Sous le rameau de l'olivier

Partie I : La nuit de terreur d'Hermione

Hermione Granger avait bien grandi. Ses quelques vingtaines d'années sur lesquelles elle soufflait depuis son départ de Poudlard avaient marqué ses traits d'une féminité nouvelle, laissant derrière elle les incommodités de l'adolescence. Ses cheveux avaient prit un éclat nouveau, sa crinière rendue à la fois robuste et élégante. Sa silhouette s'était marquée de courbes délicieuses qui ne manquaient d'un certain charme et sa voix s'était adoucie, devenant presque mélodieuse par moments, son sourire venant égayer des pommettes rougissantes. Hermione se regardait parfois d'un air distant, comme si cette personne là n'était qu'un mirage, une inconnue aux boucles fabuleuses qui attirait nombre de regards dans sa direction. La jeune femme épanouie qu'elle aurait pu être se trouvait probablement enfouie derrière cette métamorphose, ployant ses ailes de cygne pour demeurer le vilain caneton qui lui avait valu tant de surnoms détestables par le passé. Ses cheveux relevés en un chignon rebelle, le pigment de ses lèvres s'effaçant derrière de nombreuses gerçures et ses formes nouvelles cachées derrière une chemise ample, Hermione s'appliquait à masquer toute trace de cette beauté pour se fondre dans le décor.

Sa déchéance avait commencé quelques années plus tôt, alors que la guerre touchait à sa fin après d'innombrables procès, jetant les traitres en pâture tandis que les héros étaient acclamés en vainqueurs. Le Trio d'Or se trouva propulsé aux sommet de l'échelle sociale, leurs mouvements épiés par un tout nouveau genre de gazette à potins, propageant des idées vraies comme les idées les plus folles, le regard braqué derrière chaque mur. Ron vit alors son rêve d'enfant se réaliser, une foule de regard admiratifs écoutant chacun de ses récits de leur année d'exil. Les plaies de sa cicatrice à l'avant bras se refermaient à peine que se livraient à tous ses moments de peine, de joie et son intimité si secrètement défendue. Les mensonges ne tardèrent pas à faire surface, leur aventure se transformant bientôt en une épopée digne de la quête du Graal tandis que Ron s'attribuait d'innombrables mérites. Hermione vit alors sa vie amoureuse passée au peigne fin au point de suffoquer, Ron se faisant plus pressant et de plus en plus démonstratif en public, agrippant ses hanches ou forçant ses baisers devant les caméras. Leur séparation fut un choc brutal pour le public mais probablement davantage pour Ron qui dévoila un caractère si hideux qu'Hermione avait senti une fissure lui déchirer le cœur pour la première fois. La jeune fille ne se figurait pas une fin aussi tragique à leur histoire et découvrit à ses dépends les conséquences d'une telle humiliation dans une société si peu tendre avec les sorcières de basse extraction.

Elle avait pourtant tenté de rétablir la vérité en démarrant une carrière prometteuse à la Gazette du Sorcier, le quotidien ayant changé tant de fois d'allégeance qu'elle dut apprendre à se méfier de ses ennemis autant que de ses amis. Son échec amoureux ayant jeté une ombre sur sa réputation, ses articles ambitieux furent censurés et ses libertés restreintes de jour en jour. Hermione avait bien tenté d'appeler son meilleur ami à la rescousse, seulement pour connaitre une déception encore plus grande :

- Personne ne veut entendre que Dumbledore était un manipulateur qui a causé du tort autour de lui ! S'était écrié le Survivant lorsqu'elle l'avait rejoint un après-midi sur le Chemin de Traverse.

- Mais il s'est servi de toi ! Il ne t'as jamais aidé dans cette quête, il a juste laissé des enfants déterminer le sort du monde magique, ce devrait être un scandale !

- Les gens ne veulent pas entendre que leur héros se trouve être un homme comme les autres. Il n'y a que le Bien et le Mal qui compte, point de zone grise où un homme puisse s'aventurer. Tu ne vas que t'attirer des ennuis, Hermione.

Désemparée, la jeune femme s'était vue confier des articles de moindre ampleur, tenue au silence face à ses calomnies odieuses et ses vérités qui ne cessaient d'être démenties, faisant d'elle une piètre figure de l'après-guerre, une sang Moldue qui s'éleva au delà de sa condition. Le regard du monde changea subitement, l'écartant des célébrations, oubliant peu à peu son rôle dans la quête aux horcruxes, réinventant l'amitié du trio pour souligner le lien fraternel qui unissait Harry et Ron, éclipsant sa présence comme une simple pauvrette dans leur sillage. Sa brève ascension lui parut haute lorsqu'elle en descendit toutes les marches et Hermione se vit contrainte de délaisser son poste sous l'œil impitoyable des mêmes traitres qui faisaient couler l'encre sous le règne de Voldemort. Loin de casser sa plume, l'ex Gryffondor vit sa détermination grandir en postulant à ce même bulletin à ragots qui postait tant de fâcheuses rumeurs dont nul ne voulait être pris pour cible. Quittant les locaux prestigieux de la Gazette, Hermione s'était vue attribuer un bureau étroit donnant sur un fenêtre à la peinture écaillée, loin des quartiers huppés du Londres sorcier. Son nom cessa peu à peu d'être mentionné, ses connaissances d'autrefois prirent de moins en moins de nouvelles et Hermione s'enfonça dans la béatitude d'une vie en solitaire. La jeune femme passait ses soirées en compagnie de son chat, savourant un film à l'eau de rose et se gratifiant d'une connexion wifi impeccable. Dire qu'elle détestait sa vie aurait été un mensonge, l'anonymat lui donnant un pouvoir qu'elle ne détenait pas autrefois, lui offrant la possibilité de savourer sa vengeance sous le simple acronyme de "HG", écrivant les quatre vérités sur les figures les plus publiques qui avaient autrefois fait de sa vie un enfer. Que n'était-ce plaisant de souligner les piètres performances de Ron dans l'équipe nationale de Quidditch dont le palmarès frôlait les bas fonds du Grand Lac, d'exposer les affaires de tromperie du directeur de la Gazette qui inspirait tant de respect par ses œuvres de charité ou bien de publier un article peu élogieux sur les produits de beauté de Lavande Brown, dont certaines jureraient qu'ils leur causaient d'affreux furoncles.