Je m'arrêtai brusquement, les yeux écarquillés.
Miss inconnue sembla s'apercevoir que je ne la suivais plus car elle ralentit, avant de s'arrêter tout à fait. Quand elle se retourna, l'or de ses yeux me fit frissonner.
—Ton ombre... soufflai-je.
Un sourire narquois se dessina sur son visage, ses yeux pétillèrent.
—Je pensais que tu allais t'en apercevoir avant. Tu n'es pas très malin finalement.
Ma mâchoire menaçait de tomber, mais je pus quand même articuler avec difficulté :
—Qui... es-tu au juste ?
—Moi ? Tu n'a toujours pas deviné ?! Réfléchis !
—Une revenante ? Un esprit vengeur ? Un fantôme ? Un monstre invoqué ? Un extraterrestre ?
—Quoi ? non ! pouffa-t-elle.
Elle désigna de son index son chapeau pointu.
—T'es pas sérieuse ? demandai-je, ne pouvant retenir un rire nerveux mais, en voyant le visage sérieux de miss inconnue, mon sourire s'évanouit. C'est impossible ! Les sorcières n'existent que dans les contes pour enfants.
—Pourtant tu as la preuve vivante du contraire juste devant toi.
Je gardais le silence en la dévisageant. Elle n'avait ni nez crochu, ni rides, ni cheveux gras. Elle avait surtout l'air de s'amuser de la situation.
—Je suppose donc que tu fais de la magie ? Avec une baguette magique ? et que tu vole la nuit sur ton balai ? Où est ton chat chat noir, tant qu'on y est ? demandai-je avec agacement.
—En effet, je fais ce que tu appelle de la magie, mais je n'ai pas de baguette magique, répondit-elle, une pointe d'exaspération dans la voix. Mon balai ne me sers qu'à balayer le sol et quant à mon chat... Il est juste devant mes yeux.
—Pardon ?
Je regardai autour de moi et, quand je fus certain d'être seul dans cette rue avec cette folle qui a dû s'échapper d'un asile près d'ici, je remis correctement mes lunettes sur mon nez et la contournai pour continuer mon chemin.
—Tu ne me crois vraiment pas ? Dommage... Je pensais que tu serais plus coopératif, soupira-t-elle en me rattrapant plus vite que je ne l'avais espéré. N'as-tu jamais ressenti une incroyable énergie te traverser ? Peut être pendant une course ?
—Je suis asthmatique, lâchai-je froidement.
Elle parut un instant troublée avant de retrouver son large sourire.
—Cela ne fait rien, puisque je sais que j'ai raison, et j'ai l'intime conviction que tu le sais aussi, même si tu prétends le contraire. Je comprends ta réticence, mais je finirai par faire de toi mon chat.
Elle s'était brusquement arrêtée, la tête tournée vers la maison devant laquelle nous nous trouvions. Je constatais alors que c'était ma maison, et frissonnais, je ne savais pas si c'étais à cause de sa dernière phrase plus qu'ambiguë ou le fait qu'elle sache où j'habite.
—Je ne sais absolument pas de quoi tu parle. Tu prétends être une sorcière et que moi je suis ton chat ? Et bien moi je te suggère d'aller te faire consulter. Je ne sais pas comment tu connaît mon nom ni l'endoit où j'habite mais je te conseille de ne plus t'approcher de moi, et encore moins m'adresser la parole. C'est tout ce que j'ai à te dire, adieu.
Je remontai mes lunettes sur mon nez avant de tourner les talons et m'engageai dans l'allée de la maison. Je crus apercevoir son sourire se crisper.
Je croyais que le lendemain, ma rencontre avec cette fille bizarre ne me préoccuperait plus, j'avais tord. J'aurais presque cru à un mauvais rêve si je n'étais pas aussi dépourvu d'imagination.
Cette rencontre me travailla jusqu'à ce que je m'installai dans la salle du premier cours, seul au premier rang comme d'habitude. A peine eus-je le temps de sortir mes affaires que le prof prit la parole.
—Vous avez une nouvelle élève dans la classe, soyez sympa avec elle, ok ? Eirene ?
Je relevai la tête et remarquai que tout le monde me dévisageait. Je tournai lentement la tête et me rendis compte qu'il y avait quelqu'un d'autre à ma table. La fille d'hier.
—Enchantée. Eirene.
Quand le prof compris qu'elle n'allait rien ajouter, il commenca son cours, déçu. Autour de nous, je remarquai les garçon qui la dévoraient des yeux avec envie, et les filles acéraient déjà leur remarque venimeuse. Miss inconnue - Eirene plutôt - paraissait s'en moquer royalement. Elle reporta à la place son attention sur moi.
—Hey, la folle.
—Hey, le coincé, riposta-t-elle.
—Pourquoi es-tu là ?
—Je n'ai pas le droit ?
—Si, je marmonnai entre mes dents. Qu'est-ce que tu veut ?
—Toi.
Le rouge me monta aux joues.
—Encore cette histoire de chat noir et de sorcières ?
Elle haussa les épaules et se détourna, faisant mine d'écouter le baratin du professeur. Je resister à la tentation mais finalement, trop curieux, jee demandai :
—T'es vraiment une sorcière ?
Je n'y croyais toujours pas, mais une impression bizarre m'envahissait quand j'étais près d'elle. Je suis juste curieux. Rien de plus.
—Viens avec moi après les cours, je t'expliquerai.
Nous marchions depuis une dizaine de minutes, personne n'avait parlé depuis le début. Je sentis peu à peu le sol devenir instable et parsemé de cailloux et de terre. Autour de nous, il n'y avait plus aucune maison. Seulement des arbres. Des immenses arbres, dont on ne voyait pas la cime, s'étendaient à perte de vue.
—Je ne savais pas qu'il y avait une forêt à côté de chez moi.
—Ce n'est pas le cas.
Je n'eus pas le temps d'insister ; nous nous étions arrêtés devant une petite maison en pierre. Elle penchait dangereusement vers l'avant, comme pour dissuader les curieux d'y pénétrer. Les fenêtres et la porte étaient usées et complètement délavées. Eirene actionna la pognée et ouvrit la porte en grand, m'invitant à rentrer. L'humidité me glaçait jusqu'aux os et, même si la demeure semblait prête à s'effondrer, je me précipitai à l'intérieur.
Je fronçai les sourcils, devant moi s'étalait un véritable capharnaüm.
Je balayai la pièce du regard. Le désordre monumental semblait avoir pris possession de la maison. Des grimoires et des feuilles s'empilaient sur la grande table au centre de la pièce et sur tous les meubles. Des fioles et d'autres objets vraiment étranges étaient posés sur toutes les surfaces lisses encore libres, au milieu de plantes séchés et de pierres colorées. Le tout formait un joli ensemble chaotique.
J'aperçus Eirene assise dans un fauteuil devant la cheminée, elle devait m'attendre. Elle a dû fermer la porte et s'est installée pendant que j'étais absorbé par mon exploration.
Je la rejoignis en trottinant, ses yeux se baissèrent vers moi quand je m'assis en face d'elle, sur le tapis.
—Maintenant que nous sommes à l'abris des oreilles indiscrètes, tu pourrais me poser tes question... je suis sure que tu en as plein.
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Le Chat de la Sorcière
ParanormalPour Maxence, les sorcières ont toujours été ces vieilles dames au nez crochu qui chevauchent un balai la nuit tombée. Cette certitude est ébranlée lorsqu'une mystérieuse inconnue se présente devant lui comme étant une Sorcière. Il décide de la sui...