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Elle, la jolie brune aux reflets violets s'avança dans l'énorme allée au sol marbrée.
Il n'y avait personne, aucun bruit, c'était un silence, un silence de mort qui convenait parfaitement à l'atmosphère du lieu, qui pouvait se montrer autant joyeux que sinistre, cela dépendait de l'évènement.

Cet endroit avait entendu les rires, les larmes, les inquiétudes et les confessions embarrassantes des habitants de cette ville. Cette allée marbrée avait vu passer des enfants, dans les bras de leurs parents, des amoureux prêts à sceller leur amour par les liens sacrés du mariage et des cercueils marquant la fin de cette vie sur Terre.

Mais ce soir, on ne pouvait entendre que les claquements de ses talons aiguilles noires sur la roche et voir cette jolie femme au visage fermé et à la peine se lisant dans ses yeux.

Cette odeur de cire qui émanait des bougies allumées dans les quatre coins de l'édifice, elle la connaissait déjà. Cette forte odeur qui lui avait causé des hauts-le cœur auparavant ne lui faisait plus rien aujourd'hui, elle y était habituée.

Il faisait frais à l'intérieur, en rentrant dans le bâtiment on pouvait sentir que le lieu était légèrement humide, mais par souci d'économie le chauffage qui servait à chauffer cette énorme bâtisse n'était allumé que quelques fois dans la journée, le matin et en fin d'après-midi. Mais cela, elle le savait, c'est pourquoi elle avait toujours sur ses épaules une veste ou un vêtement pour lui tenir chaud.

Les bancs en bois étaient parfaitement alignés et brillants, comme si quelqu'un avait passé de la cire sur elles.  Elle s'installa sur le même banc que tous les jours, le cinquième sur la droite et s'agenouilla pour prier. C'était son rituel depuis un an, se rendre dans l'église de sa ville pour prier, après une longue journée de travail.
Depuis un an c'était le lieu où elle pouvait se retrouver seule et organiser les pensées qui se bousculaient dans sa tête.  Après avoir prié, elle s'asseyait sur le banc et resta là à observer les lieux et à se remémorer ce qu'elle aurait aimé n'avoir jamais vécu, l'enterrement de ses parents et de son petit frère, le même jour.

Elle se souvenait parfaitement des trois cercueils en bois posés à un mètre et demi de distance les uns des autres. Des énormes et nombreux bouquets de fleurs qu'il y avait, des lettres d'adieux qu'avaient écrits les camarades de son frère pour lui prêter un dernier hommage.  Des portraits heureux qui se trouvaient devant chaque sarcophage.  Elle se souvenait aussi des gens qui la regardaient avec tristesse et pitié, car elle n'avait plus personne et des accolades amicales pour la réconforter de gens dont la plupart elle ne connaissait pas, jusqu'à ce jour-là.
Sa vie s'est arrêtée un soir de pluie, en Novembre dans un tragique accident de voiture qui lui a volé les trois personnes qui comptaient le plus pour elle.

Elle sortit de ses pensées quand elle entendit les pas familiers du prêtre, qui venait lui annoncer qu'il était temps de fermer. C'était comme cela, tous les soirs, depuis un an. Le père Arthur avait été pour elle une énorme source de réconfort, pour la consoler ou répondre à ses interrogations, il avait toujours un passage de la Bible en tête à lui réciter et cela lui donnait espoir et courage pour affronter le triste chemin du deuil.

- Il est 20h10, souhaites-tu que je te raccompagne chez toi ?

Nous étions en Novembre, il faisait froid, il pleuvait et la nuit s'était déjà installée depuis plusieurs heures. Elle détestait l'hiver pour cela, à cause du froid et de la nuit qui tombait aux alentours de 17h.

- Je vous remercie mon Père mais je me sens capable de rentrer toute seule.

Il était déjà arrivé que le prêtre raccompagne cette jeune femme chez elle, trop malheureuse pour prendre le volant, c'était d'ailleurs ce qu'il s'était passée la nuit dernière. Mais ce soir elle était apte à rentrer toute seule.

Complice du chagrinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant