I.

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Nous nous sommes dévisagés sans rien dire, elle, m'observant de haut de son regard inhumain, moi, ne pouvant détourner les yeux de sa splendeur surnaturelle.

Je n'aurais jamais cru voir un monstre si je n'avais pas la preuve de ses crimes sous mes chaussures et tout autour de moi.

Elle ressemblait à un ange étant tombé du ciel, c'était le genre de femmes pour qui on écrivait des poèmes larmoyants, pour qui on passait ses nuits et ses jours à peindre sans relâche dans le simple espoir de retranscrire chaque courbe de son corps.

Une poupée, une charmante jeune femme de bonne famille, voilà l'image qu'elle renvoyait.

Jamais je n'aurais cru me tenir si près d'une beauté pareille.

Était-ce là ma dernière vision avant la mort? Cette femme magnifique qui me toisait de haut, comme si je n'étais qu'un corps en plus à ajouter à sa collection déjà débordante?

J'aurais pu l'accepter si je n'étais pas si soucieuse de l'état de mon frère qui se mourait de minute en minute.

Maximilien, c'est pour toi que je tente le tout pour le tout, très cher frère.

"-Je ne vous veux aucun mal." j'ai commencé d'une voix rendue rauque par la peur qui retournait mon estomac, la peur de ne pas prévoir ce qui pouvait se passer, de ne pas savoir quand elle allait frapper. "Je suis là, dans votre humble demeure, car j'ai besoin de votre aide."

Elle n'a pas bougé, immobile, telle une statue, seul son sourcil s'est haussé, comme si mes mots la rendaient curieuse.

J'ai dégluti péniblement, anxieuse de son silence, de son regard, de son attention sur moi.

"-Mon frère, mon cadet, est extrêmement malade. J'ai tout fait pour tenter de l'aider, tout, mais mes efforts n'ont pas été concluants."

Les larmes ont roulé le long de mes joues, m'échappant pour tomber sur le sol teinté de sang et de mort.

Je guettais la moindre réaction, la moindre pitié ou compassion que je pouvais lui arracher, mais son visage restait de marbre, seul son regard me faisait comprendre qu'elle était bien là, à m'écouter et non pas un simple corps sans esprit.

"-Je vous en supplie. Pitié, aidez-moi." Je me suis laissée tomber à genoux sur les marches, prête à ramper à ses pieds, à pleurer de tout mon saoul, à m'ouvrir les veines et faire couler mon sang en sacrifice.

Mon petit-frère, mon bébé que j'avais vu naître, que j'avais porté tout contre mon cœur quand il n'était qu'une toute petite chose.

Je l'avais élevé comme s'il était mien, j'avais grandi avec lui, il avait toujours été là, où que j'aille, où que je porte mon regard. Il était mon meilleur ami, le seul homme qui ne me tapait pas sur les nerfs. Je voulais qu'il vive, merde, si cette femme ne voulait pas m'aider, j'étais prête à trouver un moyen d'aller chercher Dieu lui-même, ou alors, je plongerais dans la tombe avec mon frère. Tout ce que je voulais, c'était rester avec lui.

"-Pourquoi ferais-je cela?" Sa voix était étonnement rauque, comme si cela faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas utilisée.

Elle a caressé distraitement la rampe du doigt avant de descendre quelques marches dans un rythme affreusement lent, comme pour me laisser le temps de partir, de m'enfuir. Mais je suis restée là, par terre, à la regarder descendre jusqu'à moi, jusqu'à ce que je doive me tordre le cou pour ne serait-ce que maintenir notre contact visuel.

"-Dis-moi pourquoi je devrais t'aider, humaine, quand les gens de ton espèce tentent de me tuer presque tous les jours avec ferveur."

Elle a fait un geste général du bras mais j'ai refusé de tourner la tête, de regarder le carnage. Ils ne comptaient pas, ils n'étaient rien pour moi.

VampyrOù les histoires vivent. Découvrez maintenant