13. De jolies petites confiseries

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Mayze se glissa au travers des rues. Elle descendait toujours plus profondément dans les fissures de la ville, là où les Âcres vivaient de leur plus grand secret : le marché noir. Enfin, tout n'était pas illégal en soit, sauf si on prenait à la lettre la loi interdisant les marchés autre que celui de la Verrière, qui se trouvait bien évidement en hauteur. Sauf que les prix pour y avoir un stand étaient bien au-dessus des moyens des habitants du bas. Alors les Acres utilisaient leur malheur à leur avantage, l'air putride et dense du fond était bien trop gênant pour la haute, ils ne faisaient jamais de saisies à cette profondeur. Ou alors était-ce parce que la plupart des Guildes faisaient leur petit ménage avant que les étrangers atteignent ce niveau ? Les Marchands tenaient beaucoup à ce que le commerce reste immuable.

Bientôt la semi-pénombre se fit remplacée par différents éclairages venant des boutiques et des habitations. Un arc-en-ciel discret où dominait malgré tout une lueur jaune, pareille à un coucher de soleil. On ne pouvait en percevoir la beauté uniquement si on venait du souterrain. C'était comme une lueur d'espoir et de rébellion. Une lueur qui s'enflammait au moindre souffle de la surface.

Bien sûr, tout n'était pas innocent non plus. Et c'est pour ça qu'elle pouvait se procurer des cristaux purs dans les bas-fonds. La surface se vantait de tous les détenir, pour diffuser de l'énergie aux habitants et nourrir le dôme. Mais ils se fourvoyaient pour l'un et pour l'autre. Ils avaient trop tendance à oublier les ombres.

Elle piqua une écharpe qui trainait sur un garde-corps et enroula le bas de son visage pour se dissimuler. Les sentinelles ne tiendraient pas leur langue cinq minutes contre un peu de pièces. Et ils y en avaient autant à la botte de Layre que de Zane. Sans parler guetteurs des différentes Guildes. Mais Mayze savait où ils étaient généralement positionnés pour la plupart alors elle gérerait ce petit consciencieux.

Au fur et à mesure de sa descente, entre ascenseurs, marche et sauts, la musique se faisait de plus en plus forte. Une musique rythmée et entraînante. Mayze atterrit au milieu de la foule, manquant d'écraser un adolescent. Elle s'excusa brièvement tout en se faufilant entre les corps. Elle agitait doucement la tête au rythme des basses. Elle aimait bien ce morceau, il faudrait qu'elle se prenne un tourne-disque pour chez elle.

Beaucoup de choses étaient en vente, de la nourriture, essentiellement du poisson fris ou en bouillon, des farces et attrapes, des petits composants de mécanique. Mayze s'y attarda et fit quelques achats. Elle n'était ni une Mercenaire, ni une Assassin mais elle prenait parfois quelques petites missions bien rémunérées. Les plus grands, qui se devaient d'être extrêmement discrets s'ils tenaient un minimum à la vie, savaient à qui s'adresser et où la trouver. Et ça lui permettait à la fois de se nourrir mais aussi de travailler sur ses projets perso. Elle avait bien eu quelques avertissements de la part des Assassins car elle empiétait sur leurs plates-bandes mais ils avaient fini par abandonner quand cinq d'entre eux n'étaient jamais revenus. Oups.

Mayze jeta un coup d'œil par-dessus son épaule en tenant la capuche. Tout le monde semblait occupé, soit à faire leurs emplettes, soit à flâner. Alors elle poursuivit sa route, faisant plusieurs petits tours avant de finalement entrer dans l'échoppe de Gecco. Si on entrait, comme ça, on faisait face à un tas d'horloge et des engrenages à gogo. Mais Gecco était le meilleur contrebandier des fissures et il détenait ses précieux cristaux à énergie. C'était lui qu'on venait voir quand on ne voulait pas faire face aux clans.

— La boutique est fermée, vous pouvez repasser plus tard, s'exprima une voix rauque et cassée.

— Même pour ta plus fidèle cliente ?

Un bruit sourd se fit entendre avant qu'un homme mûr ne sorte d'une pendule en se frottant la tête avec une grimace affichée sur le visage. Avec son éternel tablier en cuir, sa chemise mal repassée et sa moustache poivre et sel en pagaille, il avait juste l'air d'un ouvrier fou. Combien étaient tombés dans le panneau en croyant pouvoir l'arnaquer ou le braquer ?

La Folie du ChaosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant