Partie 13

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    Bien qu'ayant été ferme sur sa décision de quitter le domicile conjugal de son amie, Esther n'avait réussi qu'à encaisser un refus total de la part de cette dernière qui lui répéta comme une information, qu'elle serait désormais obligée de passer ses nuits avec elle jusqu'à ce que Lewis revienne. Car Jemima ne voulait nullement laisser son amie sans protection. Elle se disait qu'elle en parlerait plus tard à Léo, lorsqu'il sera libéré.

       Six jours étaient passés depuis cette résolution. Le fouet en main qu'elle n'arrêtait pas de retourner avec force dans l'assiette contenant la farine, Jemima revit avec nostomanie le jour où Léo était sorti de prison.

        Il était quatorze heures et la chaleur de la ville de Bamako s'enfonçait dans ses gènes. Munie d'une robe jaune en bretelles et Arrêtée là, à l'entrée de la prison, elle regardait avec grand enthousiasme quelques prisonniers sortir à la rencontre de leurs familles. Certains serrèrent à tour de rôle dans leurs bras, chaque membre de leur famille présents et d'autres s'en allaient immédiatement, n'ayant personne pour les accueillir. Léo faisait pour son plus grand bonheur parti de la première catégorie de personnes. À sa droite, Jemima sentit son amie lui reffaucher la main comme pour l'encourager. Elle ne put s'empêcher de lui sourire. Même si ce sourire n'exprimait en rien les sentiments qu'elle ressentait, au moins il donnait bonne impression.

  Un peu plus loin d'elles, souvrirent pour la énième fois, les portes de la prison et à Léo de sortir à leur rencontre. 

           Jemima était sous le choc en le voyant. Elle n'y croyait pas et lorsque la douce main de celui-ci lui frôla la peau, ses larmes s'invitèrent à sortir de leur écluse. Il avait beaucoup changé. Ses cheveux si soigneusement coiffés étaient en embuscade et ses vêtements semblaient à présent lui avoir été prêté par un homme beaucoup plus robuste que lui.

     Contre toute attente, et sans vraiment comprendre pourquoi, elle recula légèrement lorsque finalement, son époux lui embrassa la joue mais vite, elle rattrapa son erreur en l'enlassant. Ensuite, vint le moment pour Esther de se faire saluer.

 Ce moment avait tout pour être joyeux sauf que la culpabilité n'arrêtait pas de ronger Jemima. Elle avait encore plus sombré en se souvenant que jusqu'à lors, elle ne s'était toujours pas rappelée du moment où l'homme de la soirée et elle avaient dû passer à l'acte.

    Comment ne pas être triste lorsqu'elle savait désormais être exposée au SIDA ou a une grossesse non désirée ?

    C'est dans un silence de mort qu'ils étaient rentré à la maison. Léo mourrait d'envie de savoir comment son épouse avait pu trouver une aussi grosse somme pour payer l'amende mais etouffa cette idée en voyant Esther passer la nuit avec eux. À compté de ce jour, Léo passait assez de temps dehors, à essayer de trouver quoi faire. Il sortait presque toujours très tôt pour rentrer dans la soirée.

       D'un geste souple, Jemima ouvrit le frigo pour en retirer un glasson  qu'elle engloutit dans sa bouche alors que des pas se rapprochèrent d'elle. C'était Léo et elle le savait, sauf qu'elle n'avait pas envie de lui parler. La veille déjà, qu'il lui avait demandé de faire partir Esther de leur maison soit disant parce qu'elle violait leur intimité.

    Jemima avait du mal à reconnaître son mari. Il devenait vraiment un autre homme. Pendant les premiers jours, elle avait mis cela sur le compte de la difficile vie qu'il avait dû passer en prison mais s'était vite aperçut qu'il n'aimait en fait pas Esther.

         
        -- Bien dormi ? Prit-elle finalement la décision de lui demander.

        -- Bien réveillé je dirais et cela, depuis que je t'ai vu.

        -- C'est alors une bonne chose.

        -- Tu parles très peu ces derniers temps, fit remarquer Léo, le regard totalement vautré sur son épouse.

    Jemima alluma le four, puis après avoir déposé à l'intérieur la farine, le referma. Ensuite à l'aide d'un savon, se lava copieusement la main. Pendant tout ce temps, Léo qui n'avait cessé de la regarder croisa désormais les bras toujours dans l'attente d'une réponse.
     
   -- Que veux-tu que je te dise puisqu'à chaque fois qu'on discute normalement, tu finis par me proposer de chasser mon amie d'ici.

    -- Je ne te demande pas de la chasser.

       -- Ok.

      -- Elle ne m'inspire vraiment pas confiance cette Esther là, je voudrais que tu arrêtes de marcher avec elle.

      -- Tu ne l'a connais pas, tu ne sais même pas tous les sacrifices qu'elle a fait pour m'aider lorsque tu étais en prison et l'argent qu'elle m'a remis pour compléter ta caution alors ne te base pas sur de simples pressentiments pour la juger.

        Léo s'abstint d'objecter. Il se retourna au salon et sa femme en manque d'occupations de mit à laver les quelques assiettes utilisés pour la préparation. Elle pouvait à présent souffler, car Léo lui était d'un grand stress à présent. Dire qu'elle avait prévu de lui avouer sa tromperie, cela allait devoir attendre encore un peu que tous soient rangés dans l'ordre.
     Dix minutes après, elle vérifia la cuisson de la pizza avant de prendre une banane au réfrigérateur pour combler le petit creux qu'elle commençait à ressentir.

        -- Tu penses que la pizza sera prête dans combien de minutes ? Demanda Léo, une fois de retour dans la cuisine.

         -- Environ dix minutes, je pense.

         -- C'est compris, conclut-il en sortant du lieu.

     Esther qui était réveillée depuis peu, se dirigeait justement au salon. Lorsqu'elle vit Léo, elle laissa légèrement tomber le bras mince du haut qu'elle portait et le dépassa avec un sourire satisfait, voyant qu'il avait été stupéfait par cet acte.

         Une fois la pizza prête, Jemima servit trois tranches accompagné d'un verre d'Orangina à Léo. Trois tranches à Esther et mangea une tranche elle aussi, avant d'aller se laver pour le boulot.
     
  Dès sa sortie de la salle de bain, elle vit Léo qui l'attendait les bras croisés. Il semblait se répéter des phrases dans le but de calmer la colère qui le consumait.

     -- Combien de temps va t-elle encore fait dans cette maison ? Lança t-il à sa femme.

         -- Encore ce sujet ?

       -- Ton amie essaies de me séduire,  Ma vie, ouvre les yeux. Cette fille n'est pas clean.

      -- C'est la meilleure, fit Jemima dont les traits du visage commençaient à s'irriter. Dans le but de fouttre mon amie à la porte tu inventes maintenant des raisons ? Je ne vais pas t'écouter.

    -- D'accord mais je ne veux plus voir cette femme dans ma maison.

     -- Que veux-tu que je fasses ? Que je la laisse seule alors qu'elle a besoin de moi?

      -- Qu'elle se prenne une chambre d'hôtel ou n'importe quoi mais pas ici.

   Voyant qu'elle avait oublié sa crème pour le corps et ne voulant plus continuer cette discussion, Jemima entreprit de retourner en salle de bain, mais pas sans avoir d'abord lâché une dernière réplique.

       -- Il me semble que tu as quelque chose contre Esther, avoua t-elle comme un reproche.

     -- Tu refuses de voir les choses en face et cela.....non laisse tomber. Abandonna Léo en s'asseyant sur le lit. Un jour tu comprendras.

     

      

Si seulementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant