Chapitre 1

5 1 0
                                    


I'm in here, can anybody see me ?

Can anybody help ?

I'm in here, a prisoner of history,

Can anybody help ?

Sia – I'm in here

New-York enneigé a toujours été ma partie favorite de l'année. Observer les illuminations de Noël, arpenter les marchés, boire du chocolat et manger des marshmallows sous une grosse couverture, quoi de mieux ? Mais tout ça, c'était avant le décès de ma mère. Il y a six mois. Depuis, je n'ai plus vraiment le goût aux retrouvailles familiales. Nous sommes mi-novembre, et je tente tant bien que mal de finir un article portant sur un groupe de musique en plein essor qui sort un album pour les fêtes. Je me serai passée de cet article, malheureusement, mon directeur me l'a imposé.

- Chérie ?

Je lève la tête de mon ordinateur et plonge mon regard dans celui de Peter qui me montre deux chemises. L'une corail et l'autre bleu ciel. Je sais ce qu'il attend de moi : que je choisisse pour lui. Comme d'habitude. A chaque fois que nous nous rendons dans sa famille, il se met la pression. Il a été élevé dans l'exigence, entre un papa chef d'entreprise et une maman directrice d'agence de communication, il a fait partie de ce monde où le dimanche se passait au country club. Il est toujours un peu comme ça, mais je ne peux pas dire que j'ai ce mode de vie en horreur. Pas après sept ans et demi ensemble. Disons plutôt que je me suis accoutumée.

-La bleue. Je lui dis en souriant.

Il me remercie avec un sourire pincé. Il respire l'angoisse. De mon côté, je passe davantage de temps à observer son corps athlétique et dénudé se mouvoir avec aisance dans l'appartement. Je termine finalement mon article et met le point final, après des semaines d'écriture compliquée. Ma critique est très dure et je sais que je vais m'attirer beaucoup de foudres, notamment celles des fans les plus jeunes, mais c'est pour mon honnêteté que l'on me confie ces sujets-là. Je me suis relue plusieurs fois, et prise par le temps, je laisse ma dernière phrase telle quelle : « On peut dire que c'est un album qui séduira la jeunesse, mais qui ne ravira pas les plus âgés. Ne mentons pas, ils sont tombés dans le cliché de la pop-rock romantique commerciale, bien loin des sons si incroyables avec lesquels nous les avions découverts. Les chiffres ne mentent pas : ils risquent de, simplement, devenir un groupe pour midinette en extase sur leurs physiques avantageux. ». C'est dur et peu recherché, mais c'est tout ce que ce groupe et leur nouvel album m'inspirent. Je l'envoie à mon directeur éditorial pour le numéro de demain et ferme mon ordinateur.

-On part dans vingt-cinq minutes Mo. M'annonce Peter en se débattant avec sa cravate.

Je me dirige vers lui et l'aide à faire son nœud. Il tente de me voler un baiser, mais je me dirige déjà vers ma penderie. Il me regarde un peu boudeur mais retourne très vite à ses occupations. Je me prépare malgré l'envie manquante, c'est toujours une épreuve pour moi de rendre visite à sa famille. A peine prête, nous prenons la voiture. Nous ne serons pas à l'heure et je vois que ça l'inquiète. Il pose sa main sur la mienne malgré tout, pour me rassurer, car s'il est stressé d'être à la hauteur, il sait que c'est une épreuve de mon côté.

Avec quinze minutes de retard, nous passons les grilles de la demeure familiale des Larsen. En banlieue New-Yorkaise, elle fait partie de ces grandes maisons américaines que l'on voit dans les films. Clichée au possible, avec la grande cours à l'avant, entièrement décorée pour les fêtes de Noël. A peine garés, Peter vient m'ouvrir la portière pour m'aider sur les chemins plein de cailloux. Je lui adresse un sourire doux alors que ma main vient enlacer son bras. Je n'ai pas envie d'être là, mais maintenant que nous y sommes, autant prendre sur soi. A peine franchissons-nous le porche que sa mère est déjà devant nous. Elle devait guetter notre arrivée, comme elle le fait pour chaque retardataire.

Un monde qui nous sépare.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant