Sun In Your Heart

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23 janvier

Ça fait un sacré bout de temps que je ne suis plus revenu, aujourd'hui ça va, j'arrive à me lever, et à y aller. La boule au ventre, mais j'y vais, je sais que ça ne peut que bien se passer, ça fait un moment, ça doit se tasser, je peux le faire, je suis assez fort comme ça.

Jules reste avec moi, même si je lui dis que ça va, bien sûr il ne me croit pas, je comprends, je ne sais pas si moi-même j'y crois. Tout ce que je sais, c'est que je commence par français, j'aime ce cours, alors pas de quoi stresser, juste à ce mettre au fond sans se faire remarquer et tout se passera comme sur des roulettes. Tu ne sais pas faire de roulette Maël.

Les deux heures passent sans accroc, sans bruit non plus, personne ne fait attention à moi, même pas un regard en croix, non, rien, la tranquillité. Ça me donnerait presque envie de revenir pour de bon.

Je traîne dans les couloirs sur le temps de midi, je n'ai pas envie de manger, et traîner est plus agréable. Il n'y a personne dans les couloirs à ces heures-là, personne pour entendre mes pas, ou les chuchotements que je fais quand je réfléchis. Il y a juste moi, et personne d'autre.

Je m'isole dans un local vide pour griffonner sur des feuilles, au moins ça à faire. Je sais que je suis doué, autant m'y consacrer.

La porte s'ouvre, un des gars, Louis. Mon cœur s'accélère mais je ne le montre pas.

- Oh pardon, je n'avais pas vu qu'il y avait quelqu'un.

Je ne réponds pas, surpris de son comportement. Il remarque que c'est moi et esquisse un sourire. Un sourire?

- Salut, il dit doucement.

Encore une fois je reste silencieux, méfiant. Il s'approche, je suis à deux doigts de l'hyperventilation. Il s'assied non loin de moi, un sourire confiant sur les lèvres.

- Qu'est-ce que tu me veux, je finis par lâcher.

- Oh, rien, ne t'inquiète pas, je ne suis pas comme eux. Je n'ai pas envie, je ne trouve pas ça drôle.

- Alors pourquoi tu ne fais rien?

- J'en sais rien, la peur je suppose. C'est pas facile d'être comme on est.

Son regard me renvoie la confiance, je baisse un peu les armes.

- Je peux voir? Il me dit en montrant mes feuilles du doigt.

Je lui tends la main tremblante, il les regarde en souriant.

- T'as beaucoup de talent tu sais! Tu devrais les vendre, tu pourrais vite te faire beaucoup de thune.

J'esquisse un sourire et acquiesce. Il me les rend, et ose s'asseoir plus proche de moi.

- T'as du courage tu sais, de revenir malgré tout ce qu'ils font. J'en ai parlé avec un prof, mais ils n'ont pas l'air de comprendre, et j'ai peur que le groupe sache que j'ai balancé.

Je baisse les yeux sur mes mains, elles tremblent encore et mon coeur ne se calme pas plus.

Je ferme les yeux un instant, je sens qu'il se rapproche. Il est assis à côté de moi, j'ai un mouvement de recul mais il me retient en prenant mon poignet.

- N'aie pas si peur, ça va.

Il reste silencieux, il me regarde, et je ne comprends pas tout à fait, je veux partir mais mes jambes refusent de m'obéir.