Ok, alors celle-ci, elle ne m'a pas percutée de suite. Partager... c'est-à-dire? Un quart de seconde plus tard, mon coeur décide de répondre à la place de ma tête, et j'avoue:
« - Bien sûr, je ne me vois pas vivre ce moment sans ta présence. Ça me ferait trop peur . »
J'ai envie de regarder derrière moi, mais je me ravise en me disant que non, c'est bien moi qui ai affirmé vouloir partager mon homme. Et je l'assume effectivement, si j'enlève les considérations normalisantes de base du genre « il vient de te proposer un putain de plan à trois et toi, tu dis oui en plus! »
Oui, il vient juste de me proposer un plan à trois, et ça correspond à un fantasme sans doute ressenti par 80% des mecs. Dans mon esprit, c'est un prêté pour un rendu, je viens quand même de lui sortir que je peux éprouver des sentiments pour une femme!
On se retrouve donc en plein brainstorming pour trouver la personne qui complètera le plan à trois parfait. Il est très loin, le temps où ma jalousie aurait empêché le rapprochement de tout ce qui aurait pu ressembler de près ou de loin à une femme!
Petite question, et non des moindres; comment trouve-t-on la troisième du plan ?
Plusieurs jours passent sans pouvoir répondre à cette interrogation, jusqu'à ce Fred me dise avec un certain aplomb:
« - En club libertin, normalement, on devrait trouver. »
Je n'ai aucune réaction. Pas le moindre balbutiement ne sort de ma misérable bouche close (essaye donc de le dire plusieurs fois sans accrocher), pour la simple et bonne raison que je suis en train d'analyser la donnée « club libertin ».
Par toutes les cornes des bouquetins de ce monde, on est bien en train de parler de ces lieux de dépravation décrits tous les ans par Zone Interdite? Si, bien sûr, le Cap d'Agde, avec ces couples soit nus comme des vers, soit ficelés dans des tenues indécentes, avec ces originaux qui promènent fièrement leur toutou humain en laisse sous l'oeil amusé voire lubrique des centaines de curieux qui affluent...
J'ai envie de crier au secours en me repassant le film de ces reportages voyeuristes... est ce qu'on est certains qu'on doit ABSOLUMENT en passer par là? Comment ça, une femme équilibrée, coquine et respectueuse ne se trouve pas simplement dans un bar, sur une chaise voisine de la nôtre , n'attendant que notre venue ?
Fred, qui lit presque dans mes pensées, ajoute:
« - Tu sais, c'est comme lorsqu'on s'obstine à aller voir un film que la critique descend en flèche. Je suis quasiment certain que ce n'est pas aussi glauque que d ans les reportages.»
Et c'est vrai. A partir du moment où on a envie, Fred et moi, de faire quelque chose, on se renseigne et on n'en fait finalement qu'à notre tête. Pourquoi, dans ce cas précis, refuserais-je de tenter une nouvelle expérience?
En fin de compte, on a déjà largement dépassé les conventions sociales par cette conversation, alors autant assumer jusqu'au bout et se jeter dans le grand bain sans regarder ceux qui restent dans le pédiluve .
Donc, je plussoie et nous voilà partis en quête de l'établissement idéal pour abriter nos expériences sexuelles inédites. Les clubs ne sont pas nombreux dans la région, ça simplifie le choix.
Nous nous adonnons à une véritable étude de marché; distance, avis google recoupés avec d'autres sites d'avis, bref Sherlock Holmes et le Docteur Watson en train de mener une enquête sombre mais palpitante. Etrange parallèle...
Nous trouvons donc l'endroit qui nous sied le plus, une jolie maison de ville modifiée pour cette destination, avec des photos qui font rêver; jacuzzis, beau buffet, chambres cosy...il n'est plus temps de tergiverser. La date est arrêtée sur un soir de semaine pour éviter une éventuelle cohue (dans l'hypothèse d'avoir à se défendre il vaut mieux partir sur une bataille d' un contre... le moins possible).
Le fameux soir arrive bien vite, et me voici en train de m'apprêter.
C'est un sauna, très bien, mais il est hors de question d'y aller sans un minimum de coiffure et de maquillage, le but étant quand même de faire envie! Je ne me vois pas, même dans une lutte perdue d'avance entre mon eye liner et l'humidité, sortant dans ce genre d'endroit sans aucun artifice.
