Chapitre 2

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Suddenly you're hard to read

It's like you're tired of tryingI'm asking you, come back to meTell me what you're hiding

Remember to remember me, Isak Danielson.

En entrant dans l'appartement, je jette mon manteau sur le canapé et retire mes chaussures sans lui adresser un mot. Nous n'avons pas parlé de tout le trajet. A peine revenue d'être allée prendre l'air, j'ai demandé à partir sous le regard incrédule de ma belle-mère qui ne comprenait « vraiment pas ce qu'il se passe ! ». Je n'ai pas eu besoin de parler pour que Peter comprenne le fond de mes pensées. Je pars dans la cuisine et me sers verre de vin, après tout, moi, je ne suis pas enceinte

J'aperçois très vite Peter dans l'entrebâillement de la porte en train de défaire sa cravate. Il a l'air soucieux. Il prend un second verre puis se saisit de la bouteille pour me rejoindre. Sauf que je n'ai pas envie qu'il se joigne à moi. Je bois en silence et il fait de même, chacun d'un côté de l'îlot central de sa cuisine ultra-moderne. Je me dirige finalement vers l'énorme baie vitrée qui donne sur New-York. J'observe les lumières de la ville en savourant le vin frais. Après quelques minutes, je me serre une seconde fois. Peter attrape ma main, mais sous mon regard noir, il se retire. Je quitte finalement la cuisine pour rejoindre le salon. Je reste seule quelques minutes, probablement le temps qu'il réfléchisse à ce qui est envisageable ou non dans ces conditions. Il apparaît finalement face à moi.

-On peut discuter ? Me demande-t-il très sérieusement.

-Non.

Mon ton est froid et sec.

- Moïra.

Le sien l'est tout autant.

- Tu ne comprends pas quoi dans « non » ? Je demande en haussant le ton.

- Très bien, très bien. Soupire-t-il.

Il s'installe près de moi et bois son verre en silence. Je fuis son regard, je fuis son étreinte. Il tente de poser une main sur mon bras, mais son toucher me brûle et me blesse, alors je m'éloigne systématiquement.

- On va devoir en parler. Reprend-il après un long silence.

- Vraiment ? Tu veux faire ça maintenant Peter ? Je rétorque en me levant pour être face à lui, les bras croisés sur ma poitrine.

- Elle ne pensait pas à mal, tu le sais.

- Quand bien même, j'ai été blessée. C'est horrible ce qu'elle a dit. Si tu viens à la perdre, je ne pense pas que tu tolérerais ce genre de paroles, et ce peu importe ton interlocuteur. Tu n'as même pas pris ma défense. Rien. Tu es resté là, telle une plante verte, à écouter ta mère me blesser. Il ne faut pas t'étonner que la date ne soit pas décidée. C'est assez dure comme ça, pas besoin que Maman Larsen vienne en rajouter une couche.

Je suis au bord de l'implosion, lui aussi, on le sait tous les deux. Et ça ne sera pas tendre.

- Qu'est-ce que tu voulais que je dise ? Demande-t-il inquisiteur. Cela fait six mois que je te ramasse à la petite cuillère. Je fais tout pour ne pas te heurter, ne pas te précipiter. Maintenant, oui, pour l'organisation il va bien falloir décider d'une date. Cela n'excuse pas ses paroles. Mon père intervenait déjà avec Maëlle. Qu'est-ce que tu voulais ? Que tout le monde prenne ta défense ? Si tu n'étais pas sortie prendre l'air, tu aurais vu que nous étions tous de ton côté. Mais tu préfères te renfermer sur toi-même. On se touche à peine, on se parle à peine, on se voit à peine. Merde Moïra, ça te va ?

- C'est bon, t'as fini ? Je demande avec véhémence.

- Oui, j'ai fini. J'ai fini de prendre toutes les responsabilités, et de devoir me soucier de toi et de ton putain de bonheur. De devoir prendre des pincette aux moindres faits et gestes que tu fais ou vis. J'ai tout fait pour toi, et même quand ma famille prend ta défense, ça ne te convient pas car ce n'est pas ma voix que tu as entendue. Mais encore une fois, tu étais dehors. Tu as juste fui comme à ton habitude et j'en ai assez, Moïra.

