Partie 15

66 17 29
                                    


Lorsqu'il entendit son patron prétendre vouloir lui parler de choses qui n'ont aucun lien avec le travail, le regard de Franck vira immédiatement dans une incompréhension totale. Seraient-ce des reproches sur sa personne ? Sur sa conduite en lieux publics ou sur sa timidité que Lewis Dakouo comptait lui faire ?

Même en franchissant le rez-de-chaussée de l'hôtel, il n'était arrivé à retirer ces questions de sa tête. Ses pas s'ecrasèrent lentement contre le sol dans un bruit assourdissant. Les yeux en avants, il aperçut de loin une Rolls-Royce bleu ciel lui faire des bruits de klaxon. Il doubla donc de vitesses jusqu'à atteindre l'engin en quelques secondes. De l'intérieur, Lewis l'attendant d'une vive impatience ne put que se réjouir de le voir arriver dans sa chemise jaune ciel à la culotte blanche si soigneusement choisi alors que lui, c'était juste contenté de garder la tenue vestimentaire de sa dernière réunion passée. Un costume trois pièces grisâtre.

-- Merci d'être venu Franck, dit Lewis à la rencontre de son responsable alors que ce dernier prit place dans le véhicule.

-- Ce n'est pas grand chose monsieur. Que me vaut l'honneur de cette invitation ?

-- Attend que je te serve d'abord à boire.

Lewis prit deux bouteilles de champagne et deux verres dans une glacière posée dans coffre de la voiture. Il s'apprêtait à servir Franck lorsque celui-ci refusa catégoriquement, préférant effectuer cette tâche lui-même.

-- Ne t'inquiète pas. Je peux le faire, insista Lewis.

Franck dejoua calmement, laissant son patron à l'œuvre. Après un merci balancé avec prudence, il but rapidement son champagne, sans pour autant détourner les yeux de Lewis. Ce dernier avala aussi le contenu de son verre avant de s'exprimer.

-- J'aimerais offrir un cadeau à ma petite amie puis lui refaire une demande en mariage mais je ne sais vraiment pas trop comment m'y prendre. La dernière fois que j'ai fait le pas pour la demande, les conditions n'étaient vraiment pas favorables pour elle et cette fois-ci j'ai envie que cette demande soit inoubliable. Confia t-il. Et pour être franc, j'aimerais avoir un avis extérieur, le tien par exemple, histoire de mettre toutes les cartes de mon côté. Alors que peux-tu me proposer ?

-- Euh, fit Franck confus.

Il ne s'attendait pas à un questionnaire mais il faut dire qu'il le préférait à des reproches.

-- Je crois qu'il serait judiciable que vous demandiez directement l'avis d'une femme. Elle saura mieux que moi vous donner des suggestions sur ce qui peut lui faire plaisir en tant que femme. Vous pourrez par exemple demander conseils à mon jumeau.

-- Zeinabou? Tonna Lewis.
Ah mais oui, pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt ? C'est excellent cette idée.

-- Oui en plus, nous connaissons très bien la ville de Gao. Ainsi elle pourra vous guider si possible, continua d'éclaircir Franck.

Lewis trouva très réaliste l'opinion de son auxiliaire. Il lui demanda donc de faire appel à sa sœur qui les rejoignit presque immédiatement après le coup de fil. Elle portait comme à ses habitudes vestimentaires une longue robe de couleur rouge ainsi qu'un foulard blanc. C'était en effet une amoureuse des foulards qui adorait ses vêtements modestes. Et son magnifique sourire l'accompagnait toujours pour ses sorties avec son jumeau.

Zeinabou salua les deux hommes puis son frère entreprit de lui donner des nouvelles. Alors qu'ils échangeaient, Lewis se mit à observer discrètement le contour de ses yeux qu'il trouva pareil à ceux de Franck. Ensuite sa curiosité le poussa à lui demander si elle pouvait l'aider à trouver une bijouterie.

-- Oui, j'en connais une à quelques mètres d'ici. Répondit Zeinabou.

Son frère lui lança un regard complice. Rassurée ainsi, elle accepta d'accompagner son patron au lieu indiqué alors que lui Franck, allait rentrer terminer le programme de leurs derniers jours à Gao.

Une heure plus tard, le véhicule stoppa sa lancée devant une petite bijouterie située dans un quartier chic et propre. Celui où Zeinabou avait passé son enfance. La vue du rond-point lui rappela encore des fois où fuyant le bain du soir, elle se pressait chez son amie Olivia, à l'autre bout de la rue et un sourire prit vie en elle.

Les deux jeunes gens descendirent et entrèrent dans la bijouterie. Là, Lewis après avoir demandé conseil à zeinabou, fit sa commande.

-- Une bague contenant un petit cœur en diamant sur son centre ? Cette commande coûte une fortune monsieur. S'exclama le bijoutier, ébahi.

-- Oui mais la femme que je veux épouser vaut mieux que tous les diamants du monde. Elle vaut la planète toute entière et mérite vraiment cette bague.

Sur ces mots, le bijoutier n'ajouta rien et se contenta à l'aide d'une page de son cahier à dessin, de produire plusieurs types de bagues qui pourraient plaire à son client. Et à chaque fois qu'il exposait son travail, Lewis tournait la tête pour avoir un avis de Zeinabou. Finalement, il opta pour le dernier dessin proposé. Il s'agissait d'une fine bague comportant tout au centre, les lettres L&E contenus dans un petit espace où serait taillé le diamant.

Comme elle avait les doigts plus épais  que ceux d'Esther, Lewis demanda à Zeinabou de bien vouloir accepter de les faire mesurer pour la fabrication de l'alliance.

Quatre heures plus tard, la bague était prête. Elle brillait de mille feu et n'inspirait que beauté et splendeur. Un chèque fit signé puis Lewis rentra à l'hôtel avec Zeinabou, la remerciant au passage pour son aide et sa disponibilité, puis il lui offrit deux place pour un grand restaurant de la ville. Elle aurait ainsi le droit d'y aller avec celui ou celle qu'elle voudrait.

-- Merci beaucoup monsieur. Lui dit-elle en guise de reconnaissance.

-- Non c'est plutôt à vous le merci. Retourna Lewis.

-- D'accord monsieur.

-- Et aussi à votre frère.

-- D'accord monsieur.

-- Et aussi à votre " D'accord monsieur" continua t-il en riant.

Cependant Zeinabou ne riait pas avec lui. Elle le regardait juste. Lewis pensa une seconde qu'il n'avait pas été assez reconnaissant alors il fit sortir de sa poche du liquide. Il compta cinq billets de dix milles mais au moment de les tendre à la demoiselle en face de lui, une phrase de celle-ci le coupa net.

-- Non monsieur, ça va aller. Je n'ai pas vraiment besoin de cet argent. C'est un service que je vous ai rendu et je crois que vous m'avez déjà assez remercié pour cela. Maintenant passez une bonne journée.

Puis elle s'en alla rapidement sans même lui laisser le temps de digérer son refus.

Si seulementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant