Chapitre 1

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Le long du couloir, sombre, dont les lumières ne sont que des phares pour nous aider à nous repérer, je tâtonne le mur du côté droit, nos pas frôlent le tapis synthétique d'un vieux rouge délavé, cette enseigne tombe en ruine, l'odeur de la moisissure, mélangé aux parfums trop fort des danseuses, rend le tout vomitif, un rat passe sous nos pieds et bien évidement le psychopathe commence à se déhancher sous nos yeux habitués à ses folies.

Sanzu, hurle à pleins poumons, puis d'un geste brusque envoie valser le rat contre le mur, le coup est si puissant, que le pauvre rongeur n'ayant pas vue le danger se retrouve écrasant noyé dans son propre sang, la tête face contre le mur.

Dépassant la scène du crime, les lumières criardes qui étaient des phares, nous aveugles tous, seuls des ombres en cercles s'animent, puis, pas à pas, les ombres deviennent des femmes, aguicheuses, sensuelles, nues ou bien en sous-vêtements limite pornographique, je ne m'attarde pas sur les courbes féminines se baladant comme si elles se vendaient silencieusement au plus gros acheteur dans la salle.

Le gérant du bar nous voyant au loin, n'a pas d'autres choix que de fermer le bar, les clients fulminent, Sanzu perd patience alors il fait rugir son arme, penché en arrière, la gueule grande ouverte, sa main lâchant des comprimés de toutes les couleurs sur lesquelles sont gravés des petits parapluies.

Aussi vite dégainé, les clients s'enfuient, les danseuses récupèrent les billets sur la scène puis elles s'éclipsent et Mikey entre dans la pièce une fois que le bar est enfin sécurisé.

Le gérant arrive vers nous, un bail à la main, de l'autre une bouteille, il siffle, pas un sifflement léger, non, un sifflement comme si on appelait un chien, en alertes, les sens aiguisés, nous sortons nos armes à feux, nous les pointons sur l'ombre qui s'avance, derrière le bar, une femme frêle, vêtu d'un pull large beige, un jean très troué, avance, ses cheveux sont très courts, ils forment des boucles auburn, ses yeux camouflés derrière des vitres ont une nuance marron, ni clair, ni sombre, juste du marron, un bouquin sous le bras, elle s'avance vers nous fixant le sol, puis elle dépose le plateau qu'elle tient d'une main et commence à disperser les verres sur la table en bois.

Mikey : Qui est t'elle?

Gérant : Personne. Juste la femme de ménage.

Mikey : Bavarde?

Gérant : Non.

Mikey : Bien, commençons.

Le gérant est un homme gras, petit sur patte, des mains rugueuses, lourdes, il glisse le bail sur la table, je le prends et l'examine, il sort les recettes du bar, je les examine, la même chose sur le bail, cette même chose qui m'interpelle, il manque des chiffres, il ne déclare pas ses danseuses, certains données sont erronées, je vérifie toutes les informations sur mon téléphone, et en les relevant de l'écran, ceux de la jeune femme face à nous, qui commence à se déshabiller émettent un éclat qui me prends au dépourvu.

Ran : On n'a pas payé pour l'extra.

Gérant : Dégage. Rhabille toi. Les femmes sérieux. Même avec un traitement plus que dur, elles sont toujours aussi irrespectueuses.

Sanzu : Moi je la veux, elle est bizarre.

Gérant : Tu as attendu.

Elle ne dit rien, la femme hoche simplement la tête, puis, nue face à nous, face à cette bande de loup, elle s'assoit sur les genoux de Sanzu, il pose une main sur ses cuisses puis la voix de Mikey s'élevant, Sanzu grince des dents et il lâche la femme sur lui.

Mikey : Koko, tu as trouvé quelques choses.

- Non, je ne sais pas comment il arrive à brouiller les pistes.

La jeune femme passe derrière moi, elle glisse son doigt sur l'écran de mon téléphone, et en voyant la ligne, je saisis immédiatement ce qu'elle a voulu me montrer, j'étire un sourire discret, puis elle retourne derrière son maître, tel un chien bien dressé, ses yeux brumeux, font d'elle un fantôme, elle ne parle pas, elle ne montre aucun signe de respiration, elle reste nue, une chose nous interpelles, des bleus, sur les épaules, les cuisses, le cou, noircis par la lumière ou effacés par l'absence de lumière.

Takeomi : Je n'aime pas ce que je vois.

Kakucho : Tu n'es pas le seul.

Rindô : Depuis quand tu l'as force?

Gérant : Elle peut être troquée contre un petit plus.

Mochizuki : Elle est couverte de bleus, drogué, nous ne ferons aucun petit plus.

Gérant : Comme vous voulez, elle n'a pas de valeur à mes yeux.

Mikey : Pourquoi? Elle n'a pas d'importance et pourtant elle reste derrière toi. Alors?

Gérant : C'est ma fille, mais, elle n'est rien, sa mère a voulu la garder, elle est morte, l'enfant est resté avec moi dès qu'elle a eu neuf ans. Alors, elle connaît, elle a de l'expérience la petite.

Mikey : Tu prostitue ta fille? Depuis qu'elle a neuf ans?

Gérant : Oui. C'est ma fille, je fais ce que je veux.

Une larme traverse sa joue de couleur blanche et bleue, une larme de supplice, comme une prière, elle résonne en moi, mais pas qu'à moi seul, son histoire nous touche tous, le gérant continue d'énumérer la longue liste d'atrocités qui commence à me rendre nauséeux, surtout quand il avoue avoir des attouchement sur elle quand elle était mineure, puis quand il reprend, je presse la détende de mon arme et une balle se loge entre ses deux yeux.

Ran : C'est toi qui tires le premier, c'est une grande première.

Sanzu : Enfin? Il a fermé sa gueule?

Mikey : Bon, le bar est à nous, la fille aussi.

Elle : J'ai un prénom.

Une voix cassée, saccadée, essoufflée, une voix fatiguée de vivre, voilà le timbre de sa voix, un timbre fragile, comme si un rien pouvait la briser, comme si, à tout moment elle pouvait s'effriter, les membres du Bonten me regardent, je sais ce qu'ils veulent ou ce qu'ils attendent de moi.

Mikey : Tu aides, tu entretiens, Koko, elle a toi.
Joyeux anniversaire en avance.

Elle : J'ai un prénom.

Ran : Non très chère, tu es un prix, c'est tout.

Mikey : Donnes nous ton prénom, nous serons amener à nous revoir.

Elle : Emma.

A suivre.

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