𝐍𝐨𝐬 𝐜𝐞𝐧𝐝𝐫𝐞𝐬 à 𝐥𝐚 𝐦𝐞𝐫

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Os pour le concours d' @ackioshi, parce que voilà. En espérant que ce soit ni un hors-sujet ni une merde infâme, bisous.

3209 mots.

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Il y avait peu de choses que j'appréciais réellement. J'aimais l'océan et ses remous divagants, la justesse implacable de l'écho des vagues et le sentiment invisible que la vie n'était rien face à la pureté de l'eau. J'aimais la voix fatale des chanteuses d'opéra, celles aux vibratos incomparables qui faisaient tomber les hommes comme les femmes. J'aimais les natures mortes et les natures vivantes, dans les musées ou dans la forêt. Je préférais l'art à l'humain car les pensées des œuvres n'étaient que des images que l'on pouvait leur donner.

Le ciel était gris devant la mer. Maussade comme le moral des gens en hiver. Il y avait de ces moments où la couleur qui se délavait ne me paraissait plus si triste. Je préférais la voûte céleste ombrageuse au bleu éclatant qui régnait l'été : le gris était, à mes yeux, une vérité systémique qui ne cachait pas les intempéries. Quand il s'annonçait, on reculait, on se cachait, on avait peur mais on ne doutait pas. Le bleu, lui, figurait comme un mensonge auquel tout le monde croyait. Le noir et ses nuances avaient cette puissance que les tonalités azur ne possédaient pas.

Au loin, l'orage grondait. Il faisait froid et les arbres se pliaient sous la force du vent. Généralement, quand la foudre s'amenait à travers les nuages, cela voulait dire que sa présence n'était pas loin non plus.

Il était un peu plus grand que moi. Pas trop, juste quelques centimètres qui séparaient sa bouche de mon front et ses yeux de mon visage. Quand il arrivait, retrouvant sur la plage la silhouette sombre que mon corps formait, il posait une main svelte sur mon épaule qui frissonnait à son contact. J'aimais sans retenue la beauté fragile et pourtant si réelle de ses doigts glacés. Il me laissait les embrasser quand les larmes se faisaient trop nombreuses.

Inumaki avait les cheveux de ce gris laiteux que j'appréciais tant et les yeux sombres, fracassants. Tout chez lui me rappelait la mer et j'étais heureuse de faire partie de cette dernière.

Il s'assit à côté de moi en regardant les vagues ; je n'avais pas besoin d'avoir ses yeux sur moi pour savoir qu'il me regardait. C'était quelque chose d'unanime entre nous, un contrat que personne ne devait signer. Puisqu'Inumaki ne pouvait pas parler, il n'avait pas à sceller quelconque pacte avec moi.

Moi comme lui aimions cette plage et les cailloux crochus qui nous griffaient les genoux. C'était là où personne ne venait, il faisait trop froid et trop triste. Les jours devant la mer se ressemblaient et le temps n'existait plus, surtout avec lui. Il était une présence invisible, là mais absent. Et inconsciemment, au fond de moi, je sentais que je n'avais pas totalement tort quand j'imaginais qu'il rejoindrait un jour la mer de par sa disparition.

Inumaki, discret comme la brise qui faisait doucement s'envoler mes cheveux, s'en allait le lendemain matin quand il voyait le soleil apparaître. Il m'accompagnait le soir, la nuit, mais redevenait une ombre dès l'approche de la lumière.

Ce jour-là, Inumaki ne semblait pas vouloir partir. Il avait une main sur mon genou tremblant, pour me signifier qu'il était là, toujours ancré sur terre. Pas encore enfui, mais pas très vivant. Il incarnait ce paradoxe insistant que les futilités ne lui servaient à rien, que peu de choses le retenaient ici. Qu'il avait un devoir à remplir mais que le temps était infiniment trop long pour en faire quoi que ce soit.

J'avais le cœur serré. On ne bougeait pas, immobiles sur le sable et les rochers alors que la pluie nous tombait dessus en averse. Je n'avais plus le courage de grelotter, alors, résignée, je me collais contre son corps mouillé. Ça n'arrangeait rien.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 08, 2023 ⏰

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