Avec le recul, je me dis qu'il est absolument impensable de croire qu'on va être à son avantage dans un sauna en se crêpant le chignon comme au mariage de Tata Suzanne alors qu'on va se prendre un extraordinaire bain de vapeur et de sueur de plein fouet. Mais j'ai besoin de me rassurer et d'avoir une certaine contenance pour ne pas me déballonner et annuler au dernier moment... Alors je tremble en me maquillant, en me coiffant, et je me rappelle que Fred, lui, n'a rien d'autre à faire qu'enfiler ses vêtements... chance ou pas? Pas vraiment, de mon point de vue toutes ces étapes font partie d'un rituel de pseudo normalité avant de sortir, donc ont un effet... quasiment méditatif.
Pas suffisant tout de même pour calmer la grosse appréhension de pré-soirée, celle qui te fait hésiter entre une foultitude de sentiments différents.
Imagine qu'on ne trouve personne... ou même, imagine qu'on la trouve, on aura l'air de gros faisans, tiens! Comment être calme quand on ne sait finalement pas ce qu'on préfère; trouver ou ne pas trouver?
Je me visualise m'introduisant la tête dans le congélateur afin de congeler mes pensées. Cela ne nuirait pas tellement à mon maquillage, mais peut-être à la laque dans mes cheveux... que se passe t'il quand on expose des cheveux laqués à un froid intense? Est ce qu'ils deviennent cartonnés? Prennent-ils le givre? Arriverais-je à retrouver des cheveux normaux après l'exposition au froid?
Je suis en plein raisonnement scientifique sur la résistance du cheveu quand Fred vient me trouver devant ma coiffeuse avec cet air... concentré.
Tout va bien? Oui, aussi bien qu'une petite cuillère au micro onde, mais une petite cuillère décidée, donc qui monte de ce fait volontiers dans la voiture.
Véhicule dans lequel on se met à parler, beaucoup, et rigoler bêtement aussi. Nous ressemblons à deux ados qui vont à leur bal de promo, et c'est drôle finalement.
Enfin, drôle, jusqu'à ce qu'on arrive devant le club et qu'on se mette à hésiter. Où vaudrait-il mieux que l'on se gare? Une place nous attend juste devant, mais on décide de faire le tour parce qu'il faut bien l'avouer, à l'instant T, on n'assume pas encore tout à fait d'aller dans ce genre d'endroit.
Après avoir opté pour un stationnement discret dans une rue adjacente, vient le moment tant redouté de sonner à l'entrée du club. Heureusement que la lumière est suffisamment tamisée parce que n'importe qui aurait pu guider son bateau (la mer à 700 bornes n'empêchant rien) jusqu'au club avec nos joues, tels 4 phares dans la nuit.
Un déclic se fait entendre dans la serrure et nous poussons la porte de concert, nous retrouvant dans un vestibule avec pour seul aménagement un comptoir, derrière lequel une personne plutôt souriante nous dévisage. On doit sentir le nouveau venu à des kilomètres, car le sourire en coin le laisse largement entendre.
Après avoir vérifié de vive voix cette certitude, le patron nous explique que la robe dont je me suis affublée va rester au vestiaire car la soirée est réservée au spa et donc... en serviette ou naturiste. Bravo Flora, ça valait bien le coup de réfléchir trois semaines pour l'acheter. Non sans une certaine gêne, nous remisons nos vêtements dans un casier, avec pour moi une fâcheuse tendance à la tremblotte. Nous nous enroulons savamment tels deux sushis dans nos serviettes (à l'époque la pudeur fait encore partie de notre style de vie) puis sortons pour arriver dans l'arène, c'est à dire la pièce principale avec bar et piste de danse.
Comment décrire cette expérience, ces impressions, ces sentiments qui se bousculent, enfin plutôt un seul à ce moment-là.
Inutile de se regarder, parce qu'on sait déjà ce que pense l'autre. C'est dans ces moments-là que notre connexion mutuelle, tellement forte, s'exprime le mieux, et doit même quasiment être visible aux yeux du monde.
Après avoir traversé l'arène et être arrivés au spa extérieur, nous jetons un rapide coup d'oeil aux alentours pour confirmer que nous sommes seuls, et nous nous surprenons à prononcer cette phrase, au même moment :
« - Nan mais où est ce qu'on est, là? »
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Confessions libertines : le crash test
Short StoryVoici le récit, vécu, de ma première expérience libertine. J'ai 27 ans à l'époque et je suis enfin décidée à assumer ma sexualité, même au prix de certaines découvertes étranges voire drôles... La découverte de soi est un parcours semé d'embûches, m...