5

2 1 0
                                    

Mardi 18 juin

Le train à grande vitesse arrive sur le quai, j'embarque après un moment tumultueux où tout le monde s'est entassé et s'est dépêché de rentrer dans le train afin d'y déposer leurs valises et de trouver leur place assignée. Une fois arrivé dans ma voiture, je reprends mon souffle, toute cette foule m'avait asphyxié en un jour aussi ensoleillé. Je range ma valise avec celles des autres passagers et je me dirige à ma place.

Assis sur le côté fenêtre, je contemple un court instant le quai et le paysage qui suit avec : absolument rien d'autre que des immeubles, des voitures et quelques piétons. Le train est assez matinal et je m'assoupis quelques instants en posant ma tête contre la fenêtre.

— Bonjour Mesdames et Messieurs, bienvenue à bord de ce train à direction de Nice.

L'annonce me sort de mon sommeil éphémère mais je suis trop fatigué et je m'assoupis de nouveau. Je n'entends plus rien, mes pensées s'entremêlent avec mon sommeil, tout est flou dans ma tête et cela ne me dérange pas.

Mon esprit me ramène à Nice. Je me souviens maintenant, j'ai dû vraiment souhaiter l'oublier pour ne pas m'être rendu compte de tout ça lorsque je t'en parlais encore il y a quelques jours. Nice, c'est la ville de notre enfance. Là où on habitait avant de déménager en banlieue parisienne.

Et mon esprit refuse de rejeter le souvenir d'hier.

Les hurlements de Papa, les assiettes qui se brisent, moi qui m'effondre émotionnellement sans rien lui rétorquer avant de lui balancer des choses horribles, les voisins qui viennent toquer à notre porte, tous ces bruits résonnent encore dans ma tête, tout s'est passé si rapidement.

Quand Papa a dépassé le seuil de la porte, il m'a immédiatement dévisagé et d'un ton taciturne il m'a annoncé :

— Tu pars demain.

— Quoi ? je réponds en sentant déjà les larmes monter.

Je me craque les doigts. Je le dévisage d'une manière qu'il détourne son regard qui était posé plus tôt sur moi.

— Ne me fais pas répéter, ne m'oblige pas à te parler, dit-il le regard toujours porté devant lui alors que je suis à sa droite.

— Mais... mais...

Je ne sais pas quoi répondre, je suis sous le choc. Je savais que cela allait arriver, mais je pensais que j'avais encore un mois, je n'ai rien préparé, ma valise n'est sûrement pas prête et je n'ai nulle part où aller. Je me touche l'arête du nez.

— Ton billet est prêt. Tu pars demain pour Nice, j'ai besoin de régler les derniers papiers administratifs que j'ai besoin. Tu peux habiter à l'ancien appartement, je te le lègue, c'est le seul héritage que j'accorderai à la honte de cette famille. Je ne veux plus jamais te revoir.

— Des papiers administratifs ?

— Oui, il déglutine un coup laissant la tension et le mystère à leur paroxysme, à partir de demain tu seras déshérité. Ta mère et moi on ne te devra plus rien. Le temps qu'on te transfère l'appartement tu auras dix-huit ans.

Les larmes coulent d'elles-mêmes. Il a de la pitié envers moi. Mais cette pitié je n'en veux pas. Pour lui, je ne suis qu'une ordure pathétique qu'il doit se débarrasser au plus vite avant que je ne contamine son précieux foyer. Je n'ai jamais été son fils. Nous n'avons jamais été son fils.

— Papa, est-ce que tu m'as déjà considéré comme ton fils ? dis-je avec la gorge brûlante, les mots sortent sans que je puisse respirer convenablement. Je remarque après une courte pause ce que je viens de prononcer et je me raidis.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Sep 22, 2022 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Toi et Moi dans le même corpsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant