Prologue.

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TW : mort parentale, mention d'abus sexuels et d'idées sombres.

On disait que la fille du grand Dracula habitait dans la région, dans ce manoir en plein milieu de la forêt. Là où elle passait ses nuits à pourchasser quiconque oserait s'aventurer dans son bois. On disait qu'elle était d'un blond aussi éclatant que de l'or, que son teint était d'une pâleur pareille à la neige, que son corps appelait au désir, à la luxure et que sa bouche et ses yeux étaient aussi rouge que le sang qu'elle faisait couler.

Cette description était des plus dérangeante, je devais bien l'avouer, mais pas assez pour reculer face à la bâtisse qui me faisait face.

"-Tu es complètement folle, ma pauvre fille." C'était ce que m'avait dit Jade, mon employeur et dirigeante de la taverne dans laquelle j'étais employée en tant que serveuse et chanteuse.

Elle n'avait pas tort, j'étais folle, oui, folle depuis que mon petit-frère, la seule famille qu'il me restait, venait de tomber gravement malade.

Maximilien avait toujours eu une santé fragile qu'il avait hérité de notre mère, qui était morte en lui donnant naissance à la suite d'un accouchement compliqué. Père nous avait élevé tant bien que mal, mais était mort l'année dernière à la suite d'un accident de chasse, un homme l'ayant pris pour une bête.

Maximilien allait mourir, je le sentais dans mes entrailles, je voyais son esprit abandonné de plus en plus son corps à chaque jour que Dieu faisait.

J'avais prié, prié des nuits entières à cet homme dans le ciel de se montrer miséricordieux, de ne pas me prendre mon petit frère que j'avais aussi élevé, que je considérais comme mon enfant, mais il n'avait jamais répondu à mes prières, aucun miracle ne s'était produit.

La fille de Dracula était peut-être dangereuse, mortelle, mais on disait que son venin pouvait donner la vie éternelle.

Plus de mort.

Plus de souffrance.

Plus de maladie.

C'était tout ce qu'il me fallait, tout ce que je voulais pour mon frère, la prunelle de mes yeux, le seul homme pour lequel je me souciais dans ce monde épouvantable.

Demander de l'aide à un monstre ne me semblait pas si dur que cela quand j'avais passé ma vie à traiter avec des monstres pour ne serait-ce que des miettes de considération. J'avais dû faire des choses sales et humiliantes pour allonger la vie de mon frère de quelques semaines, grappillant de l'aide à tous, même les plus viles personnes.

J'avais mis du temps à en venir ici, à songer à ce moment, à moi face aux portes d'un établissement habité par une mangeuse de chair, une tueuse d'hommes.

Le soleil était en train de descendre doucement dans le ciel, entamant sa descente vers l'obscurité de la nuit : l'enfer des hommes et le paradis des monstres assoiffés de sang.

J'avais à peine cillé face aux cadavres qui se trouvaient dressés devant la maison, sur des piques, tel des totems, une démonstration de force.

Personne n'entre, au risque de ne jamais en sortir vivant : c'était ce que cela semblait dire.

Je ne craignais pas la mort, j'avais grandi avec elle, elle dormait avec moi depuis que mon frère était venu au monde, nous nous connaissions, nous étions de vieilles amies. Elle m'attendait, la mort, je la sentais près de moi, à me guetter, à me souffler des jolis mots à l'oreille.

J'ai toqué à la grande porte, fixant du regard la gueule du monstre ancré dans la porte qui me fusillait du regard.

Je m'attendais à devoir attendre longtemps, à devoir me jeter à corps et âme perdue contre cette grande porte, mais, à ma plus grande surprise, la porte s'est ouverte presque aussitôt.

Je me suis reculée de quelques pas, déglutissant péniblement alors que les ténèbres m'ouvraient leurs bras. Il m'a fallu quelques instants pour me reprendre, porter de nouveau mon courage à bout de bras, étouffant la petite fille en moi qui tremblait de terreur à l'idée de se retrouver seule avec une bête de la nuit.

J'ai fait quelques pas à tâtons, le cœur battant la chamade dans ma poitrine.

Je distinguais à peine des formes au sol. En plissant les yeux, je me suis aperçue qu'il s'agissait de corps en morceaux, complètement saccagé. L'odeur me l'a confirmé, cette odeur d'entrailles de bête et de sang.

Ravissant.

Finirais-je dans cet état si je m'avançais encore un peu plus? La porte était encore grande ouverte derrière moi, je pouvais encore rentrer à la maison et...et quoi? Continuer de regarder mon petit-frère mourir sans rien pouvoir faire? En sachant que j'étais passée à côté d'une potentielle chance de le sauver?

Non, hors de question.

Je n'avais pas fait toutes ses choses dégoûtantes pour baisser les bras maintenant.

J'ai serré les poings, continuant d'avancer, enjambant les corps, grimaçant en sentant le sang sous les fines semelles de mes chaussons.

Ne glisse pas, ne glisse pas.

Je suis arrivée jusqu'à des escaliers, je m'apprêtais à monter la première marche quand la porte a soudain claqué dans mon dos, me plongeant dans les ténèbres absolues.

Je n'ai pas eu le temps de pleinement comprendre ce qui arrivait, d'avoir peur, que déjà, une torche s'allumait, puis une autre, et encore une autre.

En quelques secondes, toute la pièce s'est illuminée de mille feux.

J'ai eu le réflexe de vouloir tourner la tête et observer la rivière de chair et de sang que je venais de passer mais je me suis arrêtée en remarquant une figure en haut des escaliers.

Une femme blonde, ces cheveux de blés bouclés tombant sur ses épaules et son dos, son teint pâle faisant ressortir le rouge de sa bouche et de ses yeux.

C'était elle.

Le monstre.

La bête.

La tueuse.

L'enfant de Dracula.

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