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L'océan qui s'écroulait à leurs chevilles découvrait les écumes de sa surface. À des lieux du malheur qui les avait accablé jusque-là, ils sentaient couler à même leur peau les vestiges de ce qui les avait hanté durant leur vivant. Maudits par le plus grand des désespoirs, condamnés à une vie qu'ils n'avaient jamais désiré, ils étaient éreintés de cette existence. Mais ici, c'était le pays des rêves inachevés et des âmes égarées, la contrée des remords et des espoirs abandonnés au bord des flots. La brise avait balayé la noirceur de leur quotidien pour laisser place à la tranquillité qu'ils n'avaient jamais effleuré. Nulles douleurs ne pouvaient surpasser celle de vivre une existence où seul le diable restait en paix, et même s'ils n'étaient plus que des êtres spiritueux aux regrets assassinés, des fantômes vagabondant entre le vide et le cosmos, une étrange sérénité gravitait autour de leurs esprits. Le genre de paix qui redonnait foi en l'humanité, le genre de silence qui avait le don de soigner les pires maux de ce monde. Cette nouvelle terre était d'une harmonie sans nom et d'une paix à côtoyer les anges. Ce lieu était ce que quiconque pouvait qualifier de paradis. Et la seule chose qui arrivait à leur faire regretter leur vie passée, c'était cette unique personne, cette seule âme qu'ils avaient aimé comme détesté, adulé comme repoussé, cet être qui les avait fait se sentir réellement vivant, cet ami, cet ennemi, cette sœur, cette camarade devenu plus qu'une connaissance, ce souvenir qui faisait d'eux des êtres à l'unique doléance de les revoir.
C'était désormais aux vivants de porter le poids de ces morts, alors que les défunts murmuraient ce qui semblait être leur ultime regret.