Je déglutis face à ses paroles. Alors que la peine est visible sur son visage, de mon côté j'aurai pu hurler, lui jeter mon verre à la figure, mais je n'en fais rien. Je suis incapable de lui dire quoique ce soit. Je sais que le problème ce n'est pas son comportement. Finalement, lorsque je le regarde, il attrape ses clés de voiture et sort de l'appartement, me laissant seule, emmurée dans mon silence. Lorsque la porte claque, j'éclate en sanglots. De colère, mon verre s'écrase contre le mur alors que je me laisse glisser au sol. Je sais qu'il a raison.

J'attrape son verre à lui et descends la bouteille, seule. Je regarde mon fond d'écran, photo prise au mariage de Maëlle lorsque nous dansions. Cette photo est incroyable, elle respire l'amour et la joie de vivre. A quel moment nous sommes nous perdus ainsi ? Je finis par m'endormir sur le canapé, épuisée, entre mes larmes et mes états d'âmes. A me demander où il est, ce qu'il fait, et surtout avec qui.

Debout devant lui, ses mains parcourent le moindre centimètre carré de ma peau sous mon tee-shirt. Son parfum m'hypnotise et m'entoure, comme une bulle sécurisante. Je sais que c'est de lui dont j'ai besoin, maintenant. Personne d'autres. Il a toujours été mon bouclier et mon réconfort. Ses lèvres parcourent mon cou, ma mâchoire, avant de venir se poser sur mes lèvres sans que je ne le repousse. Bien au contraire, mes mains viennent se nicher dans sa nuque pour nous rapprocher. Sa langue danse avec la mienne et qu'est-ce que c'est bon. Je fonds sous son toucher. Ses mains glissent vers mon pantalon et je gémis déjà rien que d'y penser. Il défait le bouton en un coup de main et un sourire se dessine sur ses lèvres lorsqu'il découvre la fine dentelle qui s'y trouve. Ses doigts se glissent dessous et le désir explose dans mon corps. Il fait de lent va et vient qui ne font qu'amplifier le désir que j'ai pour lui. Les gémissements sont incontrôlables alors qu'il les étouffe contre ses lèvres. Lorsqu'il se retire, c'est pour attraper mes fesses et me soulever contre cette porte. Mes jambes s'entrecroisent autour de ses hanches et ses yeux plongent dans les miens. Ses pupilles émeraude me fixent...

Je me réveille en sursaut, transpirante et à bout de souffle. Je passe une main contre ma poitrine en essayant de calmer le brasier qui s'est diffusé en moi. Bon sang, quel rêve. Je mets quelques minutes à réaliser que je suis dans le lit et que Peter est à mes côtés. Il a dû me porter jusqu'ici quand il est rentré. Ses yeux bleus rencontrent alors les miens, j'ai dû le réveiller avec mes mouvements brusques. Ses pupilles aigue-marine contrastent avec les émeraudes d'il y a quelques instants. Cela me fait sursauter et me trouble. Mais je reprends très vite mes esprits. Ce n'est qu'un fantôme du passé qui mérite d'être oublié. Il a l'air soucieux alors je me rallonge et viens plonger ma tête dans son torse. Son odeur n'a rien à voir, mais je l'aime tout autant. Il caresse tendrement mes cheveux et dépose un baiser sur mon crâne avant de me coller davantage à lui. Après quelques minutes, je finis par lever la tête vers lui pour chuchoter :

-Le 12 Octobre.

Il fronce les sourcils en me regardant, puis un léger sourire flotte sur son doux visage.

-Un mariage de fin d'été ? Me demande-t-il.

-Un mariage, le jour de notre rencontre. Je réponds avec un léger sourire en reprenant ma place contre son torse.

Il acquiesce et attrape le bas de mon visage pour venir m'embrasser amoureusement.  Je gémis à son baiser et passe une jambe autour de sa taille pour rapprocher son bas-ventre du mien. Très vite, il attrape mes bras et me retourne en les tenant au-dessus de ma tête. Je pense à ce qu'il m'a dit plutôt « on ne se touche même plus ». Et si je viens pourtant de rêver d'un autre homme, j'ai besoin de lui. C'est de lui dont j'ai besoin là, maintenant, tout de suite. Cet homme. C'est lui qui est important. C'est lui avec qui je vais faire ma vie. Je plonge dans son étreinte comme s'il était ma dernière bouée de sauvetage. Il faut que ça marche. 

Un monde qui nous sépare.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant