Naga

Chapitre 1 -L'ultime épreuve-

J'ai bien conscience que la vie n'est pas un long fleuve tranquille. Pourtant, un peu d'aide ne m'aurais pas déplut. Depuis que je suis rentée dans cette école, les autre élèves n'ont pas arrêté de me dire que je n'y arriverais pas. Ils m'ont regarder de haut en me traitant de moins que rien, surtout Pawel ! Une chose est sûre, si j'étais un homme, il aurait déjà reçu mon poing dans le nez. Il n'arrête pas de me lancer des piques pour me blessé sous les gloussements de mes camarades. Au début, j'ai essayé d'alerté mes professeurs, mais ils n'ont pas lever le petit doigt pour me soutenir. Pawel est le fils de notre dirigeant et malheureusement intouchable grâce à ce statut.

Bien des fois, j'ai hésité à baisser les bras, mais j'ai tenu bon. J'ai assemblé tout mon courage pour arriver aujourd'hui à l'ultime épreuve ! Dans quelques minutes, mes quatre années d'étude vont porter leurs fruits et je vais devenir un Chevalier Kettos. C'est un honneur d'atteindre un tel titre. On était une cinquantaine au début et nous voilà à huit. Huit jeunes adultes qui seront les protecteurs de notre contrée et moi, Akaïa, j'en fais partie !

Je tremble intérieurement en avançant vers le socle. Chaque pas que je fais est une victoire sur les épreuves, les moqueries et les méchancetés que j'ai endurée. Mon pied se pose sur la marche nacrée aux veines noires et admire le paysage qui s'offre à moi. Des montages à perte de vue. Des sommets aussi hauts qui ne font qu'un avec l'immensité du ciel. Des taches blanches recouvrent par endroit les rochers, cette neige éternelle qui ne l'est plus tant. En contre bas des sapins, puis parsemer ci-et-là quelques feuillus qui résistent à l'altitude. Je suis sûre qu'en laissant mon regard descendre vers la vallée, j'apercevrais un berger avec ses chèvres et son chien de garde. Une fermière en train de cueillir des baies dans une clairière. Un chevreuil courant dans la nouvelle herbe.

— Vous n'avez qu'à la pousser, on ne va pas y passer la journée, raille Pawel dans mon dos.

Des rires s'élèvent à sa remarque et d'autres commentaires tout aussi intelligents se mêlent au groupe. Mon cœur se serre sous ses assauts. Cette méchanceté gratuite est devenue mon lot depuis quelques années et j'espérais que la carapace que je me suis forgée me protègerait, mais ce n'est pas le cas. Ce venin qui s'insinue dans mon cœur et dans mon âme me fait toujours autant souffrir.

— Ne les écoute pas Akaïa, chuchote le professeur Rivel. Tu as travaillé dur et je suis persuadé que tu y arriveras !

Je hoche la tête tout en continuant à fixer l'immensité qui s'offre à moi. Mon pied s'approche un peu plus du bord. Un vent violent provenant du canyon au-dessous de moi soulève ma chevelure cuivrée. J'inspire profondément cette senteur boisée et humide. Je détends la musculature de mon cou et de mes épaules.

C'est comme à l'entrainement !

Je ferme les yeux, étends mes bras en croix et commence à faire tourner mes poignets dans le sens inverse de la rotation du soleil. Le bout de mes doigts se met à picoter, un doux fourmillement se propage sur ma peau, puis la chaleur envahit mon corps. La première fois que cela m'était arrivé, j'ai été prise par une crise d'angoisse. Aujourd'hui, je la laisse entrer avec bienveillance. Je n'ai plus peur, car je sais que je ne risque rien. La moiteur continue son chemin dans mes veines, se répandant en moi. Je la sens, je l'accueille. Je lui ouvre en grand les portes de mon être.

Elle est là ! Elle s'approche !

Aujourd'hui, c'est autant sa consécration que la mienne. C'est la reconnaissance que nous attendions aux yeux du monde, ce lien fort qui sera soudé à jamais. Une larme roule sur la rondeur de ma joue. J'ai travaillé tellement dur que l'émotion est sur le point de me submerger. Mais, il faut que je grade la tête froide pour finir l'ultime épreuve, pour elle, pour moi.