Gagner sa place.

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09h18.

Cela fait des années que je ne suis pas restée aussi longtemps au lit, le matin.

L'une des bases de notre éducation très stricte, c'est qu'on nous a habitués dès le plus jeune âge à être des lève-tôt.
D'habitude, je suis le genre de personne qui, dès qu'elle ouvre les yeux, prends quelques secondes pour remettre ses idées en place, pour ensuite sauter hors du lit.

Mais aujourd'hui, je ne ressens pas la motivation habituelle qui me poussait à sortir de mon doux cocon chaud.
Aujourd'hui je voudrais disparaître entre mes draps et oublier ce qui s'est passé hier.

Mon Dieu! C'était juste horrible.
Voir Tala et Doudou se battre comme des gamins m'a fait réaliser une chose qui m'a choquée au plus haut point et que je suis pas sure de réaliser totalement...

C'est justement la raison pour laquelle je n'ai pas réagi sur le coup, je me suis figée comme une statue et les ai regardé se déchaîner l'un sur l'autre.

Il a fallu que mes frères sortent, alertés par le vacarme et qu'ils essaient de les séparer.
Même mon père est sorti voir ce qui se passait, mais bizarrement il n'a pas eu l'air surpris une seconde. Il a attendu qu'ils soient séparés pour dire d'une voix toute calme:
« - Mourtalla Abdoul Fatah Fall, Mohamed Faye, suivez moi tous les deux et sans bruit. Je vous préviens, c'est aujourd'hui que je vais savoir si vous me respectez ou non ».

Doudou a levé les mains aux ciel en signe de trêve et Tala fulminant, de la fumée sortant presque de ses narines ; j'exagère à peine ; s'éloigna légèrement de lui.
Mes frères restèrent sur le qui-vive, entre eux, à l'affût d'une nouvelle attaque, de la part de Tala surtout.

Moi, j'étais tétanisée, comme flottant dans une sorte de songe, honteuse et extrêmement choquée, me trainais derrière eux, sans vraiment réaliser ce que je faisais.

Je voyais les épaules de Tala qui bandaient si bien que les muscles de ses omoplates saillaient à travers son tee-shirt.
Je le connaissais suffisamment pour savoir que cela faisait des années qu'il souffrait de douleurs musculaires, depuis son incarcération en fait.
Il arrivait que ses crampes lui fassent tellement mal qu'il ne puisse pas bouger durant des heures, se mordant les lèvres pour ne pas hurler de douleur.

Une fois...
Une fois je l'ai eu en pitié , j'ai essayé de l'aider en lui faisant un massage pour relaxer ses muscles. Ça avait bien fonctionné, mais ce petit moment d'intimité nous avait conduit dans une situation qui me fait toujours autant honte.
Nous nous sommes retrouvés presque nus, à nous enfoncer dans cette pseudo relation toxique qu'on appréciait si bien...

Alors je ne comprenais pas qu'il se mette dans un état pareil au risque de se faire mal.
Pourquoi avait-il fait ça justement ? Par jalousie ?
Certainement pas , Il faudrait qu'il tienne à moi avec sincérité pour être jaloux.
Non, c'est plus qu'il sent de plus en plus son contrôle sur sur attachement plus que toxique lui échapper.

Je n'étais pas sûre de le prendre en pitié en ce moment là .

Il avait foutu en l'air ma soirée de toutes les façons possibles.

Doudou se tourna pour jeter un œil vers moi, nos regards de croisèrent et je baissais le mien, honteuse.
Tout cela était de ma faute, je l'avais plongé dans cette situation stupide sans qu'il n'ai rien demandé.

Tout ce que je voulais, c'était une soirée au calme avec lui, ça m'apprendra à ramener mes rencards à la maison.

Et dire que je lui avais promis de lui prouver que c'est avec lui que je veux me marier...

Je le sentis ralentir un peu, jusqu'à ce que j'arrive à son niveau, et je le sentis glisser sa main dans la mienne.

Je relevais la tête, toujours aussi honteuse , pour le regarder, histoire de le laisser lire sur mon visage à quelle point j'étais navrée pour tout ça .

Pardon mais... pas sans toi ( Nouvelle)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant