Tout a commencé l'après midi du premier juillet, le jour où le soleil s'est assombrit. Je me souviens encore très bien de cette atmosphère lourde, pesante; de ce temps orageux et des nuages qui encombraient le ciel. Je me remémore ce moment, ou je lisais, assise sur une branche d'un olivier dans mon jardin, bercée par l'odeur des fleurs. Ça a débuté par une ombre inquiétante, planant au dessus de moi, comme une épée de Damoclès invisible. Sans y prêter grande attention, je continuais de parcourir les pages en papier glacé de mon livre. C'était un livre sur l'Inde. J'ai toujours aimé l'Inde, ses paysages, sa culture, ses films, sa musique... J'avais sans cesse l'impression de m'évader en y pensant. L'obscurité ne m'a alertée que lorsque la lumière était trop faible pour lire. Le tonnerre gronda au loin.
- Norah! Rentre, l'orage va éclater !
- Oui maman, j'arrive tout de suite!
Je n'étais pas vraiment l'archétype de l'adolescente à problèmes. Bien sûr, je n'aimais pas ranger ma chambre, et je ralais souvent, mais je respectais mes parents, Lorelei et Christian Saphir.
Tout deux archéologues, ils s'étaient rencontrés sur une fouille concernant une villa romaine. Mon père était d'origine française depuis des générations. Quant à ma mère, elle était allemande: sa famille avait fui la montée du nazisme vers 1938, et s'était réfugiée en France. Après leur rencontre, mes parents décidèrent de s'installer en Provence, près d'Aix, dans l'ancienne maison des mes grands parents paternels (et arrières grands parents), pour étudier l'influence de la Rome antique sur cette région. J'aimais beaucoup la Provence, elle ressemblait à l'Italie: ses paysages, son parfum... Il ne manquait plus que Rome.Je descendit de mon arbre et alla me réfugier dans ma maison, une petite bâtisse à un étage, typique du coin. Mon père faisait la vaisselle (c'était son jour de corvée) et ma mère feuilletait un magasine sur sa seconde passion, les voitures. Toute jeune, elle rêvait de faire pilote de course. "Tu sais Norah, si ton père n'avait pas eu un aussi joli sourire, je serai partie rejoindre les plus grandes pistes de courses" me disait-elle souvent, assortissant cette remarque d'un clin d'oeil et d'un grand sourire envers mon père. Après vingt années de vie commune, ils étaient toujours autant amoureux l'un de l'autre. Bien sûr, il y avait des disputes, mais jamais rien de grave. Cela finissait toujours en fleurs, repas et boîtes de chocolats. Une famille presque parfaite, en somme. Presque. Mes parents n'avaient jamais réussi à avoir d'autres enfants. Après plusieurs fausses couches, ils arrêtèrent et décidèrent de profiter de ce qu'ils avaient déjà, en l'ocurence, moi. Et notre famille tournait ainsi.
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- Eh bien! Quel sale temps! s'exclama mon père, comme à chaque orage.
- Je ne te le fais pas dire! lui répondait toujours ma mère.
Les éclairs avaient commencé à tomber, et le ciel était de plus en plus sombre.
- Ce soir, vous préférez cuisine Indienne ou vietnamienne ? demandai-je aux parents.
- Et si tu cuisinnais français, ma chérie ? implora ma mère.
- Comme vous voulez, acceptai-je à contrecœur.
Bouquin de cuisine ouvert, ustensiles en main, le sourire aux lèvres, je m'apprêtais à cuisiner un bœuf bourguignon, quand la radio se mit à hurler d'allumer la télévision la plus proche. Croyant à un canular, mon père changea de station une fois, deux fois, trois fois, sans succès, avant d'allumer le poste sur la seconde chaîne. Des images sans aucun sens défilaient sur l'écran. Une énorme bille, à moitié noire, à moitié lumineuse prenait part à tous les clichés. Je ne pouvais pas détacher mon regard des images, comme si elles m'appelaient et me narguaient.
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Sombres Illusions - La fin d'un monde
Science FictionDepuis que le soleil s'est assombrit, et qu'il n'émet plus aucune lumière, la terre court lentement vers sa perte. Guerres, complots, trahison éclatent au sein de l'humanité toute entière. Norah, jeune fille ordinaire, est alors confrontée à la plus...