La mélodie du silence

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Cette sensation étrange grandit et fait résonner tout mon corps...

Il vibre au gré d'une musique qui ne m'est plus étrangère.

Je me concentre sur cette mélodie et voit ses couleurs.

Une jolie vague verte apparaît, elle ressemble aux danses de gaz que l'on voit dans le grand Nord ...

Puis un jaune éblouissant qui pourrait me réchauffer de la tête aux pieds.

Toute une procession de couleurs se succède, et soudain ...le noir. Plus aucune lumière. Plus de son.

Seulement une pulsation régulière qui résonne...

Boum Boum...Boum Boum... Boum Boum...

J'ouvre les yeux.

Comme dans mes pensées tout ce qui m'entoure est plongé dans le noir complet. Le bruit grésillant des voitures qui grouillent dans la rue me berce. Un klaxon par-là, un freinage ici, quelle belle chanson ! Dès que je me lève, les néons du plafond s'allument et agressent mes yeux encore habitués à l'obscurité. J'ouvre le rideau qui cache mon hublot. Encore une fois le soleil n'est pas au rendez-vous. Cela fait maintenant deux ans qu'on ne l'a plus vu. Je me dirige vers les commandes de musique et j'éteins le bruit ambiant. Tout redevient silencieux. Je regarde autour de moi. Il y a une petite armoire, une table de chevet à l'aspect futuriste et une lampe surplombant ma couche. Cette dernière ressemble plus à une capsule qu'à un vrai lit mais elle fait l'affaire. A côté d'elle, un petit carré se découpe dans le mur. Soudainement, il commence à bouger et une lumière douce en sort. Quand je m'approche, je prends d'une main ce qu'il contient et de l'autre, je referme le compartiment. J'ouvre ma paume et mes pilules s'y trouve. Dès que je les avale, une chaleur m'envahit et ma peau translucide laisse échapper des rayons. Elles ont un goût métallisé. Quelques minutes plus tard, je lève les yeux et dévisage mon reflet dans le hublot. Les dernières lueurs traversent encore mon cou. Mon visage, aussi banal que d'habitude, s'essaie à quelques sourires. Ils ont tous l'air faux. Je ferme les yeux et repense à ma vie d'il y a deux ans, en espérant peut-être me donner un peu de joie pour ne pas sombrer.

Mon petit frère,

les cheveux en pagaille et ses vêtements tachés de terre, court dans le jardin, tout content de ses nouvelles baskets. J'entends même sa course effrénée sur le gravier crissant. Il voulait me prouver qu'il courait encore plus vite avec. Il me manque, mais cela n'a plus d'importance.

J'ouvre de nouveau mes paupières

et observe encore une fois mon visage. Cette fois-ci, je trouve que celui-là n'est pas trop mal, je décide donc de l'arborer pour le reste de la journée.

Je sors de ma chambre et le monde s'active.

Toutes les lumières s'allument, les fauteuils relèvent leur dossier et la table se déplie exposant les seuls objets que je possède ; une caisse à outils, des fleurs en plastiques, un mouchoir et une petite commande pour régler l'intensité de la lumière. Cet endroit n'est pas très grand mais cela suffit ; c'est mon petit univers. Une voix de robot résonne sur les parois métalliques. Elle commence à me dicter mes tâches d'aujourd'hui. Les mêmes depuis sept cent vingt-neuf jours et que je dois suivre à la lettre. J'ai déjà essayé de désobéir à la voix mais à chaque fois je recevais une sanction. Ça pouvait varier entre un siège qui disparaissait à la suppression de ma chambre. Cependant je récupérais tout au bout d'un mois si je me comportais bien.

Demain, cela fera précisément deux ans que c'est arrivé.

Deux ans que nous avons tout perdu.

Deux ans que nous n'avons plus vu le soleil.

La mélodie du silence Où les histoires vivent. Découvrez maintenant