𝒫rologue

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La tempête, une tempête intérieure.
Une pluie de mots,
Seule la barrière de la bouche empêche toutes expressions
Cela la dérangeait-elle ?

Un soir de lune rouge, la tempête tapait sur les arbres qui faisaient danser leurs feuilles ; en se tortillant dans divers sens. De gauche à droite, d'arrière en avant ; elles dansaient avec le vent. Il faisait l'orchestre de ce bal.
Sur le goudron les voitures écossaises roulaient avec difficulté, le poids du vent était devenu dangereux pour la circulation. Les passants prenaient tout de même du temps pour regarder cette lune sang ; elle illuminait les rues de rayons écarlates qui aveuglaient les pupilles des admirateurs.

Seule une personne n'était pas préoccupée par cet événement dans le ciel. Elle regardait le sol en fronçant ses sourcils blancs, un blanc qu'on ne pensait pas être naturel pourtant elle était bien née avec. De la buée entourait sa bouche après qu'elle ai levé la tête et inspiré l'air froid automnal. Elle rangeait son roux clair derrière sa nuque avant de continuer à avancer devant elle.

Elle regrettait grandement d'être rentrée à pied à cause de tout ce désordre qu'offrent les rues de Glasgow. Ne pas avoir téléphoné à son chauffeur était la pensée qui commençait à hanter son esprit.

Ses yeux de cristal devenaient aussi noirs que ceux d'un corbeau quand un individu avait le malheur de freiner sa route. Son regard avait beau être sombre dès qu'il se posait sur n'importe qui, on ne pouvait pourtant s'empêcher de penser que ses iris blanches reflétaient une pierre tellement précieuse qu'on voudrait les arracher de ses orbites. Mais elle les rendait si noirs qu'ils en donnaient mal au crâne.

Pour la première fois en quinze minutes de marche elle décida enfin d'affronter cette lune qui brillait de plus belle. Son reflet rouge lui faisait tourner la cervelle, sa tempe commençait à lui faire terriblement mal. Elle lâcha son sac de cours et s'accroupit sur le ras du sol. Les mains sur la zone qui lui provoquait cette douleur; ne comprenant pas ce qui lui arrivait sa première réaction fut de se frapper la tête. Tellement en colère contre elle-même.

Avoir fait les mauvais choix, prit les mauvaise décisions, avoir regardé cette stupide lune en éclipse. La rouquine ne pouvait s'en vouloir qu'à elle ; elle seule.

Idiote.

Pendant un certain temps elle resta là. Sur le sol. Elle était immobile, sans larmes, sans cri de douleur ; elle attendait simplement que son malheur passe sans riposter. Elle ne savait pas quand, après combien de temps. Peut-être de longues minutes, des heures, elle n'avait pas regardé l'heure lorsque sa tempe avait commencé à la faire souffrir mais ses yeux s'étaient fermés pour laisser place à un trou d'obscurité. S'évanouir en public était peut-être quelque chose de honteux mais ce n'est pas dans la rue qu'elle se réveilla.

Un tout autre endroit. Un champ de fleurs.

Son corps recroquevillé, elle restait un moment à observer avec une effrayante peur qui s'emparait de tout son être. Des fleurs qu'elle ne reconnaissait point, toutes étaient plus étranges les unes que les autres. Leurs couleurs elles aussi étaient d'un aspect hors du commun. L'étendue était immense ; si on voulait essayer de trouver un sentier, cela était chose perdue. La seule chose qui était semblable à sa vision avant de la perdre était le ciel. Cette lune dominait toujours le ciel, aveuglant les yeux de ceux qui osaient la regarder.

Prise par la peur, son corps reçut une décharge et elle décida de se lever. Elle effleura son visage pâle à plusieurs reprises. Une centaine de fois ? Elle ne comptait pas. Après avoir vérifié qu'elle n'était pas morte, sa cage thoracique gonfla puis rejeta l'air à faible vitesse. Une larme de fureur coula le long de sa joue, sa mâchoire se serra et dans un élan vint frapper son cœur. Son cœur qui lui faisait encore plus de mal en se resserrant. Elle enfonça ses ongles dans la peau de ses paumes.

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