est proche, on fait souvent son introspection.
À l'article de la mort, on se remémore les instants marquants de sa vie. Quelle vie ?
J'ai connu des moments de joie, évidemment...

Il faut dire que tout était bien parti pour moi, avant tout cela.
J'avais une famille, de bonnes notes à l'école et une passion : l'écriture.
C'est ce que je voulais faire de ma vie, écrire, avant qu'elle ne s'invite et brise tous mes rêves...

Qui "elle" ?
La maladie.

Alors, j'ai attrapé un vieux journal et j'ai commencé à écrire.
Ecrire quoi ?
Pas grand chose...
C'est vrai, après tout, qui à quinze ans peut se permettre d'exposer ses opinion sur le monde ?
Personne...

J'ai toujours aimé écrire.
Toujours.
J'ai toujours aimé écrire d'aussi loin que je me souvienne.
Et, pourtant, c'est quelque chose que j'avais perdue ces derniers temps.
Et, ça m'est revenu, à ce moment-là de ma vie.
Ça m'est revenu, comme si, écrire c'était laisser sa trace, c'était refuser l'oubli auquel la mort allait me condamner bien assez tôt...

Chapitre 3 :

Cela fait cinq mois que je n'ai pas mis les pieds au collège.
Je suis en troisième.
Mon frère, mon grand frère, m'a dit que je ne perdais rien...
J'ai du mal à le croire.
Oui, le collège, ce n'est pas le meilleur endroit au monde mais il y a les amis, mes amis.
Ils étaient là.
Toujours.
Ils sont venus me voir à l'hôpital.
On s'amusait et je m'évadais.
Et, puis, j'ai coupé les ponts. J'ai arrêté de répondre à leurs messages, à leurs appels.
Je ne veux pas qu'ils souffrent à cause de moi.
Ma mort approche et eux méritent de vivre une vie d'adolescents.

Chapitre 4 :

Kaï.
C'est le prénom de mon grand frère.
Il est en terminale.
Il a été là quand ma vie a basculé et il est toujours là.
Il a refusé de m'abandonner alors même que j'ai cherché à m'éloigner de lui pour qu'il ne souffre pas.

Il est courageux. Moi, je ne m'imagine pas passer le bac après avoir appris la mort de ma sœur. C'est pourtant ce qui l'attend.

Chapitre 5 :

Je n'écris pas tous les jours.
J'écris quand je peux.
Le temps passe.
Il me reste deux mois et demi.
À vivre.
À survivre.

J'aimerai, et ma mère m'a proposé, de partir faire un voyage pour découvrir le monde avant de le quitter...
Mais je ne peux pas, mon corps est fragile.
Il est trop fragile.

Je suis au lit la plupart du temps, un crayon à la main, dès que je peux. Je m'ennuie.
Il me reste peu de temps à vivre et encore moins d'occasions d'en profiter.

Chapitre 6 :

J'écris peu.
Mes textes sont courts, décousus.
Je me sens seule.
J'écris pour avoir le sentiment d'exister.
Pourtant, je sais que je ne suis pas seule.
J'ai une famille formidable à commencer par ma mère.
Ma mère est professeur.
Ma mère est professeur de mathématiques.
Elle a toujours été là pour moi.
C'est quelqu'un de formidable.
Elle dit toujours que l'amour est inconditionnel, qu'on n'a pas à le mériter ou à faire quoi que ce soit pour l'obtenir.

Alors, je me demande : Pourquoi est-ce que mon corps ne m'aime pas ?

Chapitre 7 :

J'ai 15 ans.
Je n'ai pas l'âge de mener des réflexions profondes sur la vie...
Le temps passe très vite.
Trop vite.
Je n'ai pas beaucoup écrit.
Il me reste deux mois à vivre...

Trois Mois À Vivre... Où les histoires vivent. Découvrez maintenant