Ace Jones me hante jusqu'à ma chambre.
Pour cause, ma fenêtre donne sur sa maison avec Clyde, qui se situe juste derrière le campus. C'est les seuls à avoir exigé de posséder leur propre résidence.
Elle est moderne, avec des lignes épurées et un design chic. La façade est recouverte de bardage en bois clair, avec des fenêtres en aluminium noir. Le toit est plat, surplombé de panneaux solaires.
J'ai pu apercevoir lors de mes nombreuses séances d'espionnage, parce qu'Ace et Clyde ne connaissent pas les rideaux, que la maison est spacieuse, avec des planchers en bois franc et des murs peints en blanc. Le salon est ouvert sur une cuisine équipée.
Les lumières sont actuellement allumées, ils doivent probablement s'affairer pour préparer leur soirée perverse. Lorsqu'ils donnent des fêtes, une boule se forme dans mon ventre à chaque fois que je vois des filles entrer dans cette maison. Intactes en apparence, je sais qu'elles ne ressortent jamais indemnes. Ace et Clyde sont réputés pour traiter les filles comme de vulgaires objets. Ils en font ce qu'ils veulent, peu importe les moyens employés pour ce faire. Ça me dégoûte.
Soudain, interrompant toute réflexion, mon souffle se coupe si brutalement que ma tête semble trop lourde. Ace sort vêtu seulement d'une serviette autour des hanches. De quelques pas, il atteint le bord de la piscine. Puis, dos à moi, la serviette tombe à ses pieds. La vapeur d'eau qui émane du plan d'eau ne suffit pas à cacher le spectacle et je semble tomber nez à nez avec son... cul. Qui est athlétique, comme le reste de son corps.
D'un bond contre la paroi, il file sous l'eau qui reflète la lune et atteint en à peine une poignée de secondes l'autre côté. Ses mouvements sont agiles, les tatouages de son corps sont à peine visibles de là où je me tiens. Après une quarantaine de longueurs parfaitement réalisées en crawl, il m'achève parce qu'il sort... toujours en tenue d'Adam. Et cette fois, il n'est pas de dos. Il est à face à moi. Et grand Dieu, elle est énorme.
Comme une sombre idiote, je reste plantée là, bouche bée, presque salivante. Cerise sur le gâteau, quand il lève la tête vers ce que je crois être ma fenêtre, je manque de m'évanouir, le cœur tambourinant comme un fou furieux. En me baissant brusquement, je cogne ma tête contre le rebord et étouffe un cri. Pour ralentir mon pouls et atténuer la douleur, j'imagine si elle avait été aussi petite qu'un bâtonnet à cocktail. C'est sûr, j'aurais eu de quoi lui clouer le bec les prochaines fois où il m'aurait embêtée. Pendant quelques minutes, j'oublie qu'il m'a peut-être surpris en train de le mater.
Les jambes engourdies à force d'être restée ce qui m'a semblé une éternité en position accroupie, je finis par me relever, en ne laissant que mon front dépasser pour m'assurer que Ace n'est plus là. Je suis soulagée de constater que c'est le cas. En revanche, la boule dans mon ventre fait son grand retour quand je vois Bree à deux cent mètres de l'allée menant à la sortie du campus, côté enfer.
Je ne réfléchis pas et attrape un sweatshirt à capuche au hasard, sur une pile de vêtements dont souffre mon bureau, et dévale tous les escaliers qui me séparent du rez-de-chaussée. Je tente de crier sans crier mais Bree ne se retourne pas, alors je pique le sprint de ma vie. Sans doute alertée par mes pas d'éléphant, Bree se retourne enfin, la main sur la poitrine, et me sourit de toutes ses dents qui illuminent plus cette nuit que les étoiles elles-mêmes.
— Salut, Ellie. Qu'est-ce que tu fais là ? Tu m'as fait peur, j'ai cru qu'un taré me courait après, poursuit-elle dans un souffle.
— Oh, euh, petit jogging nocturne.
Elle m'observe de la tête aux pieds.
— Tu cours en tongs, toi ?
Elle balaye sa propre remarque en secouant la tête.
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Poison (sous contrat d'édition)
RomanceRedwood, école discrète pour les enfants riches à problèmes que les parents veulent cacher. Ellie en fait partie seulement parce que, petite, elle a été adoptée par Mme James, la directrice. Ceci en dit long sur le genre de personnes qu'elle est obl...